Le recours systématique par les juges d’instruction à la détention préventive a été souvent dénoncé par des juristes et des représentants de la société civile. Un nouveau texte de loi relatif aux procédures pénales vient de réduire non seulement le recours au placement sous mandat de dépôt de tout prévenu mais aussi la durée de la détention provisoire.
Lorsque le maximum de la peine prévue par la loi est inférieur ou égal à trois ans d’emprisonnement, l’inculpé, domicilié en Algérie, ne peut être détenu, sauf dans les cas où l’infraction a entraîné mort d’homme ou causé un trouble manifeste à l’ordre public.
Dans ce cas, la détention provisoire ne peut excéder une durée d’un mois non renouvelable. C’est ce que stipule l’article 124 du nouveau texte de loi relatif aux procédures pénales publié dans le dernier numéro du Journal officiel comprenant de nouvelles mesures réduisant les cas de détention préventive et sa durée. Aussi, l’article 125 stipule que dans les cas autres que ceux prévus par l’article 124, la détention provisoire ne peut excéder quatre (4) mois en matière délictuelle. Lorsqu’il s’avère nécessaire de maintenir l’inculpé en détention, le juge d’instruction peut, après avis motivé du procureur de la République, prolonger par ordonnance motiver la détention provisoire une seule fois pour une durée de quatre (4) mois. L’arrêté de l’ordonnance 15/02 du 23 juillet 2015 modifiant et complétant l’ordonnance 66/155 de 1966 vient minimiser le recours à la détention préventive et sa durée, une revendication tant plaidée par des juristes et observateurs. C’est ce qui a été d’ailleurs relevé dernièrement par la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme (Cncppdh) dans son rapport annuel de l’année 2014. La Cncppdh avait, en effet, appelé à éviter le recours abusif à la détention préventive qui «influe négativement sur la vie du justiciable et porte atteinte à la présomption d’innocence». Le rapport met en relief l’importance de «l’indépendance de la justice, condition sine qua non de l’établissement d’une démocratie réelle et de l’édification d’un Etat de droit à même de mettre fin à la démocratie de façade». Dans le même contexte, au lendemain de l’adoption en Conseil des ministres de l’ordonnance, modifiant et complétant le Code de procédure pénale, le président de la Cncppdh avait rappelé que son instance avait «à maintes reprises dénoncé ladite procédure». «On vivait sous l’industrie du mandat de dépôt», avait-il estimé dans un entretien accordé à TSA. Bien avant les propos de Me Ksentini, Miloud Brahimi, lui aussi avocat, dans une intervention en juin dernier sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, avait considéré que le principe de la présomption d’innocence n’est pas respecté en Algérie pointant du doigt également le recours «alarmant» à la détention préventive. «Il s’agit d’un principe qui est devenu la règle», avait-il déploré.
«Le corps de la justice est passé du principe de présomption d’innocence à celui de présomption de culpabilité, tout comme «on a transformé la détention préventive en condamnation définitive», avait-il explicité. Sur ce dernier point, l’intervenant avait rappelé que des personnes sont détenues depuis de nombreuses années dans des prisons, dans l’attente de leur jugement, «une procédure héritée du droit français».
F. H.