La militante marocaine des droits de l’homme, Khadija Ryadi, a affirmé que les pays européens ferment les yeux sur les violations des droits de l’homme au Maroc et continuent à ne pas faire pression sur les autorités, estimant qu’ils ont des « intérêts communs ».
« Même s’ils (les autorités marocaines) soignent cette image, ça ne peut pas durer. Et les pays européens défendent leurs intérêts et ferment les yeux sur ces violations. Ils savent que tout cela est une fausse image mais ils continuent à ne pas faire pression sur le Maroc parce qu’ils ont des intérêts communs », a expliqué l’ancienne présidente de l’Association marocaine des droits humains (AMDH) dans une interview au journal électronique français Médiapart.
Elle a indiqué que ces pays ferment également les yeux sur la répression des migrants « parce que ça les arrange », précisant qu’ils ont besoin des services du Maroc dans la lutte antiterroriste, en fermant les yeux sur les abus des autorités « parce qu’ils en profitent ».
Khadidja Ryadi, qui a reçu le prix des Nations unies pour les droits de l’homme en 2013, a fait constater, dans un bilan très critique sur la situation des droits de l’homme au Maroc, que « même les ONG internationales ont des problèmes avec le Maroc ».
« Deux enquêteurs d’Amnesty International ont été expulsés. Human Rights Watch n’est plus acceptée. La représentante de la Fondation Friedrich Naumann a été forcée de quitter le Maroc. Les ONG internationales ont du mal à travailler au Maroc », a-t-elle expliqué, relevant que la monarchie « continue à être omniprésente » et le roi préside un ensemble d’institutions exécutives, législatives, religieuses, sécuritaires.
Tous les indicateurs, fait-elle observer, « montrent qu’il n’y a pas de démocratie » au Maroc et que « l’on travaille plus sur l’image ».
« Il y a beaucoup de discours mais au niveau de l’impact des mesures prises et des politiques pour les libertés et les droits humains, la réalité montre que nous sommes loin d’une démocratie et loin d’une volonté politique pour mettre en place les bases d’un Etat de droit », a-t-elle souligné.
Au sujet du droit à l’information, figurant dans la Constitution marocaine, la militante des droits de l’homme a déploré le fait qu’on ne voit pas la concrétisation de ce droit au niveau des lois puisque, a-t-elle précisé, « le projet de loi en cours de préparation contient énormément de conditions pour avoir accès à l’information ».
« Une association qui forme des journalistes d’investigation a d’ailleurs des problèmes avec les autorités. On ne veut donc pas de journalisme qui permette au citoyen d’avoir accès à l’information », a-t-elle encore affirmé.
A propos de la répression dont elle fait l’objet, Khadidja Ryadi a indiqué « être victime de diffamation, c’est une nouvelle forme de répression dont je ne suis pas la seule victime. Un ensemble d’activistes en sont victimes », ajoutant qu’il y a des organes de presse « qui ne travaillent que sur ça ».