Le “grand emprunt national” que compte lancer l’Algérie en avril ne risque-t-il pas d’induire un effet d’éviction des autres opérateurs économiques privés ou publics, en asséchant l’épargne nationale disponible ?
Le recours au marché obligataire connaîtrait probablement un dynamisme plus accru durant les mois à venir compte tenu des nouvelles orientations des pouvoirs publics, relatives à la diversification du financement de l’économie en substituant les ressources budgétaires par les ressources du marché, estime la Commission d’organisation et de surveillance des opérations boursières (Cosob), dans son rapport annuel 2015. “À ce titre, il convient de signaler le retour dans un proche avenir du groupe Sonelgaz sur ce marché, comme il ressort de l’avancement des travaux préparatoires liés au montage d’opérations initiées par l’émetteur et qui ont fait l’objet de discussions lors des réunions tenues au siège de la Cosob”, souligne le rapport.
L’année dernière, la Commission a délivré deux visas sur deux emprunts obligataires réalisés respectivement par la société Maghreb Leasing Algérie (MLA) et la Société nationale de Leasing (SNL). Maghreb Leasing Algérie a émis, à fin mars 2015, son premier emprunt obligataire institutionnel de deux milliards de dinars sur une période de cinq ans avec un taux d’intérêt progressif et un amortissement annuel de 20%. Cette opération a porté sur 200 000 obligations d’une valeur nominale de 10 000 DA chacune. “Le taux d’intérêt annuel de cet emprunt a été fixé à 2,5% pour la première année de la souscription avant d’augmenter progressivement à 2,75% en 2016, à 3,25% en 2017, à 4% en 2018 et à 5% en 2019. L’emprunt a été réalisé avec la garantie de la Cnep-Banque et du CPA”, rappelle la Cosob.
La Société nationale de Leasing a fait son entrée pour la première fois sur le marché obligataire, et ce, à travers son émission obligataire de deux milliards de dinars réalisée le 6 octobre 2015. L’emprunt est garanti par des cautions émises par la BNA et la BDL. La seule obligation cotée à la Bourse d’Alger, le titre Dahli, est à échéance en janvier dernier.
La Cosob indique que sur le marché obligataire institutionnel (hors Bourse), il reste trois emprunts obligataires : deux emprunts de Sonelgaz, aux échéances 2016 et 2017, et l’emprunt Fonds national d’investissement (FNI) dont l’échéance est prévue en 2024.
L’ancien ministre des Finances, dans son livre Algérie, sortir de la crise, a souligné le dynamisme du marché obligataire de la place d’Alger entre 2003 et 2010. À la fin de 2005, écrit le professeur Abdelatif Benachenhou, “l’Algérie aurait eu un marché de l’ordre de 167 milliards de dinars, soit 2,3 milliards de dollars qui venaient s’ajouter aux 10 milliards de dollars de titres publics en circulation”. Mais en Algérie, a ajouté l’ancien ministre des Finances, “la politique et la tendance à la facilité l’ont emporté plongeant le marché obligataire dans le coma dans lequel il demeure encore”.
Les conditions macroéconomiques sont, aujourd’hui, plus favorables à la relance du marché financier algérien, notamment dans son compartiment obligataire.
Cependant, “le grand emprunt national” que compte lancer l’Algérie en avril, ne risque-t-il pas d’induire un effet d’éviction des autres opérateurs économiques privés ou publics, en asséchant l’épargne nationale disponible ?
Meziane Rabhi