Devises : les affaires marchent bien !

Devises : les affaires marchent bien !

Les récentes arrestations dans le milieu du trafic de devises étrangères et les déclarations des responsables des services de sécurité n’ont eu aucun effet sur le cours de l’euro. Au square Port-Saïd, les revendeurs continuent d’agiter des liasses de billets pour attirer les clients.

Tarek Hafid – Alger (Le Soir) – Le démantèlement d’un réseau de trafiquants de devises étrangères dans le quartier de Hydra n’a eu aucun effet sur le cours de l’euro. Une réalité facilement vérifiable au square Port- Saïd, véritable institution financière à ciel ouvert. Il suffit de demander aux nombreux «cambistes» présents sur place pour avoir la cotation du jour.

«L’euro est à 12, 80 à l’achat et 12,95 à la vente. Tu as besoin de combien ? Je peux te faire un prix si tu prends une grosse somme», indique un revendeur rencontré à la terrasse du café des Sétifiens, ex-Le Terminus. Selon lui, la monnaie européenne a connu une légère hausse à l’occasion du pèlerinage à La Mecque. Rien de plus. Le jeune homme, visiblement gêné par les questions, refusera de trop commenter l’affaire de Hydra. «Règlement de comptes», lâche-t-il avant de se diriger vers un client plus intéressant.

A vrai dire, même les récentes déclarations des responsables des services de sécurité n’ont eu aucune conséquence sur ce «business ». Jeudi dernier, le commandant du groupement de gendarmerie d’Alger annonçait la stricte application de la loi en matière de trafic de devises. La veille, un commerçant d’El Harrach en avait fait les frais. Mais au square Port-Saïd, les revendeurs de devises continuent d’agiter ostensiblement des liasses de billets de banque. Pourtant, les forces de l’ordre quadrillent en permanence le quartier. Ruelles, trottoirs, cafés, fast-foods, magasins… cambistes et policiers partagent les mêmes espaces. Au même titre que les magistrats du tribunal d’Alger, dont le siège se situe à quelques mètres. La police et la justice ne représentent donc aucune menace. Pas de risque de se voir appliquer les dispositions de la loi relative aux infractions à la législation des changes et des mouvements des capitaux. En fait, les dernières arrestations au square Port- Saïd datent de 2007. A l’époque, la Sûreté nationale lançait une campagne qui avait abouti à l’arrestation d’une trentaine d’individus. Les sommes saisies étaient estimées, toutes monnaies confondues, à près de 25 000 euros.

Une futilité au vu des fonds qui s’échangent quotidiennement dans ce quartier du centre de la capitale. Depuis, plus rien. Les pouvoirs publics sont dans l’incapacité de mettre un terme à l’impunité. Concrètement, qui a intérêt à ce que le marché de la devise étrangère soit le monopole de quelques barons à la tête de véritables empires financiers ? En attendant que les pouvoirs publics fassent preuve d’une réelle volonté politique, les «affaires» continueront de marcher au square Port- Saïd.

T. H.