À peine une semaine après la mise en application du travail d’intérêt général comme mesure alternative à l’emprisonnement, la direction générale de l’administration pénitentiaire et de réinsertion du ministère de la Justice propose déjà d’autres solutions susceptibles d’alléger la surpopulation carcérale qui a atteint son point culminant.
L’élargissement du recours à l’amende, la restitution du droit pour la victime pour son indemnisation, le retrait du permis de conduire en cas d’accident, retrait de carnets de chèques ou carte bancaire en cas d’émission de chèques sans provision, surtout s’il y a eu remboursement avant que l’action en justice soit enclenchée, privation d’activité professionnelle, bracelet électronique et exclusion de marchés publics pour des délits de fraude et autres sont autant d’alternatives à la peine de prison énumérées, hier, par le DG de l’administration pénitentiaire, M. Mokhtar Félioune, lors d’un séminaire sur les systèmes alternatifs à la peine privative de liberté et la réinsertion sociale des détenus, organisé hier, au Cercle de l’armée de Béni-Messous.
Ces options ont, selon lui, toutes les chances d’apporter les fruits escomptés de réinsertion sociale, du fait notamment que l’âge d’une grande partie des détenus ne dépasse pas les 30 ans, que la plupart des crimes commis ne sont pas graves et que la majorité des peines de prison prononcées correspondent aux conditions que doivent réunir les condamnés pour bénéficier de mesures alternatives aux peines de prison. Ceux, par exemple, qui peuvent prétendre au travail d’intérêt général doivent être des primaires, c’est-à-dire sans antécédent judiciaire, âgés de plus de 16 ans et avoir écopé d’une peine initiale de prison de moins de 3 ans et d’une peine définitive de moins d’une année.
La durée du travail d’intérêt général est de 40 heures minimum à 600 heures maximum pour une durée de 18 mois à raison de 2 heures de travail pour une journée de prison pour les adultes et 20 heures à 300 heures pour les mineurs. C’est le juge d’application de peine qui invite le condamné à faire ce choix ou celui de l’incarcération. Le juge peut suspendre la mesure et renvoyer l’affaire au parquet si le condamné qui a une peine de travail d’intérêt général ne remplit pas ses obligations. Introduit dans la loi pénale du 25 février 2009, le succès de la mesure relative au travail d’utilité publique dont les modalités d’exécution à suivre par le magistrat chargé de l’application des peines, ont été définies par la circulaire du 21 avril de l’année en cours, dépendant en réalité d’une large part de la capacité et de la volonté des institutions d’accueil de la main-d’œuvre carcérale ou pénale.
Alors que la mesure est, s’il l’on se réfère aux textes de loi, déjà entrée en vigueur, le directeur du projet d’appui à la réforme de la justice, M. Salah Rahmani, s’interroge sur les types d’institutions publiques les mieux à même d’accepter de remplir cette fonction sociale, sur les moyens et procédures par lesquels le juge d’application des peines peut obtenir le partenariat social des institutions publiques et par quels moyens juridiques il peut s’assurer que l’employeur tient ses engagements. « Est-ce que l’institution judiciaire pour prévenir les risques doit élaborer un cahier des charges précis à opposer aux prestataires employeurs de la main-d’œuvre pénale ? » se demande enfin M. Rahmani qui pense que le but de cette rencontre est justement d’examiner l’expérience de l’Espagne, la France et la Norvège en la matière « qui ont une avancée appréciable dans le domaine et de comprendre comment fonctionne leurs systèmes ».
Pour sa part, le DG de l’administration pénitentiaire refuse de donner le bilan d’une semaine de l’application de la mesure en indiquant qu’il le fera à la fin de l’année. « Il faut donner le temps à cette expérience pour mûrir », dit-il en précisant qu’une réunion a eu lieu avec les représentants des différents secteurs à qui on a présenté les contours de cette loi.
M. Félioune indique que parallèlement au travail d’intérêt public, 600 prisonniers de 7 pénitenciers travaillent actuellement en milieu ouvert, dans des fermes agricoles notamment à Adrar, Berrouaghia et Ksar Chelalla et nombreux d’entre eux ont participé à des opérations de reboisement. À noter que le conseiller principal du ministère de la Justice et de la police du département de la correction de la Norvège ainsi que le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation de Paris et le magistrat à la 8e section pénale de l’audience provinciale de Barcelone ont animé des conférences lors de cette rencontre.
Les trois ont été d’accord pour dire que la difficulté réside dans l’exécution sur le terrain des mesures alternatives à la prison qui ne doivent concerner que des délits mineurs. « L’accomplissement de cette opération n’est pas chose aisée. Nous rencontrons également des problèmes à ce niveau », soutient le représentant de l’Espagne, pays qui se heurte à la difficulté de protéger les victimes et leurs biens après une mise en liberté surveillée surtout dans des délits liés au terrorisme, délits sexuels ou conflits entre époux.