Djamel Benabdeslam,«Bouteflika a institué le régime personnel»

Djamel Benabdeslam,«Bouteflika a institué le régime personnel»

bouteflika.jpgLe président du Front de l’Algérie nouvelle (FAN), Djamel Benabdeslam, a troqué son propos habituellement tempéré contre une diatribe sans indulgence contre le chef de l’Etat et le système politique algérien qui, à ses yeux, ont échoué sur toute la ligne. Néanmoins, et incompréhensiblement, il ne s’est pas rendu à la conclusion logique de ce que Bouteflika ne devra briguer un quatrième mandat.

Le réquisitoire fut long, de près d’une heure et demie, hier au siège du parti où la presse avait été conviée à entendre Benabdeslam dresser, sans complaisance, le bilan des trois années de magistrature de Bouteflika. Benabdeslam a estimé que cette escale d’évaluation de l’action présidentielle doit primer sur les déterminations, en cours, par rapport au 4e mandat et au projet de révision de la Constitution. «Aucun président de l’Algérie indépendante n’a eu à exercer dans d’aussi favorables conditions que celles auxquelles a eu droit le président Bouteflika.

Malgré cela, il a manqué de faire transiter l’Algérie vers la démocratie et la placer sur le rail du développement», a-t-il affirmé, avant de procéder à l’énumération des échecs de la gouvernance de Bouteflika. Faisant remarquer que le chef de l’Etat a trituré la Constitution à trois reprises, en 2002, 2008 et celle projetée, Benabdeslam dira de Bouteflika que c’est un président qui a institué «le régime personnel». Car, pour le président du FAN, la révision constitutionnelle de novembre 2008 a touché fondamentalement aux équilibres du pouvoir, tant elle a remis en cause la séparation des pouvoirs, avec un parlement de façade et une équipe technique faisant office de gouvernement. «Le régime institué dès lors n’est ni présidentiel, ni semi-présidentiel, ni royal, encore moins parlementaire. C’est le régime personnel.» Pour le conférencier, cet état des choses a induit la paralysie institutionnelle.

«Il n’y a plus aucune initiative. C’est le stand-by. Le Conseil des ministres ne s’est pas réuni depuis 5 mois.» Sur le plan politique, Benabdeslam a considéré que Bouteflika a, dès son premier mandat, entrepris de fermer le champ de l’activité partisane et lorsqu’il a laissé son ouverture en 2011, c’est sous la crainte de la contamination des révoltes dans les pays arabes. «Bouteflika a fermé la scène politique dès 1999. L’ouverture de 2011 n’est pas une ouverture mais une pollution, suivie de pourrissement avec la fraude qui a marqué les deux dernières élections.» Poursuivant, Benabdeslam a dénoncé la répression systématique à l’encontre des syndicats et associations, érigée en mode de gouvernance. «La régionalisation a atteint des proportions dangereuses.

La société est menacée d’émiettement», a-t-il averti, affirmant que «la Kabylie, pour l’exemple, a subi une punition collective après les événements de 2001. C’est la politique de la terre brûlée. Le Sud a subi la marginalisation de plein fouet». Le président du FAN a mis en exergue le désastre économique, en dépit des sommes faramineuses injectées. «Avec 280 milliards de dollars, d’autres auraient réussi la relance économique de tout le continent africain. En 15 ans, les exportations hors hydrocarbures sont restées au même niveau, 3%, la croissance stagne.» Viennent ensuite les scandales de la dilapidation des deniers publics. «Le scandale est dans le programme de soutien à l’agriculture. Il est plus grand que celui de la Sonatrach», a-t-il asséné. Politique étrangère ? «C’est la politique de l’autruche. L’Algérie n’a fait aucun choix profitable.» Que faire ? Il s’agit, pour Benabdeslam, de reformuler le choix stratégique national.

S. A. I.