« Desertec ». Un projet pharaonique de 400 milliards d’euros destiné à répondre à 15 % des besoins énergétiques européens.
Plusieurs milliers de kilomètres carrés de panneaux solaires pourraient sortir du sable en plein désert d’Afrique du Nord, voire du Proche-Orient, pour fonctionner d’ici 10 ans.
Du rêve à la réalité, le processus est encore long. Lundi 13 juillet, douze entreprises, en majorité allemandes, ont signé un protocole d’accord prévoyant la création d’un bureau d’études au plus tard fin octobre.
Celui-ci devra aboutir d’ici trois ans à « l’élaboration de plans d’investissement réalisables » pour la création de ce réseau de centrales solaires.

Parmi les groupes impliqués se trouvent la banque allemande Deutsche Bank, les groupes énergétiques E.ON et RWE, le conglomérat Siemens ou encore l’espagnol Abengoa Solar et l’algérien Cevital.
Des représentants de la fondation à l’origine du projet ainsi que de la Ligue arabe et du ministère égyptien de l’Énergie étaient également présents.
« Ce projet est le fruit de 30 ans de travail sur l’énergie solaire, et surtout de trois études réalisées entre 2002 et 2006 à la demande du ministère », explique le professeur Hans Müller-Steinhagen, directeur de l’institut de thermodynamique technique du centre aérospatial allemand (DLR).
La technologie utilisée ne serait pas celle du photovoltaïque (panneaux solaires), mais de l’énergie solaire thermique : d’immenses miroirs paraboliques produisant de la vapeur d’eau sous pression à 400 degrés Celsius, qu’une turbine traditionnelle convertirait en électricité.
« De telles centrales existent depuis 25 ans en Californie », souligne-t-il.
Satisfaction des écologistes
Économiquement, l’électricité ainsi produite ne serait à ce jour pas rentable, surtout compte tenu des difficultés techniques liées à son acheminement jusqu’à l’Europe.
Mais les experts du DLR pensent que l’électricité solaire pourrait être parmi les plus abordables dans les 10 ans à venir, au regard des difficultés prévisibles d’approvisionnement en énergies fossiles à l’avenir.
Desertec « n’est plus une vision lointaine, mais une technologie fascinante et à portée de main », affirme le patron de Munich Re, Torsten Jeworrek.
Desertec doit également contribuer au développement du ou des pays qui accueilleront les centrales, souligne la Fondation, notamment par les emplois qu’elles fourniront, par la construction de certains composants, comme les miroirs, par des entreprises locales, ou encore par la construction d’usines de désalinisation alimentées par les centrales et qui profiteront aux populations locales.
Le projet a reçu le soutien des écologistes, Greenpeace estimant, par exemple, qu’il rendrait « superflues la construction de nouvelles centrales thermiques et la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires ».
L’ONG cite une étude montrant que les émissions de CO2 pourraient être réduites de 4,7 milliards de tonnes, soit six fois la production annuelle de l’Allemagne, d’ici 2050.
Les Verts allemands, par la voix de l’ancien ministre de l’Environnement Jürgen Trittin, qui avait commandé les premières études, ont ironisé : « Certains se gaussent pendant des années des idées des Verts et veulent dix ans après faire croire qu’ils ont toujours été d’accord avec eux ».
« Il est réjouissant de voir que Deutsche Bank, Siemens, RWE et d’autres ont enfin remarqué que l’avenir est dans le renouvelable et le solaire », a-t-il ajouté.