La menace d’une attaque américaine contre la Syrie est-elle écartée à la lumière des derniers développements ? Les déclarations tenues, samedi soir, par le président Obama jettent un doute sur l’imminence de cette intervention de plus en plus rejetée par la communauté internationale étant donné ses conséquences sur la région du Moyen-Orient voire sur le monde.
Le chef d’Etat américain a soumis, samedi soir, au Congrès une résolution ad hoc qui devrait être votée par la Chambre des représentants et le Sénat le 9 septembre au plus tôt sur «un projet de résolution visant à autoriser l’usage de la force pour empêcher et dissuader de futures utilisations d’armes chimiques en Syrie».
Les auditions parlementaires au Sénat américain sur le projet d’autorisation de l’usage de la force en Syrie débuteront la semaine prochaine, a annoncé pour sa part le chef de la majorité démocrate, qui a promis un vote la semaine du 9 septembre.
«Le Sénat va s’engager immédiatement dans ce débat crucial, avec des auditions publiques et des réunions d’information pour les sénateurs la semaine prochaine», a déclaré dans un communiqué Harry Reid, chef des démocrates du Sénat. Les auditions seront organisées par la commission des Affaires étrangères de la chambre haute du Congrès, et de hauts responsables de l’administration y participeront.
«Le Sénat votera la résolution durant la semaine du 9 septembre, au plus tard, comme l’a demandé l’administration Obama», s’est engagé M. Reid. Le recours au Congrès est presque une première aux Etats-Unis d’Amérique depuis la Seconde guerre mondiale. Pour certaines parties, il n’est pas certain que le Congrès donne son accord pour une telle intervention, rejetée par la communauté internationale et qui risque de déstabiliser l’ordre mondial, d’autant plus qu’elle n’est pas autorisée par le Conseil de sécurité de l’ONU.
De nombreux parlementaires américains restant à convaincre sur le bien fondé de cette intervention militaire, y compris au sein du parti démocrate.
Le président américain Barack Obama, lauréat du prix Nobel de la Paix, va-t-il prendre cette décision d’attaquer la Syrie ? Pour le moment, les voix appelant le président Obama à la raison et au rejet de la guerre ne cesse de prendre de l’ampleur à l’échelle mondiale.
On peut citer la droite française qui s’est démarquée samedi soir du président François Hollande sur la crise syrienne, en mettant en garde «le président socialiste contre toute décision hâtive d’intervenir militairement aux côtés des Américains».
L’ex-Premier ministre François Fillon et le président de l’UMP Jean-François Copé ont tiré la sonnette d’alarme devant les risques d’une action militaire contre la Syrie. M. Copé a demandé au président français d’«attendre les conclusions des inspecteurs de l’ONU» avant de passer à l’action militaire. «Le syndrome irakien est présent dans tous les esprits», a fait valoir le numéro un de l’UMP. Le Front national et le
Mouvement démocrate, deux importants partis français, ont également rejeté le recours à la guerre. Les partis français plaident pour une issue politique du conflit afin d’éviter la perte d’autres vies humaines.
La haute autorité religieuse El Azhar du Caire s’est déclarée également hier contre toute éventuelle action militaire en Syrie, y voyant une «agression contre la nation arabe et islamique». Dans un communiqué, Al Azhar «exprime son rejet catégorique et sa condamnation de la décision du président américain (Barack Obama) de lancer des frappes militaires sur la Syrie». Insistant sur «le droit du peuple syrien de décider lui-même de sa destinée et de son gouvernement en toute liberté et transparence», Al Azhar condamne en outre «le recours aux armes chimiques, quel que soit celui qui les utilise».
Le Pape a décrété une journée de jeûne pour la Syrie
Le pape François a décrété hier une journée de jeûne dans le monde entier le 7 septembre pour la paix en Syrie, condamné l’usage des armes chimiques et réitéré son opposition à une intervention armée.
«Que le cri de la paix s’élève avec force pour un monde de paix, plus jamais la guerre !», a lancé le Pape dans un vibrant appel très solennel lancé lors de la prière de l’Angelus devant des dizaines de milliers de personnes sur la place Saint-Pierre à Rome. «Je condamne avec une particulière fermeté l’usage des armes chimiques. J’ai encore gravées dans l’esprit et le cœur les terribles images des derniers jours», a poursuivi le pape argentin avant de s’écrier : «Il y a un jugement de Dieu et un jugement de l’Histoire sur nos actions auquel on ne peut pas échapper !»
«Mais il s’est élevé à nouveau contre toute intervention armée. Ce n’est pas l’usage de la violence qui porte la paix. La guerre appelle la guerre. La violence appelle la violence», a-t-il martelé à nouveau.
Quant à la communauté internationale, il l’a exhortée à faire tous les efforts pour promouvoir sans hésitation des initiatives pour la paix dans ce pays, basées sur le dialogue.
L’Iran a réitéré son opposition à toute attaque de pays occidentaux en Syrie et appelle les parties opposées du conflit syrien au dialogue visant à rechercher une solution politique, a annoncé hier le porte-parole de la diplomatie iranienne Marzieh Afkham.
Par ailleurs, plus d’un millier de manifestants opposés à des frappes en Syrie se sont rassemblés samedi à Londres à l’appel de l’organisation Stop the War, saluant le refus du Parlement britannique d’une action militaire contre Damas.
Plusieurs pays, notamment arabes, dont l’Algérie, l’Egypte, l’Irak, le Liban, la Jordanie ou la Tunisie, se sont dits opposés à une intervention militaire étrangère, privilégiant une solution politique à la crise syrienne et assurant que toute action militaire doit obtenir l’aval du Conseil de sécurité des Nations unies.
A. M.