Le 17 avril 2014, jour de la dernière élection présidentielle, celle du 4e mandat de M.Abdelaziz Bouteflika, l’éditorial du Quotidien d’Oran, intitulé « chronique d’un « petit jour » soulignait que les tenants du statu quo sont dans une « bulle » et « agitent inconsidérément l’idée du complot ».
Les jours qui suivront l’élection de Bouteflika « seront ce « 18 rue de l’impasse » dans laquelle ils maintiennent l’Algérie faute d’écouter les appels pressants au changement. Le 17 est un petit jour. Le 18 sera celui de la poursuite d’une crise systémique qui mine les fondements du pays. »
Dimanche prochain, le deuxième mandat aura accompli sa deuxième année et, malheureusement, le temps du pays s’est bien arrêté au 18 avril 2014. Dangereusement. Même le limogeage du général Mohamed Médiene dit Toufik et la dissolution officielle du DRS n’a pas sorti le pays de ce 18 rue de l’impasse et ne crée pas du mouvement.
Ce deuxième anniversaire se déroule dans une immobilité absolue au sein du pouvoir alors que le contexte géopolitique et économique est de plus en plus bouleversé.
La semaine « française » été particulièrement éprouvante: la réaction disproportionnée à la une « Une » du journal Le Monde s’est terminée par un tweet avec image – il importe peu de savoir s’il était animé d’une intention perfide ou non – du Premier ministre français qui a choqué, bouleversé, indigné et meurtri de nombreux algériens.
Démoralisation de la nation
Et la tendance fielleuse chez une petite Algérie bavarde à faire dans l’auto-dénigrement, dans la haine de soi, dans cet algéria-bashing qui se banalise, a cru trouver du grain à moudre dans cette semaine mal-sainte pour en rajouter une louche sur la fibre essentialiste en vitupérant contre la « lâcheté » du peuple.
Dans cette semaine malsaine, il relève de la salubrité publique de rappeler cette multitude d’hommes et de femmes qui ont, de 1920 à 1962, avec les moyens du bord, des niveaux d’instruction élémentaires et une ingéniosité remarquable, les militants du mouvement national, ces grands tacherons de la reconstruction de la nation algérienne.
Ce sont les grands maçons de l’Algérie, ceux-là nous ont fait, ils ont laissé quelque chose de grand et il est de notre devoir de nous en souvenir. De nous en servir.
Le mauvais spectacle donné par le pouvoir a été saisi au vol par les bavards -souvent programmés- de l’Algeria-bashing qui roule en réseau, hait « le peuple » qui ne « sort pas dans la rue » et qui se considèrent comme supérieurs, plus « conscients » (nous ne sommes pas comme « eux », nous les gens « chics », n’est-ce pas ?) pour pousser à la démoralisation de la nation.
Cela arrive à un moment où, osons le dire, l’Algérie joue sa survie, son avenir, car les ressorts sur lesquels s’appuie un régime finissant sont usés, cassés et inopérants. Mouloud Hamrouche dont les sorties ne sont plus des critiques à l’égard du régime mais l’expression, froide et calme d’une immense inquiétude à l’égard d’une menace existentielle, a souligné que le « système de gouvernance est en crise. Il semble, qu’il ne peut plus produire d’alternatives politiques ou d’alternatives économiques. »
Feu Abdelhamid Mehri, militant au long cours, faisait le parallèle entre l’interminable crise actuelle et le marasme dans lequel se trouvait le mouvement national entre 1945 et 1954.
A la différence, qui n’est pas mince, que les aînés se battaient pour faire renaître un pays, une nation et que nous devons, par les moyens de la politique, nous battre pour les remettre en marche et ne pas les perdre.
Le régime est dans l’impasse et il ne dispose pas des moyens, ni d’institutions pour en sortir. L’Algérie est dans un « que-faire ? » angoissant car elle ne dispose pas – c’est la réussite la plus morbide de l’Etat-Drs- de médiations crédibles, sérieuses en mesures d’imposer, avec le soutien de la population, une issue, une sortie.
Et ceux qui ne s’aveuglent pas savent que quand un pays important (l’Algérie pour de nombreuses raisons) est en crise et n’arrive pas à la résoudre en interne, le poids des acteurs extérieurs devient démesuré.
Ceux qui ne s’aveuglent pas savent que des nations ont été cassées, brisées ou remodelés selon les intérêts des puissants.
L’Algérie est trop importante pour que ces puissants acteurs extérieurs s’en désintéressent. Et ils pèsent déjà trop. Nous le savons tous : nous devons trouver, en nous, avec le » marasme actuel », les moyens de dégager une solution nationale afin d’éviter la solution par l’extérieur. L’hyper-sensibilité du pouvoir à ce qui s’écrit ou se dit à l’extérieur devrait nous alerter encore davantage.
Nous devons la trouver en sachant d’emblée que les solutions putschistes ont vécu et sont inopérantes, ce qui ne veut pas dire que l’armée n’a pas de rôle dans la solution.
Un consensus politique national pour un changement ordonné du régime pour aller vers une démocratie sérieuse qui rétablirait les capacités des gouvernants à faire face aux pressions extérieures est une nécessité impérieuse. C’est cette option qui est sur la table nationale. Elle est la seule avant que l’on finisse par décider pour nous dans une table étrangère.