Accroché à la fin du match face à la RCA, l’attaquant vedette de l’Olympiacos Le Pirée et de l’EN, Rafik Djebbour, toujours aussi disponible envers les médias algériens, s’est longuement attardé avec nous sur cette victoire acquise par les Verts et, surtout, sur le plus qu’a apporté Vahid Halilhodzic à l’équipe, notamment au niveau du jeu offensif.
Décontracté et optimiste en l’avenir de l’EN, Djebbour assure que les supporters verront un visage plus séduisant de la sélection prochainement et que les attaquants pourront enfin se lâcher. Entretien !
Une victoire nette et sans bavure que celle acquise ce soir face à cette formation de la Centrafrique (entretien réalisé à l’issue du match). Un commentaire ?
Oui, ça a été une victoire méritée. Je pense que l’équipe commence à bien assimiler le schéma du coach. On a travaillé durant toute la semaine sur ce dispositif tactique et Dieu merci, on l’a bien appliqué sur le terrain lors de ce match. On savait tous que ce qui manquait à l’EN, c’était la cohésion tactique. On a des joueurs qui ont des qualités, mais la cohésion tactique faisait défaut par le passé. Le nouveau coach travaille énormément ce volet. Cela dit, ce n’est que le début, il ne faut pas s’enflammer aussi. On a joué face à la République centrafricaine, une équipe qui normalement aurait dû se classer derrière nous dans ce groupe. Reste cependant que la belle prestation fournie ce soir augure d’un avenir prometteur.
Ce soir, on a senti une Equipe nationale complètement libérée dans son jeu. Est-ce dû au fait qu’il n’y avait pas de pression sur les épaules des joueurs étant donné qu’on n’était pas concernés par la qualif’ ou bien au discours d’Halilhodzic qui a donné un nouvel élan à cette équipe ?
Je dois dire qu’on monte crescendo. On a un entraîneur qui sait comment utiliser ses joueurs. On travaille dur à l’entraînement, surtout le volet tactique. Aujourd’hui, on a tous les moyens de se donner comme objectif de viser beaucoup plus haut. Cependant, il faut y aller étape par étape. Ce soir, on a joué libérés et on sentait les joueurs relâchés, car tout simplement, on voulait montrer au peuple algérien qu’on reste toujours une grosse équipe, malgré la gifle qu’on a reçue (Ndlr, face au Maroc). On sait très bien qu’on a fait honte à notre peuple, et c’est pour cette raison qu’on avait à cœur de redorer notre blason et se réconcilier avec nos fans.
En tant qu’attaquant, vous avez longtemps décrié le dispositif tactique mise en place en sélection ces dernières années. Vous étiez souvent esseulé en pointe et cela vous perturbait. Avec l’arrivée d’Halilhodzic, qui est connu pour favoriser le jeu offensif, peut-on dire que c’est une nouvelle ère qui commence pour vous et vos coéquipiers de l’attaque ?
Y a pas photo ! Cette semaine, on a discuté ensemble nous les attaquants et on a été tous d’accord pour dire que notre temps est enfin venu. Je peux vous promettre qu’il va y avoir beaucoup de buts à l’avenir. Que ce soit nous les attaquants, les milieux de terrain ou bien les défenseurs, on aura tous l’opportunité de marquer et ça, c’est un avantage considérable. En si peu de temps, Halilhodzic a su inculquer aux joueurs cette mentalité d’aller vers l’avant et cela nous permettra certainement de marquer davantage de buts que par le passé. Je ne dis pas qu’on marquera dans tous les matchs, mais on aura cette habitude de se trouver devant les bois adverses plus souvent et se créer plusieurs occasions de buts. Cela nous aidera à enflammer notre public et prendre un acquis considérable.
Vous concernant, vous ne vous êtes pas entraîné régulièrement avec le reste du groupe la semaine précédent ce match. On ne savait pas si vous étiez blessé ou bien était-ce juste un coup de fatigue ?
Au fait, j’ai terminé mon match dimanche soir et j’ai pris l’avion le lendemain tôt dans la matinée pour arriver à temps à Alger. Je n’avais pas récupéré de ce match de championnat. N’oubliez pas que j’avais joué trois rencontres intenses en une semaine seulement. Il est normal que je ressente des douleurs. Le coach n’est pas quelqu’un de stupide. Il a su me gérer. Il comprend parfaitement que les joueurs peuvent subir des coups de fatigue durant la saison. J’étais vraiment carbonisé et Dieu merci, le sélectionneur a été plus que compréhensif avec moi.
A ce propos, Halilhodzic n’a pas tari d’éloges sur vous, notamment dans la presse grecque en mettant en évidence votre grand talent de buteur. On imagine que cela vous fait plaisir et vous réconforte, non ?
