Le geste «inélégant» du sénateur et de l’ancien ministre français de la Défense sous Nicolas Sarkozy, Gérard Longuet, qui a répondu par «un bras d’honneur» aux dernières déclarations du ministre des Moudjahidine, Mohamed-Cherif Abbas, qui demandait à la France «une reconnaissance franche de ses crimes commis en Algérie», a suscité l’ire et le courroux de plusieurs personnalités politiques.
Ces dernières ont toutes condamné ce geste «déshonorable » de Gérard Longuet qui représente, à leurs yeux, «ce qui reste de l’esprit colonialiste et de la droite radicaliste». Ainsi, le porte-parole du Front de libération nationale (FLN), Kassa Aïssi, a estimé que le vieil adage, qui disait que la droite était bête et méchante, vient d’être confirmé par l’ancien ministre de la Défense.
«Le geste de Gérard Longuet en est l’expression non seulement incivique, mais aussi la plus réactionnaire parce qu’elle traduit une attitude qui a toujours caractérisé la droite française qui s’est illustrée par l’application du code de l’indigénat, les massacres de 8-Mai 1945, l’atroce guerre contre le peuple algérien qui réclamait son indépendance, ainsi que les destructions et les tueries en 1962 sous la signature de l’OAS à quelques jours du recouvrement de l’Indépendance de notre pays», a commenté Kassa Aïssi, que nous avons joint, hier, par téléphone.
Abondant dans le même sens, Abdelhamid Si-Afif, membre du bureau politique du FLN, a souligné que «le geste indigne et immoral de Longuet n’honore ni l’institution à laquelle il appartient, ni le poste qu’il occupait». «Il ne faut pas donner à un tel énergumène l’importance qu’il ne mérite pas, mais il faut plutôt faire preuve de moralité et de sagesse », a-t-il dit.
Par ailleurs, Abdelhamid Si-Afif a indiqué que l’ancien ministre de la Défense français représente le reste d’une idéologie dépassée par l’histoire, les évènements et surtout, a-t-il enchaîné, par cette nouvelle dynamique, que la gauche veut donner à ses relations avec l’Algérie. Cependant, l’ancien député a estimé que le geste de Gérard Longuet n’est pas celui de tous les Français».
Pour étayer ses propos, notre interlocuteur a précisé que «plusieurs Français savaient, avant les élections présidentielles, les positions de François Hollande, par rapport au devoir de mémoire et à l’Algérie. «Et, le fait, a-t-il poursuivi, que ces derniers ont voté en faveur de ce candidat socialiste, cela veut dire qu’ils partagent ses positions ».
«Les Français étaient conscients que Hollande allait dénoncer l’apologie colonialiste et j’ai, moi-même, constaté cela lorsque je l’ai reçu, le 7 décembre 2010, en tant que président de la commission des Affaires étrangères de l’APN», at- il déclaré.
«UN GESTE QUI REFLÈ- TE L’ÉTAT D’ESPRIT DE LA DROITE FRANÇAISE»
Pour sa part, Mustapha H’missi, chargé de communication du Parti de la liberté et de la justice (PLJ) a indiqué que «le geste de Longuet reflète l’état d’esprit de la droite et d’une certaine élite française».
«Tout le monde connaît les positions de la droite et ce geste démontre une certaine haine vis-à-vis de l’Algérie», a-t-il dit. D’autre part, Mohamed Djemâa, l’un des fondateurs du TAJ (Tajamoue Amel El-Jazaïr), a souligné que «ce geste est condamnable d’autant plus qu’il coïncide avec la date de la commémoration du déclenchement de la Guerre de libération nationale ».
«C’est une réaction à laquelle on s’attendait surtout après la reconnaissance par François Hollande des massacres de 17-Octobre 1961», at- il laissé entendre. «Le TAJ condamne fermement ce geste et demande à la France officielle de s’en démarquer d’autant plus que les relations entre les deux pays commencent à prendre le bon chemin», a-t-il encore ajouté.
De son côté, le secrétaire général du Mouvemen El-Islah, Hamlaoui Akkouchi, a, lui aussi, condamné le geste de l’ancien ministre de la Défense français qui confirme, a-t-il estimé, que la France n’a pas la volonté de reconnaître les crimes qu’elle a perpétrés en Algérie.
Notre interlocuteur a ajouté également que ce geste est aussi une humiliation pour l’Algérie car, a-t-il soutenu, celui-ci a été fait pour répondre à Mohamed-Cherif Abbas, qui représente le symbole des Moudjahidine dans notre pays. «Les responsables de notre pays ne doivent pas prendre à la légère de tels dépassements», a-t-conclu.
«GÉRARD LONGUET, UN NOSTALGIQUE DE L’ALGÉRIE FRANÇAISE»
Néanmoins, un responsable au niveau du ministère des Affaires étrangères, cité par le quotidien arabophone «El-Khabar » a souligné que «ce geste indigne et outrageant est la marque de fabrique de ce nostalgique de l’Algérie française, mal dégrossi et fascinant». «En tant qu’Algériens, fiers et indépendants, nous ne pouvons que le braver et l’accabler de notre mépris.
Il ne mérite pas plus. Laissons-le donc dans son milieu naturel : le caniveau des voyous de la République», a-t-il ajouté. Par ailleurs, le secrétaire général de l’Organisation des enfants de chouhada, Tayeb Houari, a, dans une déclaration au même quotidien, qualifié le comportement de Longuet d’«impoli». «Le colonisateur est un mauvais élève et restera, ainsi, avec ses comportements et sa haine vis-à-vis du peuple algérien», a-t-il dit.
À noter, enfin, que Gilbert Collard, député d’extrême droite, a apporté son soutien à l’ancien ministre français de la Défense, et ce, en effectuant un bras d’honneur le lendemain sur la chaîne LCI. «Il a bien fait, il a, enfin, un peu d’honneur au bout du bras.
Moi, j’ajoute mon bras à celui de monsieur Longuet (…). Il a bien fait de le faire et j’espère que ce bras d’honneur a été tellement amplifié par les médias que ceux qui nous demandent de nous repentir l’ont reçu en pleine figure», a ironisé le député du Gard.
À rappeler aussi que Gérard Longuet a fait son geste, mercredi dernier, sur la chaîne Public Sénat sans savoir qu’il était filmé, après avoir été interrogé pour savoir sa réaction, quant aux propos de Mohamed-Cherif Abbas, qui a appelé la France, à la veille de la commémoration du 1er-Novembre 1954, «à une reconnaissance franche des crimes qu’elle a perpétrés à l’encontre des Algériens».
Si l’ancien ministre de la Défense a avoué, sur la chaîne BFM, avoir regretté son geste, ce dernier ne l’a pas, cependant, renié.
S. Dadi