Des milliards d’euros engloutis par la corruption en Algérie

Des milliards d’euros engloutis par la corruption en Algérie
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La corruption en Algérie n’est pas un phénomène nouveau. Nous en parlons et la dénonçons depuis des décennies sans que nous ne parvenions à l’éradiquer à cause de l’opacité du système qui la favorise. Même lorsque les affaires arrivent à sortir, pour une raison ou une autre, elles n’atterrissent jamais, lorsqu’elles concernent les plus hauts dirigeants du pays, sur le bureau du procureur de la République. Si la démocratie ne protège pas de la corruption, son mérite est de permettre, non seulement de révéler la moindre affaire de corruption, mais de donner à la justice indépendante le droit de poursuite.

Avant que la justice n’ait apporté d’autres éléments de preuve, Jérôme Cahuzac, l’ancien ministre du Budget de François Hollande, contraint à la démission par l’ouverture d’une information judiciaire au sujet d’un compte bancaire ouvert en Suisse, est accusé de « blanchiment de fraude fiscale ».

Selon le code pénal français, « le blanchiment est le fait de faciliter par tout moyen la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect ». Autrement dit, il s’agit de réinjecter dans le circuit économique l’argent de revenus non déclarés au fisc. La corruption et l’enrichissement illicite ne sont pas établis.

La justice française enquête pour connaître l’origine des fonds sur lesquels Jérôme Cahuzac doit s’expliquer prochainement. L’émotion que cette affaire suscite dans l’opinion française vient du fait que le ministre du Budget, chargé de contrôler les fraudes et les évasions fiscales, détienne, lui-même, un compte non déclaré à l’étranger et d’avoir aussi effrontément menti, y compris devant l’Assemblée nationale, lorsque celle-ci l’avait interrogé à la suite des révélations de Mediapart. «Je n’ai jamais disposé d’un compte en Suisse ou ailleurs à l’étranger», affirmait-il avec assurance, soutenant, à propos de l’enregistrement qui le confondait, que «ce n’était pas lui parce que ça ne pouvait pas être lui».

LG Algérie

Jusqu’au bout, c’est-à-dire le 2 avril dernier, le ministre s’en était tenu à une ligne de défense dont il ne pouvait ignorer les failles. Le gouvernement socialiste, qui croyait pouvoir profiter de la mise en examen de l’ancien président de la République française, Nicolas Sarkozy, pour «abus de faiblesse» à l’encontre de l’héritière de l’Oréal, la milliardaire Liliane Bettencourt, se trouve dans une situation bien pire, dont on ne voit pas comment il pourrait en sortir indemne. D’autant qu’une liste de 130 Français, détenant des sociétés, des actifs ou des placements dans les paradis fiscaux, sur laquelle figurent des proches de François Hollande, qui martelait, pourtant, lors de la campagne présidentielle que son seul adversaire était la finance, est rendue publique par la presse d’investigation que « Mon journal » veut promouvoir en Algérie, ayant déjà commencé à enquêter sur les biens mal acquis et l’enrichissement sans cause. Aucune personnalité, quelle que soit le niveau de ses fonctions, civile ou militaire, ne serait épargnée.

Des dossiers sortent et d’autres, plus explosifs encore, sortiront. La lutte contre la corruption qui gangrène notre pays est une œuvre de salubrité nationale que doit mener la presse, mais, aussi et surtout, la justice demeurée sans réaction face aux révélations de nombreux crimes économiques, dont Sonatrach 1 et 2, autoroute Est-Ouest, Fonds national de développement agricole, Khalifa, détournement de l’argent provenant de la zakat et du culte, commis au détriment du peuple algérien par de hauts responsables politiques. Quand la justice, elle-même infectée, intervient, elle accable souvent des lampistes, des faibles sans défense, sans protection, épargnant, dans tous les cas, les puissants dont les preuves de la culpabilité sont apportées, y compris par l’aveu.

La justice ne peut ignorer ce que tout un chacun sait ; elle ne peut méconnaître l’origine des richesses insolentes qui s’étalent au grand jour face à une misère profonde de la population qui ne supporte plus cette tolérance complice.

L’affaire Cahuzac, dont on devine la source de l’argent, provoque une tempête outre- Méditerranée pour, au maximum, disent les spécialistes de la fraude fiscale, 16 millions d’euros quand les sommes concernées par la corruption et les détournements de l’argent public en Algérie se montent à des milliards d’euros. Parce qu’elles impliquent les marchés publics qui développent une activité économique et commerciale considérable s’élevant à près de 50 milliards d’euros d’importation, sur lesquels un pourcentage, pouvant aller jusqu’à 25%, est versé sur des comptes ouverts dans des banques offshore.

Brahim Younessi