Deux ans après la cop21 : Un sommet pour déployer la finance climat

Deux ans après la cop21 : Un sommet pour déployer la finance climat

Deux ans jour pour jour après l’adoption à la COP21 d’un pacte historique contre le réchauffement terrestre, plusieurs dizaines de dirigeants sont de nouveau à Paris pour tenter d’accélérer une action climatique encore très insuffisante.

Proposé par la France après l’annonce par Donald Trump du retrait américain de l’accord, ce sommet, co-organisé avec l’ONU et la Banque mondiale, sera consacré au sujet clé du financement: comment orienter la finance mondiale vers les investissements verts, et notamment soutenir les pays du Sud. Une cinquantaine de chefs d’Etat et de gouvernement sont annoncés sur l’île Seguin, à l’ouest de Paris: le Mexicain Enrique Pena Nieto, la Britannique Theresa May, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, des présidents africains, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres… De grands émetteurs de gaz à effet de serre seront en revanche représentés à moindre niveau, ministériel pour la Chine, l’Inde, le Canada… Pour les Etats-Unis, ce sera un chargé d’ambassade; mais des élus, entreprises, fondations viendront dire que «l’Amérique est toujours là». Sont aussi attendus de grands acteurs mondiaux de la finance publique et privée, des ONG, et Leonardo Di Caprio. C’est «fêter un anniversaire par la preuve», avec un sommet «pragmatique et concret», mais «pas une conférence de donateurs», dit-on du côté du gouvernement français. Ce «One Planet Summit» arrive moins d’un mois après la COP23, la conférence annuelle de l’ONU sur le climat. Qu’en attendre de plus? «Une COP, c’est le consensus multilatéral, ce sommet, c’est la mobilisation de ceux qui veulent aller plus vite», explique Laurence Tubiana, cheville ouvrière de la COP21. «Tout doit être utilisé pour montrer qu’il est utile et possible de faire plus que ce à quoi on s’est engagé en 2015». Au terme d’une année frappée par des ouragans record et des incendies jusque dans Los Angeles, une étude vient encore de réviser à la hausse les prévisions de réchauffement du dernier rapport des scientifiques du Giec. En 2015, la communauté internationale s’est engagée à agir pour contenir le mercure sous le seuil critique de +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, mais les engagements nationaux pris entraînent toujours le monde au-delà de 3°C. Beaucoup sont en outre conditionnés à la mise en place de financements. L’initiative New Climate Economy estime à 90 000 milliards de dollars d’ici à 2030 les besoins mondiaux en infrastructures durables. S’ils sont bien placés, ces investissements représenteraient à peine 5% de plus que ce qui serait réalisé de toute façon. D’où l’importance de réorienter les capitaux: aujourd’hui, selon la Climate Policy Initiative, les financements climat s’élèvent à 410 milliards annuels. Notamment, les pays du Nord ont promis de porter à 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 leurs financements climat aux pays du Sud, qui réclament des assurances que la promesse sera tenue en particulier pour pouvoir s’adapter aux impacts des dérèglements (digues, surélévation des habitats, système d’alerte météo etc). «Ce sommet arrive à un moment crucial», souligne Nick Nuttall, porte-parole du secrétariat climat de l’ONU. Fin 2018, «les pays sont attendus à la COP24 pour relever leurs ambitions», note-t-il. Mais cela «dépendra de leur appréciation quant à la disponibilité des capitaux, en particulier au Sud». Demain matin, les échanges incluront ministres, maires, Ocde. L’après-midi, place aux dirigeants, avec des sessions menées par le Français Emmanuel Macron, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim et M. Guterres. Parmi les engagements qui pourraient être annoncés, des dons de fondations, des coalitions contre le charbon ou pour la neutralité carbone. «Sortira-t-on avec une feuille de route de la communauté financière? Ce n’est pas très clair», dit Ronan Dantec, président de Climate Chance, coalition de territoires. Les ONG, elles, manifesteront demain, place du Panthéon, pour demander aux bailleurs de cesser leur soutien aux projets d’infrastructures fossiles (gaz, pétrole, charbon, responsables de 3/4 des émissions). Selon un rapport d’Oil Change-Amis de la Terre-WWF-Sierra Club, banques de développement et institutions publiques liées au G20 dépensent annuellement 72 milliards de dollars dans des projets liés aux fossiles, quatre fois moins pour les énergies propres.