Après une série noire de naufrages qui ont fait des centaines de morts depuis le début de l’année, l’Union européenne a décidé de tenir, jeudi prochain, un sommet extraordinaire pour répondre en urgence au drame des migrants en Méditerranée.
Un plan d’action en dix points servira de «base de travail» aux dirigeants européens lors de ce sommet. Il prévoit le doublement des moyens pour la mission de surveillance maritime Triton, qui pourra patrouiller dans une zone plus large et devra participer aux secours.
Le dernier a eu lieu près de l’île grecque de Rhodes, où un voilier s’est échoué, hier, sur des rochers. Trois migrants, dont un enfant, ont péri et 93 personnes ont pu être sauvées au cours d’une impressionnante opération de secours à quelques mètres du rivage.
«Nous ne pouvons pas continuer comme cela, nous ne pouvons accepter que des centaines de personnes meurent en essayant de traverser la mer pour venir en Europe», a affirmé le président du Conseil européen, Donald Tusk, en annonçant ladite réunion des chefs d’Etat et de gouvernement jeudi. Elle avait été demandée par le Premier ministre italien, Matteo Renzi. Mais M. Tusk a prévenu «ne pas attendre de solutions rapides aux causes profondes des migrations, parce qu’il n’y en a pas». «S’il y en avait, nous les aurions mises en œuvre depuis longtemps», a-t-il insisté. «Si nous n’agissons pas maintenant la crise va prendre des proportions dangereuses dans les mois qui viennent», a prévenu pour sa part le commissaire européen en charge du dossier, Dimitris Avramopoulos, en détaillant un plan d’action en dix points qui servira de «base de travail» aux dirigeants lors de ce sommet du jeudi prochain. Ce plan a été soumis, lundi, aux ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur de l’UE. Il prévoit le doublement des moyens pour la mission de surveillance maritime Triton, qui pourra patrouiller dans une zone plus large et devra participer aux secours. Une mesure plus audacieuse, de capture et de destruction des bateaux utilisés par les trafiquants est également envisagée, mais elle devra recevoir le feu vert de l’ONU et vaincre les réticences de certaines capitales, notamment Londres. Les Européens veulent aussi s’attaquer aux trafiquants, en lançant une opération «systématique pour capturer et détruire les navires» utilisés, selon la Commission européenne. L’UE veut également mettre en place un projet pour répartir entre les 28 pays membres, sur une base volontaire, au moins 5000 demandeurs d’asile. D’autres pistes sont évoquées, comme un renforcement de la Mission européenne au Niger pour fermer la frontière de la Libye qui est aujourd’hui «un couloir parfait pour les trafics d’êtres humains », selon la chef de la diplomatie de l’Union européenne, Federica Mogherini. Les solutions à la crise des migrants sont discutées depuis un naufrage qui a fait 366 morts en octobre 2013 près de Lampedusa. Il a été question de mettre en place des voies légales de migration, d’intervenir contre les trafiquants dans les pays de départ et de changer les règles pour la prise en charge des migrants. Toutes ces propositions ont cependant été rejetées jusqu’ici.

R. I. /Agences
Le bilan a atteint 800 morts
Le naufrage au large des côtes libyennes a fait 800 morts, ont annoncé tôt ce matin à Catania, en Sicile, des représentants du Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR) et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), après avoir parlé avec les survivants. «On peut dire que 800 personnes sont mortes», a déclaré Carlotta Sami, porte-parole du HCR en Italie, avant que le porte-parole de l’OIM, Flavio Di Giacomo, ne vienne confirmer cette estimation. Des représentants du HCR et de l’OIM ont pu interroger la plupart des 27 survivants arrivés dans le port de Catane vers minuit. Ces migrants ont débarqué environ deux heures plus tard du bateau. «Nous avons confronté les témoignages, il y avait un peu plus de 800 personnes à bord, dont des enfants de 10, 12 ans. Il y avait des Syriens, environ 150 Erythréens, des Somaliens… Ils étaient partis samedi à 08H00 de Tripoli», en Libye, a expliqué Mme Sami. «Les survivants viennent du Mali, de Gambie, du Sénégal, de Somalie, d’Erythrée et du Bangladesh», a ajouté M. Di Giacomo, précisant qu’il y avait parmi eux quatre mineurs. Tous ont été conduits dans des centres d’accueil de la région. Selon le récit des survivants, le chalutier qui les transportait a chaviré sous l’effet d’un mouvement de foule alors qu’approchait un cargo portugais appelé à son secours. Les garde-côtes italiens ont annoncé avoir repêché 24 corps, débarqués hier matin à Malte, mais n’ont pas confirmé le bilan évoqué par les survivants «Près de 1 000 Africains (ont péri) au fond de la Méditerranée en deux jours : le silence n’est plus possible», a commenté le chef de l’Etat congolais, en soulignant que ces drames touchent «d’abord les Africains». La semaine dernière, quelque 450 migrants étaient déjà morts dans des accidents similaires, selon les autorités italiennes
Premières arrestations
La police italienne a annoncé dans la nuit que deux des survivants, un Tunisien et un Syrien soupçonnés d’avoir été le capitaine et un membre d’équipage du chalutier, avaient été arrêtés à bord du bateau des garde-côtes. Deux passeurs présumés syriens ont été arrêtés au lendemain du naufrage d’un voilier au large de l’île de Rhodes, qui avait fait trois morts, selon la police portuaire grecque qui a annoncé avoir secouru ce mardi deux autres bateaux de migrants en difficulté. Les deux hommes, âgés de 26 et 27 ans, qui figuraient parmi les rescapés du naufrage, seront transférés devant le procureur de l’île grecque de Rhodes dans la journée. Ils sont tenus pour responsables du naufrage du voilier près du port de Rhodes, dans le sud-est de la mer Egée, au cours duquel trois personnes dont un enfant on péri. Selon un bilan définitif de la police, 93 personnes, dont une majorité de Syriens, se trouvaient sur le voilier, venu des côtes turques toutes proches. Le bateau s’est échoué sur les rochers près du port de Rhodes et 90 migrants ont pu être sauvés.
Des migrants algériens parmi les naufragés ?
Un nombre indéterminé de ressortissants algériens étaient parmi les passagers de l’embarcation ayant fait naufrage dans la nuit du samedi à dimanche derniers», selon Il Sole 24, cité par le site en ligne TSA. A l’heure où nous mettons sous presse, le ministère des Affaires étrangères, qui a exprimé la «vive émotion» de l’Algérie suite au naufrage d’un bateau de migrants en Méditerranée en provenance de Libye et qui a fait 800 victimes, n’a cependant, ni infirmé ni confirmé l’information. «Cette nouvelle tragédie qui a immanquablement heurté toutes les consciences, interpelle l’ensemble de la communauté internationale sur la nécessité et l’urgence d’arrêter une stratégie globale et équilibrée pour le traitement du phénomène de la migration et la gestion des flux migratoires dans le respect strict des droits de l’homme et de la dignité des migrants», s’est juste contenté de dire Abdelaziz Benali Cherif, porte-parole du MAE dans une déclaration à l’APS.