Ah, oui, ça fait plaisir, d’autant que tout le monde sait qu’Halilhodzic a été un grand attaquant. Le connaissant, je sais que son jugement est sincère et c’est qui me rend encore plus fier. Il n’y a pas si longtemps, certains se sont permis de juger sévèrement et assez gratuitement les attaquants. On était un peu les victimes de ces pseudo-amateurs. Leurs critiques n’étaient pas du tout justifiées, puisqu’il n’y avait pas de fond de jeu. Tactiquement, les attaquants ont beaucoup souffert. Aujourd’hui, je dois dire simplement qu’on est en train d’entamer une nouvelle ère, avec un entraîneur connu pour être un adepte du jeu offensif et cela va à coup sûr permettre aux attaquants de s’illustrer.
Vous dites que certains pseudo- amateurs vous ont sévèrement critiqué. Qui sont visés là ?
Un peu tout le monde. Je ne parle pas de mon cas uniquement. Il y a aussi Ghezzal et Matmour qui ont trop souvent été décriés par tout le monde. Comme je l’ai toujours dit, pour faire jugement objectif, il faut prendre en compte une certaine période, une série de rencontres et, surtout, les occasions qui se sont offertes dans un match. Si un attaquant n’a qu’une seule occasion durant le match et qu’il ne la met pas dedans, il ne faut pas se demander pourquoi il ne marque pas. Trouvez-moi un attaquant au monde qui a 100% de réussite !
En parlant de Ghezzal, ce soir, on a vu qu’il a manqué de réussite. Comment expliquez-vous le fait qu’il n’ait pas marqué, en dépit des nombreuses occasions que s’est créées l’EN durant ce match ?
Vous savez, Kader est quelqu’un de généreux qui se sacrifie beaucoup pour l’équipe. En Algérie, on a du mal à analyser tactiquement les matchs. On pense toujours que l’attaquant ne doit marquer que des buts, faire des petits ponts et des passements de jambes. Non, ce n’est pas ça. Si vous avez bien vu le match, vous aurez certainement vu que Kader a beaucoup écarté le jeu en créant des espaces à ses coéquipiers de l’attaque. Il est souvent allé au combat aussi et cela, il faut le noter.
Le public l’a justement beaucoup applaudi malgré son manque d’efficacité…
C’est bien que le public l’ait soutenu. Cela l’a poussé à fournir encore plus d’efforts et à se surpasser. Il faut que les gens comprennent que le football a changé. Le football d’aujourd’hui, ce n’est pas forcément les attaquants qui doivent marquer, c’est tout un ensemble. Même sans marquer, l’attaquant peut faire un grand match, avec notamment ses appels de balles, la créativité qu’il peut apporter dans le jeu et les espaces qu’il peut créer à ses partenaires. Et tout cela, c’est à vous les journalistes et autres spécialistes du football de le mentionner pour le grand public.
Aujourd’hui, on vous sent confiant en l’avenir de la sélection, même si ça s’est terminé par une amère élimination…
Je pense qu’après la défaite concédée à Marrakech, personne ne voulait parler football. Perdre contre le Maroc, dans un match derby que tout le monde attendait, c’était vraiment dur. Moi, personnellement, je l’ai très mal vécu. Cette déconvenue nous a fait très mal. Aujourd’hui, on a un nouvel entraîneur, un nouveau schéma tactique et de nouvelles ambitions. C’est vrai qu’on n’avait pas une pelouse à la hauteur, ce soir, c’est dommage, mais je reste ambitieux. Le discours qu’on a tenu entre nous et avec le sélectionneur aura été positif et c’est pour cela que je vous ai dit tout à l’heure qu’il va y avoir des buts et du beau jeu à l’avenir. Avec Halilhodzic, on a acquis une nouvelle mentalité.
Vous promettez donc aux supporters algériens que lors des deux prochains matchs amicaux face à la Tunisie et au Cameroun, on verra une bien meilleure EN ?
Ce que je peux vous dire, c’est que l’équipe évolue et on continuera à travailler. L’entraîneur est quelqu’un de perfectionniste, donc il voudra toujours aller de l’avant. La Tunisie et le Cameroun vont être deux bons tests pour nous, mais ça reste néanmoins que des matchs amicaux. On ne veut pas être des champions de matchs amicaux. Nous, on veut être champions pour aller à la Coupe du monde et à la CAN.
Le stade du 5-Juillet était presque vide ce soir. C’est un peu triste lorsqu’on se rappelle tout l’engouement qu’a créé l’EN il n’y a pas longtemps…
C’est normal, on ne peut pas en vouloir à nos supporters. Après avoir perdu 4-0 au Maroc, on ne va quand même pas nous dérouler le tapis rouge. Les données ont changé. Ce soir, je dois dire qu’on a été à la hauteur des espérances des supporters qui se sont déplacés au stade pour nous voir.
