Maître Farouk Ksentini, président de la commission nationale consultative de la promotion et de la protection des droits de l’homme (CNCPPDH) a remis son rapport annuel au président de la République la semaine dernière.
Ce document réaffirme encore une fois les droits légitimes des citoyens aux plans social, économique et politique et le besoin d’être à l’écoute de toutes les doléances, notamment à l’ère des nouvelles réformes initiées par la plus haute autorité du pays. «Opportunité propice à ne pas rater», a déclaré, hier, Me Ksentini contacté par téléphone.
«De grands pas vont être franchis dans de très peu de temps», estime-t-il en saluant la volonté politique de procéder à des réaménagements politiques, dans le souci d’offrir de meilleures prestations notamment en termes de justice sociale et de gouvernance.
L’instance de consultations mise en place autour des réformes politiques se doit d’être impartiale et précise, «car il y va de l’avenir du pays», a-t-il soutenu. Au sujet des contours du rapport transmis au premier magistrat du pays, Me Ksentini laisse entendre qu’il doit avoir l’aval du Chef de l’Etat pour pouvoir le publier. Mais de manière générale, résume-t-il, la CNCPPDH a insisté pour la énième fois sur le respect des droits de l’homme, sur la qualité de la justice et la promotion de la démocratie et des droits sociaux. Interrogé sur le sort des internés du Sud, Me Ksentini confirme que son rapport n’a pas omis cette question, devant être «diligemment résolue», selon lui. La commission qu’il préside a proposé d’indemniser cette catégorie de personnes pour les préjudices subis, étant donné «qu’elles ne sont coupables de rien». Sur ce même chapitre, Me Merouane Azzi, président de la commission judiciaire de mise en œuvre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale (CJMOCPRN), contacté par nos soins, rappelle effectivement que le rapport établi par l’instance qu’il préside, également transmis au président de la République, a souligné le besoin de répondre favorablement aux revendications des internés dans les camps du Sud.
Cette instance fait savoir qu’elle ignore toujours le nombre exact de ces internés sur décision du ministère de l’Intérieur durant la période 1992-1994, avant que ces camps ne soient fermés en 1995. Ils ont été suspectés, selon Me Azzi, d’atteinte à l’ordre public et aujourd’hui ils réclament la réparation et l’indemnisation. Un problème se pose : la majorité ne détiennent pas le PV de détention. Cependant, la CJMOCPRN est déterminée à faire valoir ce droit aux internés, puisqu’elle a eu des « garanties » à ce propos. Le comité de défense des internés des camps du Sud (CDICS) estime que la charte pour la paix et la réconciliation nationale est incomplète dès lors qu’elle ne prend pas en considération ce qui est appelé «les déportés des camps du Sud». La plupart d’entre eux ne comprennent pas, jusqu’à aujourd’hui, les raisons de leur internement. Ils sont 18 000, selon la CNCPPDH, 20.000 selon la Ligue des droits de l’homme.
Le comité revendique à ce que les registres détenus au niveau des wilayas soient rouverts et que ces ex-internés bénéficient d’attestations qui leur permettent de revendiquer leurs droits. Certains d’entre eux ont perdu leur emploi, d’autres leurs commerces et il y a ceux qui ont passé des années en prison. Les uns et les autres doivent être régularisés et leurs années non déclarées à la sécurité sociale doivent être prises en considération. Le CDICS demande également à ce que les personnes ayant été arbitrairement emprisonnées dans ces camps soient indemnisées par l’Etat. Quant aux veuves et orphelins des ex-internés décédés, ils ont également droit à une indemnisation, selon ce comité.