Dossier Djezzy : Un expert algérien propose d’autres «pistes»

Dossier Djezzy : Un expert algérien propose d’autres «pistes»
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Alors que le gouvernement algérien a définitivement tranché la question de la nationalisation de l’opérateur Orascom Telecom Algérie, des voix, certes rares, s’élèvent pour recommander la raison dans le traitement de ce dossier qui a déjà fait couler beaucoup d’encre.

Alors que le gouvernement algérien a définitivement tranché la question de la nationalisation de l’opérateur Orascom Telecom Algérie, des voix, certes rares, s’élèvent pour recommander la raison dans le traitement de ce dossier qui a déjà fait couler beaucoup d’encre. C’est le cas de Farid Bourennani docteur en ingénierie financière et conseil international en opérations de haut de bilan « fusion acquisition ».

Dans un entretien accordé au journal électronique Maghreb Emergent, il explique pourquoi la démarche du gouvernement algérien dans le dossier Djezzy menace de détruite la valeur de cet opérateur, et propose d’autres pistes pour « algérianiser » l’actionnariat de OTA sans s’enliser dans une impasse.

Cet expert algérien remet d’ailleurs en cause toute la démarche du gouvernement concernant ce dossier et va jusqu’à mettre à nu les limites de l’exercice du droit de préemption brandi par l’Algérie pour racheter l’opérateur.

Il estime en effet que ce droit de préemption n’était pas opposable à OTH dans le cas de sa prise de contrôle par un autre groupe étranger, comme c’est le cas pour le processus engagé avec Vimpelcom.

Farid Bourennani explique ainsi que ce processus n’a aucune incidence sur l’actionnariat de la filiale algérienne, la licence algérienne étant toujours détenue par OTH à 96,81% et par Cevital à 3,19%.

Pour lui, l’actionnariat d’OTH SAE, coté en bourse au Caire et à Alexandrie et indirectement à Londres à travers GDR, n’a jamais cessé d’évoluer depuis 2001 et l’acquisition de la licence algérienne. « Avec MTN puis Vimpelcom, c’est Weather Investment SPA, actionnaire de référence d’OTH SAE depuis 2005, qui doit changer de main en janvier prochain si les AG confirment les accords des conseils d’administration. Cela n’a aucune conséquence sur l’actionnariat d’Orascom Télecom Algérie (OTA) », ajoute-t-il.

Selon lui, le droit de préemption que veut appliquer le gouvernement algérien ne fonctionne que si OTH décidait de céder ses parts dans OTA à un autre acteur. Ce qui, d’après lui, n’est pas le cas aujourd’hui. Il faudrait donc éviter pour l’Etat algérien de mettre OTH en situation de requalifier le droit de préemption en « vente contrainte », recommande-t-il, car l’arbitrage international sera alors inévitable, et un procès « est le pire des scénarios » puisqu’il aura pour conséquence « la destruction de la valeur de Djezzy ».

Interrogé sur les motivations de l’Etat algérien déterminé à reprendre l’opérateur en question et le rapport qu’il pourrait y avoir avec l’épisode de la vente des cimenteries Orascom au groupe Lafarge, l’expert financier a exclu cette hypothèse estimant que la famille Sawiris a été plus payée en actions qu’en numéraire dans la prise de contrôle de sa branche matériaux de construction en 2007 par le groupe français. « Peut-on alors parler d’opération spéculative dans cette fusion acquisition ?

Le spéculateur vend tout, prend du numéraire et s’en va », explique-t-il. Pourquoi donc cette détermination de l’Algérie à racheter Djezzy ? « Il reste cette idée selon laquelle, il existe une plus value à capter dans l’achat-revente de Djezzy », relève-t-il. Mais là aussi, il existe un revers à la médaille. « Le marché a ses réflexes.

Dès lors qu’un opérateur dans les télécommunications est géré par un Etat, il perd immédiatement de sa valeur », met-il en garde.

« Le scénario en cours est un scénario de confrontation et de destruction de valeur. Il faut revenir à un partenariat qui conserve la dynamique du premier opérateur sur le marché algérien. Djezzy est déjà algérienne, par son personnel, sa maîtrise technique et son implantation.

Il est possible d’algérianiser son actionnariat en procédant à une augmentation du capital à la bourse d’Alger avec comme objectif à terme les 51% », recommande-t-il. Farid Bourennani propose que l’augmentation du capital soit réservée exclusivement aux Algériens avec des tranches réservées aux clients de Djezzy et à ses salariés, une autre aux investisseurs et personnes morales et une tranche pour le fonds national d’investissement (FNI), ou tout autre instrument souverain.

« Cela, note-t-il, réglerait la question du financement en dinars d’OTA et répondrait au souci manifeste de l’Etat algérien de réduire les exportations de devises générées par les résultats d’exploitation de Djezzy ».

Mais, pour cela, il faudrait que le gouvernement algérien réussisse à convaincre les propriétaires d’OTA pour un tel scénario qui préserve la poule aux œufs d’or. Ce qui reste difficile dans le temps actuel, vu l’enlisement du conflit entre les deux parties. En revanche, il existe d’autres pistes que le gouvernement algérien peut bien emprunter pour « récupérer » Djezzy.

M. Bourennani propose d’ailleurs que l’Etat algérien fasse carrément une offre publique d’achat (OPA) sur le groupe égyptien OTH dont la valeur de l’action à la Bourse du Caire est à la portée du portefeuille. « Au cours actuel de l’action OTH, il est possible d’en acquérir 48% du capital, au prix, 3,5 à 4,5 milliards de dollars, que le gouvernement parait prêt à mettre pour racheter 96,81% de OTA en Algérie », indique-t-il.

Cette option, précise-t-il, « si elle ne devait permettre de récupérer que 25% du capital de OTH SAE, nous serions dans une autre configuration, celle d’une co-entreprise où les partenaires auraient intérêt à créer ensemble de la valeur, en Algérie et ailleurs dans les autres opérations existantes d’OTH et d’autres opérations à lancer ».