Quelle riposte l’Algérie doit avoir face au repli accusé ces derniers jours par les cours du prix du pétrole ? C’est à cette interrogation que des experts algériens en questions énergétiques ont tenté de répondre lors du forum du journal El Khabar, convergeant à dire que ce recul « conjoncturel était prévisible » en raison de plusieurs facteurs économiques et géopolitiques.
Pour Mourad Preure, l’abondance de l’offre combinée à une situation économique morose due à la poursuite de la récession internationale dans différentes régions ainsi que la situation en Ukraine sont les principales causes de cette baisse des cours du brut.
Abdelmadjid Attar, Ex PDG du géant pétrolier Sonatrach, préfère se projeter dans l’avenir et mesurer les conséquences financières de cette tendance baissière. L’Algérie risque, selon lui, de voir ses recettes se contracter de 15% par rapport à 2012 avec une chute prévue des revenus à quelque 60 milliards de dollars contre 70 milliards deux ans auparavant, alors que la balance des paiement devrait enregistrer un solde négatif à l’issue de l’année en cours.
L’économiste Abdelhak Lamiri, tente pour sa part de tempérer les incidences de cette crise, assurant que les disponibilités financières de l’Algérie lui permettaient de faire face à un prix de baril oscillant entre 80 et 90 dollars. Mais dans le même temps il prévient que les effets à moyen et long termes de cette situation « dépendent de la riposte des pouvoirs publics ». Lamiri croit pouvoir dire que « les autorités algériennes continueront à injecter des ressources pour soutenir la croissance avec un apport plus important destiné à créer une économie productive à travers, notamment, le financement de la restructuration du secteur industriel ».

Il a préconisé, à cet effet, l’amélioration de la rentabilité de ces financements à travers une gestion plus efficace des programmes publics d’investissement. « Le prochain plan quinquennal est déterminant pour l’Algérie », a-t-il soutenu. M. Lamiri a suggéré, en outre, d’investir davantage dans le développement des ressources humaines, d’augmenter les financements accordés à la création d’entreprises, de moderniser le management de l’économie et d’encourager la décentralisation de la décision économique.
Mohamed Mekedem, ancien cadre supérieur de Sonatrach préconise la redéfinition de la politique sociale, la maîtrise des importations et des dépenses et le soutien d’une économie hors-hydrocarbures portée par des secteurs porteurs et bien ciblés. Les intervenants ont, par ailleurs, relevé que les découvertes récentes en hydrocarbures « sont loin de compenser les quantités produites », d’autant plus que les gisements découverts nécessitent entre 7 et 10 ans pour pouvoir entrer en production.
Ils ont, donc, estimé préférable de « travailler sur l’amélioration du taux de récupération au niveau des gisements en cours d’exploitation » en utilisant des technologies nouvelles comme le forage horizontal et la fracturation hydraulique. Ces deux technologies ont permis de prolonger la durée de vie du gisement de Hassi Messaoud et d’augmenter ses réserves récupérables d’environ 29%, a ainsi relevé M. Attar.
S’agissant de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels comme le gaz de schiste, les intervenants se sont mis d’accord sur la nécessité pour l’Algérie de s’approprier de la technologie nécessaire pour une telle industrie afin d’assurer sa rentabilité. « La productivité réelle du gaz de schiste n’interviendra pas avant 2030″, a soutenu l’ancien patron de Sonatrach. En outre, la révision du modèle énergétique et l’optimisation de l’efficacité énergétique pourraient, eux aussi, contribuer à prolonger la durée de vie des gisements conventionnels. Il s’agit, en particulier, d’encourager l’énergie solaire en renforçant la construction de centrales électriques hybrides (gaz-solaire) destinées à répondre aux besoins du marché interne pour libérer des quantités supplémentaires d’hydrocarbures pour l’exportation, soutient M.Mekedem.