L’Algérie perd l’une de ses figures intellectuelles les plus inspirantes. Djouher Amhis-Ouksel, éminente pédagogue, essayiste et poétesse, est décédée ce jeudi à l’âge de 97 ans, laissant derrière elle un legs intellectuel exceptionnel.
Djouher Amhis-Ouksel, née en 1928 à Ath Yenni en Kabylie, fut plus qu’une éducatrice : elle incarna l’élan culturel et humaniste d’un pays en pleine reconstruction après la colonisation. Dès les années 1940, elle s’impose dans le domaine de l’enseignement, à une époque où les femmes accédaient difficilement aux responsabilités publiques.
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Une pionnière de l’éducation nationale
Admise à l’école normale de Miliana en 1945, elle devient institutrice à Thénia, puis professeur de lettres au lycée de Médéa. Sa rigueur, sa pédagogie et son amour pour la langue ont marqué plusieurs générations d’élèves.

En 1968, elle est nommée inspectrice de l’éducation nationale, un poste stratégique à un moment clé pour la construction du système éducatif algérien.
Mais loin de s’enfermer dans la bureaucratie, elle choisira quelques années plus tard de retourner à l’enseignement, fidèle à sa passion pour la transmission directe du savoir.
Une œuvre littéraire au service de la mémoire collective
Sa retraite en 1983 ne marqua pas la fin de son engagement, mais le début d’une intense activité littéraire. Elle publiera une série d’essais éclairants sur de grandes figures de la littérature algérienne : Feraoun, Mammeri, Dib, Amrouche, Djaout, Benhadouga, Mimouni, Djebar…
Sa plume, à la fois rigoureuse et poétique, servait un objectif clair : rendre la littérature algérienne accessible, vivante, ancrée dans la mémoire collective. Elle signa également des recueils poétiques, où l’émotion se mêlait à la profondeur du regard.
Parmi ses ouvrages majeurs :
Le Chant de la sitelle (2012)
Assia Djebar, une figure de l’aube (2016)
Taâssast. Une lecture de “La Colline oubliée” de Mouloud Mammeri (2011)
Tahar Djaout, ce tisseur de lumière (2013)
Une reconnaissance à la hauteur de son parcours
Son œuvre a été saluée à plusieurs reprises. En 2012, elle reçoit le Prix Mahfoud-Boucebci pour l’ensemble de sa carrière littéraire. L’année suivante, elle est distinguée par la Fondation Nedjma, aux côtés d’autres grandes voix féminines de la littérature algérienne.
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Djouher Amhis-Ouksel aura consacré sa vie à éduquer, éveiller et transmettre. En disparaissant, elle laisse une empreinte indélébile dans l’histoire de l’Algérie moderne. Son engagement en faveur de la culture, de la langue et de la jeunesse résonne encore aujourd’hui, à l’heure où le pays cherche à réconcilier son passé avec ses aspirations futures.
Qu’elle repose en paix.