La lutte contre le pillage de sable interpelle aussi des autorités administratives qui doivent collaborer avec les autorités militaires. C’est l’affaire de tous, explique un officier du groupement de gendarmerie.
Mercredi 31 août. En cette journée de ramadhan, endurci par une chaleur de plomb, destination Boumerdès dont l’évocation rime toujours avec plages. C’en est pas le cas. Descente avec les gendarmes. A trois quart d’heure de route, nous y sommes. Première escale, barrage de Boudouaou.
Les gendarmes qui étaient déjà en place se mettaient à vérifier scrupuleusement tout véhicule, notamment ceux destinés au transport de marchandise. Sur les lieux du barrage, les gendarmes ont mis la main sur un véhicule transportant des chaussures sans facture ni registre du commerce.
«Pour défaut de facture et de registre du commerce, la marchandise dont on ne sait d’où elle vient (peut être volée) est saisie», nous dit un gendarme. Au bas côté de la route, un immigrant clandestin est intercepté dans le même barrage de nationalité malienne, ce migrant clandestin a été soumis à l’interrogatoire des gendarmes devant les regards «indiscrets» des journalistes.

Ensuite, la patrouille s’est dirigée vers la gare ferroviaire qui se trouve à quelque jet de pierre du barrage dressé par les gendarmes. Munis de chien renifleur, les hommes en vert ont fait irruption dans les wagons en procédant au contrôle d’identité d’un jeune homme «noir» en partance d’Alger.
«Messieurs, SVP ne me photographiez pas…SVP»? a insisté ce jeune, allure d’étudiant, traité ave courtoisie par les gendarmes qui n’ont pas tardé à libérer l’autorail. A 20 heures manquées de quelques minutes, c’est l’appel à la rupture du jeûne qui retentit. Au siège du groupement de la gendarmerie, journalistes et gendarmes déjeûnent ensemble dans un climat de convivialité, mêlée de sérénité.
Après un moment, le temps de siroter son café et de griller sa clope, la patrouille s’est dirigée vers Corso où nous avons visité le Parc ( jardin) de cette ville côtière qui, à notre arrivée, commence à se réveiller et à se remettre peu à peu de son sommeil de la journée.
Dans les allées du jardin, caressées par la brise marine et empruntées par des familles, jeunes, hommes et femmes, la présence des gendarmes a donné un sentiment d’assurance aux estivants.
Dans un coin, une dame nous chuchote à l’oreille : «Ici, on est en sécurité surtout quand il y a la présence des services de sécurité. En uniforme ou en civil, comme vous d’ailleurs, la sécurité est garantie en ce ramadhan d’autant plus que cet endroit est le refuge de toutes les familles qui y viennent après ftour», témoigne cette dame qui s’est approchée de nous pour exprimer sa reconnaissance.
D’autres, nombreux, ont salué la présence des journalistes qui nous ont identifiés en tant que tels. «Vous les journalistes, braquez vos caméras vers moi, prenez-moi en photo…», lance avec ironie un jeune, vendeur de cacahuètes, dans un coin du jardin. En face du jardin, nous sommes attablés dans un café du coin où des familles prenaient place. Sur la plage de Corso, des baigneurs sont là.
Rassurés par la présence des hommes en vert, la patrouille ne passe pas inaperçue devant les regards indiscrets des passants qui, par moments, ne se privent pas de saluer tel ou d’échanger des propos avec les gendarmes et les journalistes. Vers minuit, nous nous sommes dirigés vers la plage Guedouari, dans la commune de Corso où l’ambiance semble quasi inexistante. Cette plage est peu fréquente, de l’avis d’un jeune rencontré sur place. «Ici c’est très calme.
Les gens ne viennent pas ici, pourtant c’est une plage paisible et propre. Je vous invite un jour à venir ici et vous vous rendez compte que c’est un endroit paradisiaque …», nous dit ce jeune habitué de cette plage. Pillage de sable, c’est l’affaire de tous. Le pillage et le trafic de sable constitue une menace aussi bien pour l’environnement que pour la sécurité et l’économie nationale.
La maffia du sable, sans vergogne et surtout intrépide, continue de sévir malgré la chasse à la sorcière menée par les gendarmes contre ces pilleurs qui défient toutes les lois, même celles de la nature. Les chiffres établis par les services de la gendarmerie renseignent sur un phénomène bel et bien existant.
