Dix ans après 11, Septembre : le revers de la médaille

Dix ans après 11, Septembre : le revers de la médaille
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Le souvenir des attentats du 11 Septembre nous renvoie à nos propres souvenirs. Comment, en effet, oublier ce que nous étions et ce que nous sommes devenus ? Ne pas oublier, ne rien oublier, car il n’y a pas pire, dans la lutte contre l’hydre barbare, que de succomber à l’amnésie ou faire semblant de ne pas se rappeler.

Comment, en effet, oublier ce qu’était l’Algérie avant le 11 Septembre 2001 ? Un pays seul, soumis à l’embargo, qui combattait avec des moyens dérisoires un terrorisme que personne ne voulait voir. Les uns étaient complaisants et offraient gîte aux “émirs” terroristes pensant que ça allait leur garantir la paix, d’autres laissaient faire des groupes de soutien qui organisaient des quêtes devant les mosquées pour “le jihad” en Algérie et d’autres encore autorisaient des publications qui revendiquaient les atrocités commises en Algérie. Comment oublier que, pendant que le peuple algérien menait un combat pour sa survie, des voix s’élevaient en Occident pour se demander “qui tue qui en Algérie ?”.

Le devoir de mémoire

Quand les habitants des hameaux isolés se faisaient égorger par centaines, sans raison aucune, sauf la soif du sang, des Zouabri et consorts, quand les intellectuels et les journalistes n’avaient d’autre choix que “la valise ou le cercueil” et quand les cimetières étaient le lieu le plus visité du pays, on comptait sur les doigts d’une seule main les pays “frères et amis”.

Comment oublier que certains “opposants” réclamaient des enquêtes internationales et des condamnations contre l’État algérien et demandaient haut et fort que l’on affame le peuple algérien et qu’on l’isole davantage ?

Pour ces raisons, et bien d’autres, le 11 Septembre 2001 est venu délivrer l’Algérie de son isolement, de l’incompréhension, de l’hypocrisie et de la complaisance du monde entier. Depuis cette date, l’Algérie ne se sent plus seule et son combat est reconnu de par la planète. Depuis cette date, l’on n’ose plus trouver de justifications aux groupes terroristes et depuis cette date, le monde entier s’est mis en rang de bataille, derrière les USA, pour combattre le terrorisme, ou, du moins, faire semblant.

Depuis cette date, le monde entier a compris que le terrorisme pouvait frapper n’importe où, n’importe quand et que la toile d’araignée tissée depuis la fameuse guerre d’Afghanistan couvrait le monde entier à tel point qu’aucun pays au monde, avec toute la force militaire qui soit, ne peut venir à bout, seul, de cette hydre barbare.

La prise de conscience mondiale quant aux dangers du terrorisme a été, certes bénéfique à l’Algérie, dans la mesure où la communauté internationale a fini par ne plus accorder les mêmes largesses aux terroristes et à leurs sponsors. Les groupuscules terrés en Occident sont traqués, leurs sources de financement taries et leurs capacités de se mouvoir extrêmement limitées.

La prise de conscience

L’Algérie pouvait, enfin, disposer de matériel et de formation qui lui faisaient cruellement défaut durant la décennie précédente. Sa voix était entendue partout et son expérience en matière de lutte antiterroriste était reconnue et demandée partout.

Cependant, il y a le revers de la médaille. Le 11 Septembre n’a pas été seulement bénéfique pour l’Algérie. Dans certains cas, il a compliqué davantage sa tâche dans sa lutte contre le terrorisme et a retardé sa délivrance.

En 2001, pour ceux qui ont oublié, le GIA était déjà mort, l’AIS avait déposé les armes et le GSPC était un groupe insignifiant confiné à l’est d’Alger, sans aucune consistance. Les attentats du 11 Septembre, qui ont mis Al-Qaïda aux devants de la scène internationale, allaient donner au GSPC un second souffle. L’internationale terroriste cherchait, depuis le GIA, de se frayer un chemin en Algérie, comptant sur les anciens “Afghans Algériens”. Elle aura attendu jusqu’en 2006 pour voir, enfin, son rêve se réaliser, avec l’arrivée de Droukdel à la tête du GSPC.

Ce dernier avait compris qu’une allégeance à Al-Qaïda allait lui donner une envergure internationale, d’autant plus qu’à cette époque, Al-Qaïda faisait parler d’elle en Irak et en Afghanistan. Et c’est là que les ennuis ont commencé pour les forces de sécurité, qui voyaient venir des candidats au jihad des pays voisins.

L’avènement d’Internet et des chaînes satellitaires porte-voix des groupes terroristes allait offrir à la nébuleuse terroriste une occasion inespérée pour faire dans la propagande à outrance. Les attentats kamikazes, jusque-là “marque de fabrique” des jihadistes irakiens, font leur apparition en Algérie. Pour le GSPC, il suffisait de commettre, de temps à autre, un coup d’éclat médiatique, pour mettre à mal tout le dispositif sécuritaire et faire croire que l’organisation terroriste est omniprésente et que ses capacités de nuisance restent intactes.

Les invités-surprises,

le GSPC et Al-Qaïda Maghreb

La dimension régionale prise par le GSPC a rendu la lutte contre le terrorisme beaucoup plus compliquée, notamment depuis que la nébuleuse terroriste a pris pied dans le Sahara. El-Para, le premier à avoir réalisé un kidnapping fortement médiatique de touristes occidentaux, allait ouvrir une nouvelle page dans la donne terroriste. En effet, depuis cet enlèvement, le GSPC privilégie la piste des kidnappings des étrangers, essentiellement ceux des pays qui continuent à payer les rançons, pour financer l’achat d’armement au profit des groupes terroristes.

En dépit d’une condamnation internationale, notamment de la part des Américains et des Britanniques, et une résolution tardive du Conseil de sécurité de l’ONU interdisant le paiement des rançons, certains pays occidentaux, pour des raisons électoralistes, continuent à faire le jeu des groupes terroristes, à l’image de la France.

Le GSPC a élu domicile dans le Sahel, particulièrement au nord du Mali et en Mauritanie, où il a noué des connexions avec les réseaux traditionnels de trafic d’armes et de drogue. Le combat devient, alors, extrêmement difficile, sachant les limites des capacités de riposte, et parfois la volonté politique, de certains pays de la région, mais aussi des interférences de certains pays qui continuent à réfléchir en termes de “pré-carré”. Il aura fallu un temps fou pour convaincre les pays de la région de travailler ensemble contre l’ennemi commun et d’éviter à ce que la région ne se transforme en un terrain de chasse pour les forces étrangères.

Ce qui se passe, actuellement, en Libye, et les risques de voir les armes tomber entre les mains des groupes terroristes, conforte les mises en garde émises par l’Algérie. La récente conférence tenue à Alger sur le Sahel a donné raison à Alger, dans la mesure où la menace libyenne inquiète tout le voisinage, mais aussi les partenaires occidentaux. Mais, au-delà du conflit libyen, qui est appelé, un jour ou l’autre, à connaître son épilogue, force est de constater que l’internationalisation de l’action du GSPC place l’Algérie dans une nouvelle posture, l’obligeant à aller chercher, à chaque fois, des partenariats, souvent difficiles à conclure, en tout cas, qui nécessitent du temps et beaucoup de persévérance.