Des prix «indexés» sur les conditions météo !

Des prix «indexés» sur les conditions météo !

L’Algérien n’est pas heureux par les temps actuels. Non pas parce que son équipe nationale, qui l’aide à oublier ses tourments quotidiens, son opium à lui, se fait rosser à chacune de ses sorties près des forêts d’acajou gabonaises, mais parce que les frites et la pizza sont devenues plus chères avec ces chutes de pluies et de neige. Et la bénédiction de pluies et de neige qui ensemencent les barrages et les terres céréalières est devenue une calamité naturelle pour le porte-monnaie des Algériens. Car ils ne comprennent pas que les prix des fruits et légumes jouent souvent au yo-yo à chaque fois que le thermomètre baisse, ou que des chutes de pluies abondantes inondent plaines et vallées. Depuis le début de cette vague de froid, accueillie avec soulagement par tous ceux qui achètent leur eau en été et veillent tard le soir pour remplir bidons et citernes, les prix de la mercuriale ont quasiment doublé, sinon triplé dans les marchés urbains.

Exemple: la tomate à presque 200 DA/kg, la courgette entre 140 et 160 DA/kg, la pomme de terre entre 45 et 60, voire 70DA/kg, ou l’oignon à 200 DA/kg. Beaucoup s’interrogent comment, par quelle baguette magique les prix ont triplé du jour au lendemain, sans que les services du commerce et du contrôle des prix ne bougent le petit doigt ? Il y a quelques jours, avant le début de la vague de froid, la tomate était à 60-70 DA/kg, le lendemain elle est vendue à 180 DA/kg dans un marché de Blida. Pourquoi ? Réponse du marchand: « Hier à Sétif, elle s’est vendue à 200 DA ». Donc, les commerçants des fruits et légumes appliquent une curieuse et inquiétante indexation des prix sur les conditions météo, comme ailleurs dans les pays développés, il y a l’indexation des prix à la pompe en fonction des cours (en baisse ou à la hausse) du baril sur les marchés.

«C’est du vol !, estime un citoyen qui s’interroge «comment peut-on acheter la tomate en gros à 40 DA/kg un jour, et la vendre le lendemain à 200 DA après des chutes de neige dans la nuit. C’est absurde!» Pourtant, c’est la triste et amère «réalité» que les Algériens, en particulier ceux qui font leur marché quotidiennement, rencontrent, tapie entre tomates et topinambours, entre aubergines et courgettes, la fameuse plaque en bois avec le prix affiché des produits. C’est cette terrible plaque de bois, cette terrifiante ardoise, où sont marqués les prix, qui fait actuellement la loi sur les marchés des fruits et légumes. Et, surtout, qui module les prix au gré de l’évolution des conditions climatiques, comme une sorte de girouette des prix de la mercuriale.

L’Algérie reste ainsi un pays particulier, qui se singularise par son système de commerce des fruits et légumes. Que le climat se détériore, qu’il neige ou qu’il pleuve un peu plus que d’habitude, et l’aiguille des prix s’affole. Le plus grave, c’est que les marchands de fruits et légumes, les transporteurs et les grossistes, enfin toute la chaîne de la filière agricole, est devenue comme une immense boussole qui change au gré des perturbations climatiques, et plus la perturbation dure, plus les prix montent, et plus le profit est important pour une marchandise souvent qui laisse à désirer. C’est le système national de déstockage des fruits et légumes, en fait, qui est enclenché à chaque grande perturbation climatique.