Les pilleurs agissent surtout dans le périmètre entre Baghlia ( Boumerdès) et Tadmait ( Tizi Ouzou) où l’extraction de sable est florissante. Rien que pour 2013, le groupement de la gendarmerie de Boumerdès a procédé à l’arrestation de 9 personnes dont six mises sous mandat de dépôt, toutes impliquées dans 16 affaires liées à l’extraction de sable. Aussi, apprend-on de même source, 16 véhicules ont fait l’objet de saisie, auxquels s’ajoutent une quantité de 98m3 de sable, sans préciser l’origine.
Car, l’extraction de sable à Boumerdès tout comme d’ailleurs à Tizi Ouzou se fait également à partir des oueds. Le phénomène connaît dans cette portion de Kabylie une croissance inquiétante, malgré la mobilisation des services de sécurité qui mènent une lutte sans merci contre ce pillage. En 2012, les services de gendarmerie de la wilaya ont fait état de 60 m3 de sable marin saisis.
A juste titre, un officier du groupement a insisté, lors de la présentation du bilan des activités 2013, que la lutte contre le pillage de sable nécessite le concours des autorités administratives auxquelles il reproche, à demi mot son inaction, sinon son laxisme. «C’est l’affaire de tous. La lutte contre le pillage de sable interpelle aussi des autorités administratives qui doivent s’y impliquer.
La question de l’environnement est l’affaire de tous», a-t-on insisté. S’il est vrai que le pillage de sable est un phénomène auquel il faut conjuguer tous les efforts pour y remédier, le durcissement des peines contre les pilleurs serait une panacée. Car, on sait que le pillage de sable est classé parmi les affaires d’atteinte à l’environnement, il y a de quoi inciter les pilleurs à récidiver.
Autant dire que les autorités administratives, civiles et militaires sont appelées à conjuguer leurs efforts et à coordonner davantage pour juguler le pillage de sable qui est une menace pour la sécurité des personnes et de leurs biens et une atteinte à l’environnement. Les efforts de la gendarmerie dans cette lutte, si elle doit redoubler, ne sont pas toutefois à négliger. Criminalité : pas trop d’inquiétude.
Dans un autre registre, celui de la lutte contre la criminalité dans le territoire de la wilaya de Boumerdès, les unités du groupement de la gendarmerie ont établi un bilan du premier semestre (y compris juillet, lequel fait état de 1 269 affaires traitées et de l’arrestation de 601 personnes dont 158 ont été placées sous mandat de dépôt.
Le bilan, présenté au siège du groupement de la gendarmerie devant les journalistes note une baisse de la criminalité par rapport à l’année 2012 où les mêmes services ont enregistré 1 064 affaires. «Parfois, ce sont de petites affaires d’atteinte aux personnes comme les vols et les agressions verbales qui amplifient le bilan. Ces affaires au nombre de 574 enregistrées, représente 62% du total des affaires liées à la criminalité ordinaire », précise-t-on.
Pour ce qui de la lutte contre le crime organisé, en hausse par rapport à la même période de l’année 2012, les unités du groupement ont fait état de 37 affaires dont 12 sont liées à l’immigration clandestine et dans lesquelles sont impliquées 42 personnes.
Doux euphémisme, l’immigration clandestine concerne différentes nationalités, y compris allemande, aux cotés des marocaine, nigérienne, ivoirienne et malienne. En tout et pour tout, 29 personnes sont mises sous mandat de dépôt pour séjour illégal en Algérie.
Dans la présentation du bilan, les officiers de la gendarmerie ont rappelé qu’il faut entendre par immigration clandestine non seulement défaut de passeport ou séjour illégal mais aussi expiration des délais du séjour qui donne lieu à des poursuites judiciaires.
C’est le cas, certes, pour ce ressortissant allemand dont le titre de séjour est arrivé à expiration. La drogue et les psychotropes viennent à la tête du classement avec 28 affaires pour la même période de l’année 2013, en hausse par rapport à l’année précédente où l’on a recensé 21 affaires et l’arrestation de 35 personnes dont 23 sont mises sous mandat de dépôt.
Une quantité de 40.5 kg de kif traité et 47 psychotropes a été saisie. Concernant l’immigration clandestine, la gendarmerie a enregistré 12 affaires, en plus de l’arrestation le jour de la descente des gendarmes d’un immigrant malien.
Ce dernier, la soixantaine, a été soumis à un véritable interrogatoire non pas par les gendarmes qui sont dans le rôle mais par une journaliste d’une chaîne de télévision privée. Le mis en cause, très gêné par la présence des journalistes, sera présenté devant les instances judiciaires, apprend-on sur place.
Pour ce qui est du trafic de faux billets, les mêmes services ont recensé une seule affaire (faux billet de 2000 DA) dont l’auteur n’est pas encore identifié.
Y.M.