Sous une tente couverte du drapeau palestinien, des experts ont effectué des prélèvements sur la dépouille de Arafat (en médaillon lors de son départ pour la France)
La tombe de Arafat a été ouverte hier durant quelques heures, le temps d’effectuer des prélèvements, confiés à des experts internationaux qui doivent tenter de déterminer, 8 ans après, si le dirigeant historique palestinien a été empoisonné.
L’opération, qui s’inscrit dans le cadre d’une enquête judiciaire française pour assassinat, a commencé à 05h00 locales (0h30 GMT) et s’est achevée en milieu de matinée avec la fermeture de la tombe. «Toute la procédure est achevée. Les prélèvements ont été effectués sans sortir la dépouille de la tombe et ont été remis aux experts français, suisses et russes», a déclaré, dans un communiqué, Taoufiq Tiraoui, le président de la commission d’enquête palestinienne sur la mort d’Arafat. Une source palestinienne avait précédemment indiqué que la dépouille avait été transportée dans une mosquée jouxtant le mausolée, mais selon M.Tiraoui, les experts ont décidé d’un «commun accord» de procéder à l’opération sur place. La dépouille n’ayant pas été sortie de la tombe, la cérémonie militaire d’inhumation qui était prévue a été annulée, selon M.Tiraoui, qui doit tenir une conférence de presse. Trois juges français, saisis d’une enquête pour assassinat sur plainte contre X de la veuve d’Arafat, Souha, assistaient à l’opération, en présence de la plus haute autorité islamique palestinienne, le mufti Mohammed Hussein. Le plus grand secret a entouré l’exhumation, hautement sensible symboliquement et politiquement. L’accès à la Mouqataa, le QG de l’Autorité palestinienne où se trouve la tombe, était interdit hier aux médias. Une ambulance était garée dans l’enceinte du complexe et des experts vêtus de combinaisons blanches ont été aperçus près du mausolée. En fin de matinée, les bâches bleues qui dissimulaient le mausolée depuis quinze jours ont été ôtées, ont constaté les journalistes de l’AFP. Les experts internationaux – Russes et Suisses ayant été mandatés par l’Autorité palestinienne – doivent tenter de déterminer si le dirigeant palestinien a été empoisonné au polonium. Cette hypothèse a été relancée par la diffusion en juillet d’un documentaire d’Al Jazeera révélant des traces de cette substance radioactive sur des effets personnels du dirigeant palestinien. Arafat est mort à 75 ans, le 11 novembre 2004, dans un hôpital militaire de la région parisienne, où il avait été transféré avec l’accord d’Israël qui l’assiégeait depuis plus de deux ans à la Mouqataa. Les causes de sa mort n’ont pas été élucidées, et beaucoup de Palestiniens accusent Israël, qui a toujours nié, de l’avoir empoisonné. «En tant que patriotes palestiniens, nous sommes convaincus que les Israéliens ont assassiné le président Arafat», affirmait récemment Taoufiq Tiraoui. «Yasser Arafat est décédé dans un hôpital français, tous les éléments se trouvent dans son dossier médical. Il suffit de le consulter», a rétorqué dimanche le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères Yigal Palmor. Le dossier médical, mis en ligne le 12 juillet par la Fondation Yasser Arafat sur son site, www.yasserarafat.ps, n’apporte pas d’information décisive. «La consultation d’un grand nombre d’experts de spécialités multiples et les résultats des examens réalisés n’ont pas permis de retenir un cadre nosologique expliquant l’association des syndromes», peut-on notamment y lire. L’exhumation a également provoqué des tensions familiales, le neveu de Arafat, Nasser al-Qidwa, convaincu d’un empoisonnement par Israël, s’étant élevé contre «une idée détestable». «Il ne sortira rien de bon de tout ça, cela ne fera aucun bien aux Palestiniens», a-t-il déclaré récemment à l’AFP. Souha Arafat estime, quant à elle, qu’il s’agit d’une «épreuve douloureuse, mais nécessaire». Selon des experts, les résultats des analyses ne devraient pas être connus avant plusieurs semaines.