Dr Nacer Idres, vétérinaire et expert assermenté dans la production et santé animale «Avec l’intégration, nous éviterons l’effet « yoyo» dans la vente du poulet»

Dr Nacer Idres, vétérinaire et expert assermenté dans la production et santé animale «Avec l’intégration, nous éviterons l’effet « yoyo» dans la vente du poulet»
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La filière avicole en Algérie se dirige vers de nouvelles méthodes d’organisation. La spécialisation et l’intégration ainsi que la régulation constituent un ensemble d’éléments qui vont permettre de mieux structurer la filière et de produire un poulet local répondant aux normes. Mais aussi baisser le taux d’importation des intrants.

C’est ce qu’a indiqué, Dr Nacer Idres, vétérinaire et expert assermenté dans la production et santé animale. Il répondait aux questions de L’Econews, en marge du salon international de l’élevage, des technologies végétales du machinisme et de l’agro-alimentaire «Sipsa-Agroexpo».

L’Econews : Pouvez-vous nous faire un point de situation sur la filière avicole?

Dr Nacer Idres :Au même titre que les filières qui sont en train de s’organiser en Algérie, comme l’interprofession céréale et culture, pomme de terre, l’oléicole, la filière avicole est en train de s’organiser. C’est une filière un peu enchevêtrée. C’est pour cette raison que la fondation Filaha innove, en tant que groupe de réflexion, est en train d’accompagner le comité interprofessionnel avicole par l’organisation des segments de dans cette filière. Il faudrait que ces segments se spécialisent pour qu’on arrive à l’interprofession avicole. Il faudrait surtout qu’on arrive un jour à émettre un bulletin avicole spécial au même titre que la météorologie. Ce bulletin doit être diffusé au minimum une fois par semaine.

Peut-on avoir plus de détails sur ce bulletin avicole?

Techniquement, la filière avicole est constituée de maillons de la chaine. Il y a plusieurs intervenants pour préparer le poulet qu’on est en train de manger. Il y a le fabriquant d’aliment qui prépare cette matière, le vétérinaire, la couveuse qui prépare le poussin d’un jour, l’éleveur qui prépare un poulet à 45 jours et d’autres intervenants. Vous voyez un peu combien d’acteurs qui interviennent pour que le poulet arrive chez le consommateur ? Donc une bonne coordination entre ces maillons est indispensable. Dès qu’il y a un problème au niveau de l’un des maillons, le spécialiste doit émettre un bulletin spécial pour qu’au bout de la chaine, on ne risque pas d’avoir beaucoup de problèmes. Pour que la chaine ne se casse pas, en d’autres termes.

Qu’en est-t-il du marché du poulet ?

Aujourd’hui, on s’attend à une augmentation de la production nationale avec une grande baisse des prix à la vente. Le ministère de l’Agriculture a mis en place un système de régulation pour le stockage du poulet. C’est un système de sauvegarde de la production nationale. D’ailleurs, de grandes quantités de poulet ont été stockées dans les chambres froides. Elles seront disponibles pour le mois de ramadhan. Cela, en plus de la production du mois qui ne s’arrête pas. Ce qui fait que les prix seront à la baisse même durant le mois du ramadhan.

Et pour ce qui est des importations?

Le poulet que l’on consomme est depuis très longtemps fabriqué chez nous. Toutefois, les intrants qui entrent dans la production de ce poulet sont importés. Le ministère de l’Agriculture a pensé à stimuler et à booster un système d’intégration. On a commencé aujourd’hui à produire notre maïs. Et comme vous le savez, le maïs constitue le premier intrant pour la fabrication d’un poulet de chair. Partout dans le monde, il faut 1,5 kg de maïs pour la production d’un kg de poulet. Chez nous, on est à la barre des 2,5 kg de maïs.

On commence à faire de l’intégration. On est en train de cultiver du maïs et peu être qu’on va avoir un taux d’intégration à la hausse. Ce qui va nous permettre de baisser les importations des intrants au même titre que les céréales. Donc, aujourd’hui, nous sommes obligés de produire localement ces intrants pour contrebalancer un peu cet effet d’importation. Et si on fait de l’intégration, en maitrisant la gestion de ces intrants, nous allons éviter l’effet «yoyo» dans la vente et la production du poulet. Effectivement, le prix du poulet a atteint parfois à 600 DA le kg, et d’autres fois à 200 DA. Cet écart est néfaste, et pour l’éleveur, et pour le consommateur. Donc la spécialisation et l’intégration, la régulation, sont un ensemble d’éléments qui vont nous permettre une bonne organisation et une bonne production locale sécurisée, et de baisser le taux d’importation des intrants.

Ce système de stockage n’aura pas un impact négatif sur le producteur du poulet?

Au contraire. Le système de stockage, est un système qui va les sauver. C’est vrai qu’avec la baisse des prix, le premier qui pâtit l’éleveur. Et ce n’est pas intéressant de perdre notre aviculteur conjoncturellement. Parce que, si on le casse, on casse toute la chaine. Il doit couvrir ces frais et faire des bénéfices. Donc, ce qui va le préserver justement, c’est ce modèle de régulation et ce stockage. C’est le fait qu’il soit entouré par un système de production sécurisé.

Donc on peut dire que la filière est sur la bonne voie ?

Nous sommes confiants et conscients. Parce qu’on part vers une tendance d’organisation spécifique, qui est la spécialisation par filière. Nous voulons faire dans le renouveau et le développement durable de l’agriculture. Aujourd’hui, on ne parle pas uniquement de l’agriculture mais de l’agro-industrie. Maintenant, c’est l’industriel qui va passer des commandes à l’éleveur pour lui préparer des quantités de poulet bien précises.

Propos recueillis par Lahcene Brahmi