Doha-Alger : des projets de bazar et promotion d’Al Qaïda

Doha-Alger : des projets de bazar et promotion d’Al Qaïda

Cet été, Doha semble avoir mis les bouchées double dans des projets économiques en Algérie au moment où Bouteflika joue le jeu trouble du Qatar: soutenir les groupes terroristes d’Al Qaïda au Maghreb islamique et soutenir sur le tard, au nom de la démocratie, les Révolutions arabes.

Bouteflika avec l’Emir du Qatar

En un laps de temps, dans une Algérie mise en veille, après ses soubresauts politiques des législatives, les autorités ont annoncé, par des voies détournées, ce mois de juillet, pas moins de trois projets économiques d’ores et déjà ficelés, on ne sait sous quelles conditions, avec les Emirats arabes unis et le Qatar au moment où les géants de l’industrie automobiles de France et d’Allemagne sont visiblement frileux pour investir dans un pays en deçà des normes de fiabilité internationale en termes de compétitivité et de compétences humaines sur le long terme.

Ces projets, vu la rapidité avec laquelle l’Algérie les a empaquetés, nourrissent plus des suspicions politiques et idéologiques que d’analyses sur de véritables contrats économiques capables d’investir dans un tissu industriel créateur d’emplois. Ainsi, c’est à l’occasion de l’exposition de l’Armée Nationale Populaire « Mémoires et réalisations », que le citoyen algérien apprend qu’un véhicule blindé baptisé « Nimr » pour le transport des troupes sera construit en Algérie, après la signature de l’accord de partenariat entre le Groupement pour la Promotion de l’Industrie Mécanique (GPIM) du ministère de la défense et le groupe émirati Tawazun, un consortium de fabrication de pointe, leader dans le domaine des composants pour les industries aérospatiale et pétrochimique, basée à Abu Dhabi, en partenariat avec le géant de l’aéronautique français, Dassault.

Les quelques rares déclarations qui ont accompagné les actes de création entre « Nimr Algérie Spa » et ce groupe émirati Tawazun ne mettent en avant que « le principe de confiance entre les deux pays frères » ou « le principe de complémentarité industrielle entre les deux pays » pour…produire un véhicule blindé à usage militaire et dont la fabrication en Algérie, à Khenchela, précisément, ne générera que quelques 400 emplois sur une période qui n’a pas été précisée. Le gouvernement Qatari, représenté par son premier ministre cheikh Hamad ibn Djabr Al Thani a proposé également à son homologue algérien un partenariat pour la réalisation de quatre mégas projets, s’inscrivant dans le cadre de l’industrie, de l’énergie et du transport aérien. Les autorités algériennes ont annoncé également cet été, avoir choisi le Qatar pour construire un méga-complexe sidérurgique à Jijel, dans la zone industrielle de Bellara, à 360 kilomètres à l’est d’Alger, d’une capacité de cinq millions de tonnes par an, préférant ainsi Doha à un groupe local.

Cet accord « international » a été signé aux dépens du groupe privé algérien Cevital, dont le projet n’a pas été retenu pour des raisons obscures. En mars dernier, le patron du premier groupe algérien en termes de chiffre d’affaires (2 milliards de dollars par an), Issad Rebrab, avait dénoncé le blocage de ses projets par le gouvernement. Le groupe Cevital (agroalimentaire, industrie, grande distribution) avait en effet annoncé en 2010 son intention d’implanter un complexe sidérurgique dans la même région pour un investissement de 3,2 milliards de dollars après que le groupe égyptien Izz Steel eut renoncé à y concrétiser un investissement similaire pour 1,25 milliard de dollars. Ce contrat obscur dans ses tenants et aboutissants entre l’Algérie et le Qatar, au détriment d’investisseurs nationaux, semble avoir été bâclé. Et pour cause : Aucune précision sur l’ identification du groupe Qatari, le montant de l’investissement et les délais de livraison de cette usine n’a été donnée. Prétexte donné : L’Algérie et le Qatar devaient encore négocier cet accord. Rappelons dans ce contexte que le complexe industriel, fleuron de la sidérurgie algérienne des années 70 et 80 allait être bradé comme toutes les autres complexes industriels étatiques minées par le laisser aller, la rente, la bureaucratie, avant qu’il ne soit repris par les Indiens en 2005.

