Des touaregs fuient la Libye, d’autres menacent de reprendre les armes : La poudrière du Sahel

Des touaregs fuient la Libye, d’autres menacent de reprendre les armes : La poudrière du Sahel

Des centaines de Touareg maliens et nigériens ayant combattu dans les rangs des forces du colonel Kadhafi, traqué par les insurgés libyens, ont entamé leur retour dans leur pays, faisant planer une menace sur la sécurité au Sahel. Cet exode intervient quelques jours après la mort du chef des touaregs Ibrahim Ag Bahanga. Celui-ci menaçait de reprendre les armes si le gouvernement malien refusait de répondre à leurs revendication.

« Des centaines de Touaregs maliens et nigériens reviennent du front libyen. Parmi eux, il y a des ex-rebelles maliens et nigériens mais aussi des Touareg d’origine malienne qui (ayant eu la nationalité libyenne dans les années 1990) étaient dans l’armée libyenne », a déclaré une source sécuritaire malienne à Gao, une ville au nord du Mali.

Ces Touareg ont pour la plupart combattu aux côtés des troupes de Kadhafi et certains d’entre eux étaient dans une unité d’élite de l’armée libyenne, selon la même source. « Le Mali a le même problème » que le Niger, a-t-elle poursuivi.

Des sources nigériennes ont indiqué hier que des mercenaires nigériens, essentiellement des Touareg ont commencé à rentrer à Agadez, dans le nord du Niger, après la déroute des forces de Kadhafi.

« A la tête de ces Touareg (nigériens), il y a leur chef Alambo », a indiqué Moussa Tiendré, membre de l’Association des Nigériens de Gao. « Il faut craindre une déstabilisation de tout le Sahel avec cette nouvelle donne. Les Etats comme le Mali et le Niger ne sont pas préparés à faire face à cette situation », a déclaré Mamadou Diallo, enseignant à l’Université de Bamako. « Que vont devenir ces combattants ? Ils ont des véhicules, des armes et de l’expertise. C’est dangereux », a-t-il estimé.

De nombreux observateurs avaient manifesté leur inquiétude après le départ en Libye de ces combattants, craignant que leur retour avec des armes lourdes libyennes ne bénéficie à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), très actif dans plusieurs pays du Sahel.

Mort d’un chef touareg

Cet exode des touaregs pro–Kadhafi intervient quatre jours après la mort du chef touareg Ibrahim Ag Bahanga.

Dans un entretien accordé à El Watan peu de temps avant sa disparition Bahanga affirmait qu’ « Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) s’est bien équipée grâce au Mali et certains Etats occidentaux.

Ibrahim Ag Bahanga a indiqué que c’est « lors des affrontements de janvier 2010, entre l’armée malienne, sa milice et le mouvement touareg, (que) tout a été fait pour que les groupes Aqmi viennent s’installer dans la région avec le feu vert de Bamako ».

Depuis, « les Touareg sont devenus la cible privilégiée des terroristes d’Aqmi ». Évoquant la Libye, il a estimé que la disparition de Mouammar Kadhafi était « une bonne nouvelle pour l’ensemble des Touareg de la région » et a nié toute forme de soutien au régime Kadhafi.

Il a indiqué que « la rébellion en Libye constitue pour les Touareg une occasion de revenir chez eux et de demander des comptes à l’Etat malien, qui s’est toujours rangé du côté de la Libye contre sa population du Nord ».

Menaces de conflit armé

Quelques heures avant sa mort, ce chef touareg a déclaré qu’il fallait amener Bamako à prendre en compte leurs revendications, « même si c’est par la force des armes ». Ibrahim Ag Bahanga était présenté par les observateurs comme un chef rebelle ayant toujours voulu évoluer en marge du processus de paix initié dans le Nord du Mali avec les accords d’Alger signés en juillet 2006 entre Bamako et des groupes touaregs maliens.

Communauté nomade d’environ 1,5 million de personnes, les Touareg sont répartis entre le Niger, le Mali, l’Algérie, la Libye et le Burkina Faso.Des rébellions touareg ont agi au Mali et au Niger dans les années 1990 et au début des années 2000, avec une résurgence de 2006 à 2009. Plusieurs dizaines de milliers d’entre eux s’étaient réfugiés en Libye pour fuir ces conflits.