Discours du président des États-Unis en Éthiopie à propos de la présidence à vie en Afrique, À qui Barack Obama s’est-il adressé ?

Discours du président des États-Unis en Éthiopie à propos de la présidence à vie en Afrique,  À qui Barack Obama s’est-il adressé ?

L’Afrique, le continent qui concentre le plus de chefs d’État aux longs règnes, à vie pour certains, a été “égratigné”, encore une fois, par le président des États-Unis, Barack Obama, dans son discours au siège de l’Union africaine à Addis-Abeba, en Éthiopie.

Ce discours, fruit d’un constat de l’un des plus jeunes présidents qu’a connus la Maison-Blanche, démontre à quel point les choses n’ont pas tellement changé sur le plan politique dans ce continent depuis ses deux passages “historiques” au Caire et à Accra en 2009, pour ne pas dire qu’elles ont empiré dans certains cas. À quelques différences près, les propos tranchants du chef de l’État américain ont été quasiment les mêmes. “Je ne comprends pas pourquoi certains veulent rester si longtemps au pouvoir. Surtout quand ils ont beaucoup d’argent”, a déclaré Obama. “Les progrès démocratiques en Afrique sont en danger quand des dirigeants refusent de quitter le pouvoir à l’issue de leur mandat”, a-t-il ajouté inquiet. “La loi est la loi, et personne n’est au-dessus, pas même les présidents, (…) personne ne devrait être président à vie”, a-t-il encore déclaré à



Addis-Abeba. En juin 2009, devant les étudiants de l’Université du Caire, Barack Obama avait estimé qu’“il faut conserver le pouvoir par le consentement du peuple et non la coercition”, ajoutant qu’“il faut (aussi) respecter les droits des minorités et participer, dans un esprit de tolérance et de compromis”.

À qui ces mots, crus et sans ménagement, sont-ils adressés ? La liste des chefs d’État africains qui s’accrochent au pouvoir n’est pas difficile à établir, à commencer par le plus vieux d’entre eux, le président du Zimbabwe, Robert Mugabe, qui cumule aussi le poste de président de l’Union africaine. Son homologue burundais, Pierre Nkurunziza, qui vient d’être réélu pour un troisième mandat, le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, qui veut modifier la Constitution pour un troisième mandat, Paul Kagamé du Rwanda, qui s’est appuyé sur un Parlement acquis d’avance pour briguer un troisième quinquennat, sont directement concernés par la critique virulente d’Obama. L’Algérie et son président Abdelaziz Bouteflika, dont l’état de santé n’est pas pour lui permettre de diriger le pays, est-elle également concernée par les critiques du locataire de la Maison-Blanche ? Nul doute, même si Barack Obama s’est interdit de citer des noms. Mais faudrait peut-être rappeler, pour en être certain, qu’aucun message de félicitations n’a été adressé par le président américain, lors de la réélection d’Abdelaziz Bouteflika en avril 2014.

Le quatrième mandat de Bouteflika n’aurait pas été possible sans le recours à une révision de la Constitution, qualifiée de “viol institutionnel” par l’opposition et aucunement appréciée par une partie de la communauté internationale. Même si la visite du secrétaire d’État américain, John Kerry, au milieu de la campagne électorale, a été perçue comme une caution de Washington à la candidature de Bouteflika, le silence observé par la Maison-Blanche au lendemain de la publication des résultats du vote a été considéré comme un véritable désaveu des Américains face à ce coup de force du régime algérien. “L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes institutions”, avait déjà dit Obama devant les députés ghanéens en 2009. De retour sur la terre de ses ancêtres, à un an de la fin de son deuxième (et dernier) mandat, les chances d’assister à un renouveau politique en Afrique sont plus que

minimes.

L. M.