Dans la matinée de jeudi, il était déjà problématique pour nombre de citoyens de s’approvisionner en pain
Cette léthargie généralisée est d’autant plus prononcée cette année qu’elle coïncide avec la période des vacances.
Le mois de Ramadhan de l’an 1433 de l’Hégire a débuté, hier, suite à l’annonce faite par la Commission nationale d’observation du Croissant lunaire, réunie la veille au soir au siège du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs.
Dans la matinée de jeudi, il était déjà problématique pour nombre de citoyens de s’approvisionner en pain ou de prendre un repas décent à l’extérieur, sachant qu’à l’approche du mois sacré, les patrons de boulangeries et de restaurants n’hésitent pas à libérer leurs personnels. Cet épiphénomène renseigne on ne peut mieux sur les bouleversements que connaît la société algérienne à la faveur du mois de jeûne. En fait, le phénomène est ce coma profond qui s’empare de la société tout entière dès le premier jour de ce mois de piété et d’abstinence. Aux premières lueurs de cette journée du vendredi, les rues sont désertes et la plupart des commerces ont baissé rideau. La grasse matinée est de mise pour la majorité des Algériens, qui ont la chance que ce premier jour de jeûne coïncide avec le repos hebdomadaire. Cette léthargie généralisée est d’autant plus prononcée cette année qu’elle coïncide avec la période des vacances. Les effets de la torpeur estivale généralisée ne peuvent donc n’être qu’énormes, et cet impact négatif va s’accentuer avec la réduction de facto du temps de travail pendant le Ramadhan qui est malheureusement synonyme d’activité politique réduite, d’absentéisme et de frénésie acheteuse.
Ainsi, la classe politique nationale, qui, en temps normal déjà, manque d’inspiration et de volonté pour prouver qu’elle est une force de proposition, affiche les premiers signes de sinistrose. Les partis les plus en vue n’auront pas brillé par leur activité au plus fort de cet été, cette tendance à l’apathie risque de s’aggraver au cours de ce mois saint.
Cette «éclipse» de la scène politique est d’autant plus inquiétante que les chantiers, où l’apport des formations politiques est plus que souhaité, sont nombreux. Il s’agit, notamment du dossier de la révision de la Constitution, engagé par le chef de l’Etat, l’éducation nationale, la santé, l’eau…
Point de miracle donc dans l’immédiat, c’est-à-dire point d’initiatives politiques et point de projet de société de leur part. Ceci est d’autant plus vrai que les partis politiques les plus en vue sont englués dans des crises qui les minent de l’intérieur. Divisés, rongés par la dissidence, ils offrent le triste spectacle de structures éloignées des normes modernes de fonctionnement.
Aux problèmes structurels s’ajoutent les questions de leadership, d’ambitions personnelles, de clientélisme, d’absence de fonctionnement démocratique et de visions stratégiques. Autant de maux qui creusent entre eux et la société un fossé abyssal. Désormais, les formations politiques sont réduites à leur simple existence. Nos augustes députés ne manqueront pas, pour leur part, de clore ce tableau peu reluisant en se distinguant certainement par leur sport favori, l’absentéisme des bancs de l’hémicycle. L’absentéisme à l’Assemblée populaire nationale sera assurément à son comble entre juillet et août, surtout qu’il s’érige en règle de conduite, faute de mesures pouvant le sanctionner. Les acteurs de la société civile, notamment les associations, qui font pourtant florès, semblent également démissionnaires devant bien des réalités. Si elles manifestent quelques activités printanières, elles sont rares à prouver leur existence sur le terrain. Celles se prévalant de la défense du consommateur se contentent dans le meilleur des cas de laconiques communiqués dans lesquels elles dénoncent des pratiques commerciales peu orthodoxes, sinon elles invitent nonchalamment le citoyen à la vigilance. La machine économique n’échappe certainement pas à cette fatalité et tourne au ralenti du fait du rythme de vie estival, des sous-effectifs dus aux congés, mais aussi de l’atmosphère induite par le mois de Ramadhan.
Autant de facteurs conjugués lesquels, ajoutés au décalage horaire avec l’Europe, font subir aux entreprises algériennes une véritable désynchronisation généralisée au quotidien.
Le Ramadhan qui exacerbe les habitudes comportementales négatives des Algériens et des Musulmans en général poussera les citoyens à dépenser davantage. Le rythme de vie estival et la vie nocturne finiront aussi bien par disjoncter la facture énergétique que ralentir la machine économique.