Dans la foulée, le partenaire Qatari élu compte réaliser en Algérie une usine de montage de véhicules touristiques, notamment des deux maisons de construction automobile Renault, Volkswagen, dont le Qatar est un actionnaire très influent. La deuxième puissance mondiale en ressources gazières veut également lancer en Algérie, un autre projet de distribution des dérivés du pétrole, en association entre la société Naftal et la compagnie Qatarie du pétrole pour la réalisation de 30 pompes à essence au long de l’autoroute Est-ouest dont la réalisation a fait couler beaucoup d’encre sur les commissions rétrocédées et l’absence de traçabilité de financements détournés. Dans un tout autre domaine, Le Qatar a proposé au gouvernement algérien de booster le nombre de vols entre Alger et Doha de 7 à 14 vols par semaines. Un vrai « bazar »!

Si Doha tisse sa toile d’araignée en Algérie dans des secteurs stratégiques, de souveraineté économique nationale, Dubaï met les bouchées doubles en Afrique: exploitation du terminal à conteneurs du port de Dakar, ouverture d’une desserte Dubaï-Dakar sur la route de l’Amérique du sud, financements divers dans l’immobilier, avec les saoudiens du groupe Ben Laden pour l’aéroport de Dakar, construction de deux tours, celle du Musée des civilisations noires et, surtout, celle du nouvel aéroport international Blaise Diagne.

Les émiratis ne perdent pas patience d’arriver à arracher l’exploitation du terminal du port d’Alger alors que l’exploitation du port de Djendjen (Jijel), est un projet un mort né à l’est du pays, C’est pourtant le président Boutéflika, ancien conseiller et homme de confiance des Emirats arabes unis, qui a privilégié le gré à gré. Au détriment de nombreux concurrents nationaux et internationaux occidentaux, intéressés par le terminal le plus prometteur de la rive sud méditerranéenne. Mais les négociations entamées entre émiratis et algériens, ont butté sur plusieurs écueils non prévus par Bouteflika. Le plus gros investissement émirati, un complexe d’aluminium à Béni Saf sur la côte oranaise, pèse pas moins de cinq milliards de dollars. La visite d’Etat d’Abdelaziz Bouteflika à Doha, fin avril 2008 et celle du prince du Qatar, Cheikh Hamed Benkhalifa al Thani à Alger étaient le prélude à cette pluie de marchés obtenue par Doha d’ Alger d’une chiquenaude.

La chaîne de télévision qatarie, Al Djazzera, que dirige le Prince en personne, hôte de Bouteflika, a suscité, à cette époque l’ire d’Alger pour ses sympathies avec les chefs islamistes du FIS. Abdelaziz Bouteflika, oeuvrant alors à une concorde nationale élargie en impunité totale et sans condition en faveur des maquis terroristes, a saisi l’opportunité que lui offre les pays du Golfe pour distiller le venin islamiste dans une multitude disparate de projets économiques promis par Doubaï et Doha.

La toile d’araignée que tisse Doha dans plusieurs secteurs économiques est intervenue dans la contexte des Révolutions arabes qu’elles a financées dans le seul but d’imposer les leaders des partis islamistes au pouvoir dans ces pays. En offrant un exil doré à Abassi Madani, le Qatar entend mener l’Algérie avec Bouteflika, via ses promesses d’investissements, vers un modèle d’état théocratique de manière incolore et inodore, en instaurant la chari’ sous le couvert de ses investissements « bazaristes » sous la bénédiction intéressée de Bouteflika. Principal fournisseur et « souteneur » d’Al Qaïda au Maghreb islamique, la main de Doha sur le « choix diplomatique d’Alger » sur la crise malienne, n’est pas étrangère. D’ailleurs, la dernière visite du ministre algérien des Affaires étrangères à Doha s’inscrit dans cette volonté de recherche d’une politique « négociée » avec « toutes les parties » de la crise malienne. Le convoi « humanitaire » algérien signalé hier, en route vers les villes du Nord du Mali, si ce n’es pas une initiative de Doha, cette action illustre parfaitement le jeu trouble du Qatar que semble avoir adopté Alger par son attitude plus qu’attentiste face aux Révolutions arabes, aux massacres de populations civiles syriennes et à l’occupation du Nord du Mali par Al Qaïda au Maghreb islamique.

R. N