On a appris jeudi, via l’agence officielle marocaine, la MAP, que des responsables du Polisario et des officiers algériens seront convoqués par la justice espagnole le 12 août prochain pour répondre de griefs portant pratique de la torture à Tindouf…
Après une dépêche agressive visant la presse algérienne, après le discours du roi Mohamed VI vilipendant l’Algérie à l’occasion de la fête du trône, voici une nouvelle offensive de la communication du Makhzen manifestement décidée à envenimer les relations bilatérales.
Ce procès qui s’annonce kafkaïen ferait suite à une plainte déposée en 2007 par une prétendue association de victimes sahraouies qui aurait subi des sévices dans les camps de Tindouf.
Il n’est pas difficile de deviner qui a orchestré cette manipulation quand on voit qui s’occupe de diffuser l’info-propagande dans un contexte de virulence d’Etat au sujet de la question de la décolonisation du Sahara occidental que le lobbying marocain n’a pas réussi à étouffer.
Monté de toutes pièces Des indiscrétions nous ont même fait savoir que ce serait les services du royaume, par le biais de la représentation diplomatique de Rabat en Espagne, qui se chargeraient de monter ce dossier fantasque en payant grassement des avocats de la péninsule ibérique.
On ne doit donc pas s’étonner de lire dans la dépêche insolente de la MAP que «des officiers de la sécurité et de l’armée algérienne» seraient accusés de «génocide, torture, disparitions forcées, détention illégale et graves violations des droits de l’Homme.»
On notera que les noms de ces «accusés» algériens n’ont pas été cités tandis que les cibles du Polisario visées par la cabale marocaine sont nominativement désignées : «Parmi les (29) accusés objet de la plainte figurent notamment l’ex-représentant du Polisario en Espagne, Brahim Ghali (actuellement en Algérie), le ministre de l’information du pseudo RASD, Sid Ahmed Batal, le soit disant ministre de l’éducation, Bachir Mustapha Sayed, et l’actuel représentant des séparatistes en Espagne, Jandoud Mohamed.
Figurait également sur la liste l’ex-représentant du Polisario aux Iles Canaries, Mohamed Luchaa, décédé dernièrement à Las Palmas.Les dénommés Khalil sidi Mhamed, pseudo ministre des colonies, et Mohamed Khaddad, actuel coordinateur avec la Minurso et ancien DG de la sécurité militaire, seront également sur le banc des accusés de torture à l’encontre des populations des camps de Tindouf.»
Il ne manque plus que le président Mohamed Abdelaziz pour que la plus haute juridiction espagnole, l’Audience Nationale, juge toute la classe politique résistante à l’ignominie coloniale du Makhzen dans un renversement des statuts qui transforme la victime en coupable.
Complicité espagnole Bien entendu, si des faits de violence étaient avérés, on est en droit de se demander pourquoi une juridiction étrangère se fait si disponible à juger des révolutionnaires quand l’occupant bénéficie d’une impunité totale au point où la Minurso n’a pas pu élargir ses prérogatives à la surveillance du respect des droits de l’homme au Sahara occidental.
Les Européens font donc preuve de parti pris en quand l’Espagne veut harceler les dirigeants du Polisario et que la France soutient le Maroc dans ses exactions quotidiennes.
On aura noté aussi le compte-rendu mitigé de la députée espagnole Mara Muniz qui a récemment effectué une visite dans les camps de Tindouf mais n’a pas semblé très touchée par la détresse de ces populations de Saharouis réfugiés depuis plus de trente ans sans que la communauté internationale ne travaille jamais sérieusement à la fin du conflit.
Il est donc à craindre qu’au moment où l’Espagne booste ses entreprises pour qu’elles arrachent des marchés juteux en Algérie, les autorités d’Alger fassent savoir à leurs homologues madrilènes que les procès politiques de l’Audience Nationale, à la limite de l’ingérence, participent d’une conspiration dont l’Espagne en crise pourrait se passer. Surtout quand on sait la responsabilité historique de ce pays, ex-puissance coloniale qui occupait le territoire encore spolié des Sahraouis.
Il doit bien exister des relations de coopération entre la justice espagnole et algérienne pour qu’on puisse juger en Algérie des faits qui se seraient produits à Tindouf ! Alors, que cesse cette comédie des droits de l’homme devant des tribunaux lointains que des officines utilisent pour faire taire les voix opposées à l’occupation marocaine du Sahara occidental.
Les questions politiques de cette importance ne seront jamais tranchées par les juges de l’Audience Nationale ou dans les geôles marocaines.
Nordine Mzalla