Des marchés ou on trouve tout et à bas prix, LA vie après l’informel

Des marchés ou on trouve tout et à bas prix, LA vie après l’informel
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«spectaculaires» que l’on attendait. En effet, la mise en conformité fiscale volontaire et la déclaration à la Cnas, tout aussi volontaire des travailleurs de l’informel ne donnent pas de résultats «visibles» malgré le discours optimiste des responsables aux ministères des Finances et du Travail.

Cet épisode de la «carotte», censée s’intercaler entre deux autres épisodes du «bâton», dans la politique nationale de résorption de l’informel ne résout pas le mal en profondeur. La seule action efficace, estiment les observateurs de la scène économique est celle qui consiste à frapper fort à la racine du problème. Il s’agit, notent les mêmes observateurs, d’éradiquer les espaces commerciaux qui passent pour être l’interface entre les barons et les consommateurs finaux, mais aussi d’assécher la filière d’importation en agissant directement à la source. Les instances publiques chargées de lutter contre le phénomène du marché noir disent qu’il est bien plus facile à dire qu’à faire. L’opération d’éradication des marchés parallèles a réussi à hauteur de 60%, affirment-ils. Mais cette victoire reste très fragile au regard de la ténacité des acteurs du marché noir. Un état de fait qui, semble-t-il, a obligé les pouvoirs publics à reculer et les grands marchés de l’informel qui ont pignon sur rue «trônent» sur le commerce local.

L’évocation de l’éradication d’espaces comme le marché El Djorf, à Alger, fait sourire les observateurs. On en est donc dans la capitale à une sorte de retour à la case départ, à l’exemple du marché de la devise de Port Saïd qui a repris ses activités, comme si de rien n’était, quelques jours à peine après une descente de police. Les acteurs de l’informel ont-ils gagné la guerre, voire la partie?

L’Algérie est-elle condamnée? Qu’en est-il à l’intérieur du pays? Si pour les deux premières interrogations, il est difficile de répondre, pour la troisième, nos reporters tâtent le pouls du marché noir dans plusieurs villes du pays.

La devise, aliments du bétail, pièces de rechange et bars clandestins

Tizi Ouzou: un fléau qui dévore l’économie locale

Kamel boudjadi

En 2008 déjà, L’Expression tirait la sonnette d’alarme sur l’ampleur effarante du marché parallèle de la devise. Près de trois milliards circulaient en dehors des circuits bancaires nationaux et le chiffre donné à l’époque s’avérait minime par rapport à la réalité. Bien évidemment, le change parallèle de devises est le marché noir qui rapporte le plus à Tizi Ouzou devant un autre marché noir aussi dangereux que nouveau sur la scène économique locale. Le marché des aliments du bétail échappe complètement à l’Etat faisant ainsi le lit d’une maffia tentaculaire qui se nourrit sur le dos des agriculteurs. C’est après que viennent les autres marchés parallèles moins dangereux mais plus spectaculairement combattus à l’instar de la vente illicite des boissons alcoolisées qui prolifèrent, mais qui reste sans incidence majeure sur la vie économique de la wilaya.

En effet, le plus gros marché parallèle ou informel est celui de la devise. Comble du paradoxe, le lieu d’exercice se tient devant l’entrée principale d’une des plus grandes banques nationales, la Badr (Banque du Développement rural). La place est animée durant toute la journée. Toutes les monnaies sont étalées au grand jour devant les passants. L’on peut y voir le dollar, l’euro et bien d’autres monnaies. De ce côté-là, le client est choyé et dorloté surtout les vieux retraités des usines de France.

Paradoxalement, ce marché pourtant informel est le thermomètre de l’activité économique et commerciale non seulement de la wilaya mais de toute l’Algérie. Les cambistes locaux sont des clients de gros bonnets qui activent à la place Port Saïd dans la capitale. Un marché tellement ancien qu’il n’est plus à présenter. Il a fini même par s’insérer dans la norme sociale. S’en étonner relève de l’anormal.

Par ailleurs, un autre commerce informel est en train de s’étendre au point de constituer désormais un danger pour l’activité économique locale. Une véritable maffia des aliments du bétail est en train de sucer le sang des agriculteurs. Depuis plusieurs années, des spéculateurs s’introduisent dans la chaîne de vente des aliments du bétail importés et achetés à travers le territoire national. Les agriculteurs en colère ont maintes fois alerté sur le phénomène mais sans effets notables. La filière lait est réellement gangrenée par cette maffia. La botte de foin est vendue à 1500 dinars après une période de sommeil dans des entrepôts afin de créer la pénurie. Des agriculteurs signalent des hangars initialement activant dans le commerce des matériaux de constructions qui se reconvertissent en lieux de vente de foin. L’Etat peine sérieusement à réglementer la filière à cause de cette maffia tentaculaire.

Aux côtés de ces marchés informels, il existe un autre plus ancré et difficile à éradiquer, le marché des véhicules et de la pièce de rechange. La plus grande place se trouve à Oued Ksari près de Draâ Ben Khedda. Des milliers de véhicules sont revendus en pièces détachées alimentant un marché de plus en plus prospère se nourrissant des nombreux accidents de la route. Des véhicules irréparables partent à la casse, mais se perdent dans la chaîne de contrôle commercial des services de l’Etat.

Sur place, les vendeurs proposent toutes sortes de pièces de rechange. Des nouvelles comme des anciennes. De la contrefaçon comme d’origine. Les prix peuvent tromper le néophyte. La casse n’est pas moins chère que la pièce neuve. Aucun moyen de lutte si ce n’est la réglementation de ce circuit depuis les assurances d’accidents, de l’avis même des experts.

Le créneau qui est réprimé avec plus d’éclat est la vente illicite de boissons alcoolisées. Les lieux de débauche et les bars clandestins qui prolifèrent sont autant d’opportunités de vente pour les tenants de l’informel. Un véritable marché noir qui prospère. Mais, des connaisseurs estiment que ce marché n’a pas d’importantes incidences sur l’économie locale. Il n’est pas plus dangereux que le marché informel de la devise et des aliments du bétail.

Enfin, notons que parmi les efforts consentis par l’Etat afin de juguler la situation, l’on peut citer la création de quelque 16 marchés de proximité. Mais ces derniers ne couvriront que les fruits et légumes.