C’est le chant des supporters des Fennecs. Lorsqu’ El-Khedra gagne, c’est tout un peuple qui le reprend en choeur dans les rues d’Alger, Oran, Jijel, Constantine et même à Paris, Londres ou Montréal, là où résident la diaspora algérienne passionnée par sa sélection nationale.
Après une traversée du désert dans les 90 et une grande partie des années 2000, ce chant de ralliement a repris de la vigueur lors des éliminatoires au Mondial 2010, où tout un pays a fait bloc derrière les Verts lors de leur match de barrage épique face à l’Egypte au Soudan, le 18 novembre (1-0). En dehors des stades, le slogan a trouvé écho chez des artistes comme le Groupe Torino & Milano qui réussit un coup monstrueux en faisant de «One, two, three viva l’Algérie» un tube disco.
Quelques années plus tard, en juin 2014, c’est le présentateur franco-algérien de Beinsport Smaïl Bouabdellah qui se lâche dessus juste après la qualification historique de l’Algérie pour les huitièmes de finale du Mondial, après un match nul contre la Russie de Fabio Capello (1-1). En attendant qu’il envahisse de nouveau nos oreilles lorsque l’Algérie reprendra son parcours pour le Mondial 2018, on a décidé d’essayer de savoir quand était apparu pour la première fois ce refrain, cousin éloigné du «Et un, et deux, et trois zéro» de l’été 1998.
Pour cela, il faut aller puiser dans l’Histoire pour trouver la source. C’est lors de la période coloniale que l’on trouve l’une des premières explications (1830-1962). L’Algérie est alors une colonie française et considérée comme un département de la métropole. A partir des années 50, le mouvement nationaliste algérien est en pleine effervescence avec comme objectif avoué d’obtenir l’indépendance du pays. Pour rassembler un maximum de soutien, et notamment des pays non alignés, en grande partie anglophones, les indépendantistes avaient décidé d’interpeller la communauté internationale en lançant le slogan en anglais «We want to be free» («Nous voulons être libres»).
Ce slogan politique est scandé lors des manifestations, et se transforme très rapidement avec une petite contraction ou abus de langage en «One, two, three, viva l’Algérie!». En somme, un cri de douleur, un cri du coeur qui rassemble des millions d’Algériens jusque dans les stades. La première fois qu’on l’a entendu dans une enceinte, ce fut le 3 mai 1974, lors d’un match amical entre l’Algérie et les Anglais de Sheffield United au stade Bouakeul d’Oran. Les Fennecs s’imposent sur le fil (3-1). Belkedrouci, Lalmas et Belbahri inscrivent les trois buts de la sélection. En tribunes, les fans reprennent alors en chœur le chant «One, two, three», comme un écho aux trois buts…
Un an plus tard, le chant se fige définitivement dans l’imaginaire des Algériens. Sous le regard de l’ombrageux Houari Boumedienne, héros de la révolution et président du pays depuis 1965, le pays accueille la France pour la finale du tournoi de football des jeux méditerranéens. On est le 6 septembre 1975, treize ans après l’indépendance, et les séquelles de la guerre de décolonisation sont encore fortement présents. Dans un match au scénario incroyable, l’Algérie de Rachid Mekhloufi renverse la France (3-2 a.p.). Des travées de l’immense stade du 5 juillet les «one, two, three viva l’Algérie!» des 100 000 spectateurs présents font frémir tout un pays. Un succès vécu comme une revanche face à l’ancien colon.