«Le problème du terrorisme au Sahel doit être traité par les pays de la région et l’utilisation de la force par des pays étrangers doit être le dernier recours».
La déclaration est du principal adjoint de l’assistant du secrétaire américain à la Défense chargé des affaires internationales, lors d’un point de presse qu’il a animé hier au siège de l’ambassade des Etats-Unis à Alger.
Présenté comme étant aussi conseiller du secrétaire américain à la Défense dans la formulation, la coordination et l’application de la stratégie politique impliquant l’Afrique, l’Europe, l’OTAN et le Moyen- Orient, Joseph Mac Millan a ainsi fait savoir à propos du Sahel que « Je dis la même chose que ce qu’a dit le gouvernement algérien, que le problème du terrorisme doit être traité par les pays concernés : c’est la meilleure façon».
Il a souligné à cet effet que «la préférence de mon pays est que les pays de la région soient concernés par cette question. Nous nous complétons donc et nous avons apprécié l’initiative de l’Algérie de rassembler les pays de la région pour lutter contre le terrorisme». Réitérant «l’importance de l’initiative algérienne », le responsable américain a indiqué que «les pays voisins doivent combiner leurs efforts pour lutter contre ce phénomène».
A une question sur l’existence ou non d’une relation de cause à effet entre la présence des troupes américaines et les ressources naturelles de la région, et après le recours à des faux-fuyants, Mc Millan dira que « la présence militaire américaine est liée directement au terrorisme, ma réponse est claire. Il n’y a aucun lien direct entre la présence des forces américaines et les ressources naturelles dans la région».
Continuant sur sa lancée, il estimera que «le développement économique ne peut pas réussir là où il y a un manque de sécurité. Nous devons trouver des moyens et des méthodes pour sécuriser la région et concrétiser son développement». Il indiquera qu’Algériens et Américains reconnaissent qu’il y a un lien entre le terrorisme et le trafic de drogue. «C’est l’une des questions dont nous discutions ainsi que l’établissement d’une stratégie commune contre ce trafic,» a-t-il dit.
Tout en affirmant son choix pour «une stratégie globale et mondiale de lutte contre le terrorisme», le conférencier estime que «des solutions dans ce cadre peuvent être seulement locales, alors que d’autres doivent être internationales». Interrogé sur son appréciation du paiement de rançons aux terroristes en cas de prise d’otages, il répond : «Le paiement de rançons est une initiative contreproductive qui encourage les groupes terroristes et leur donne des financements».
D’ailleurs, continue-t-il de dire, «comme vous le savez, le gouvernement algérien a une position très claire à ce sujet. Nous avons eu des discussions très importantes avec les responsables algériens sur la manière et les méthodes pour traiter cette question et y mettre fin».
PAIEMENT DE RANÇONS ET FINANCEMENT DU TERRORISME
A propos de la demande algérienne de criminaliser le paiement des rançons aux terroristes, l’hôte de l’Algérie a précisé que «l’Algérie et les Etats-Unis partagent le même objectif, qui consiste à mettre fin au paiement des rançons.
Criminaliser ce paiement est l’une de approches, mais j’estime que la Communauté internationale doit comprendre que c’est l’une des solutions qui doit être établie». Il étayera son propos: «Aucune concession ne doit être faite en matière de paiement de rançons mais le défi est d’amener le monde entier à approuver cette approche»
Mc Millan indiquera que l’ambassadeur américain à Alger continuera de discuter de cette question avec le gouvernement algérien. Son homologue algérien à Washington fera de même avec le gouvernement américain. Mc Millan a déjà eu à discuter depuis deux jours avec les responsables du ministère de la Défense, avec à leur tête le secrétaire général du MDN, le général major Ahmed Senhadji.
Les discussions ont été menées dans le cadre de la 4e session de la coopération entre les ministères de la Défense des deux pays. «Nous avons abordé un certain nombre de questions relatives à la coopération stratégique et technique entre les deux pays, aux types de technologies utilisées par les deux armées, algérienne et américaine, au terrorisme, à la menace terroriste, à la situation dans le Sahel.
Nous avons aussi parlé des moyens utilisés par les forces armées, notamment dans des zones de conflit. Nous souhaitons que l’armée algérienne bénéficie de ces expériences». Il y a eu aussi des discussions entre les deux parties sur le partage d’informations et de renseignements. Ces discussions sont qualifiées par Mc Millan de «productives».
Elles ont aussi porté sur, a-t-il souligné, «des questions de coopération, de livraison d’équipements américains pour l’information militaire et la technologie dans l’armée, sur les exercices militaires entre les deux pays». Le responsable américain s’est entretenu par ailleurs avec le ministre délégué au MDN, le ministre des Affaires étrangères ainsi que le conseiller du Président de la République, Rezak Bara.
Appelé à donner plus de précisions sur la vente d’équipements américains à l’armée algérienne, Mc Millan dira simplement que « les forces aériennes algériennes sont habituées à l’utilisation des avions américains. Mais jusqu’à maintenant, nous sommes au stade des questions techniques. Nous devons aborder d’abord les exigences en la matière pour arriver à l’achat de ces équipements».
UN PROGRAMME MILITAIRE SUR «LE LONG TERME»
Interrogé sur «les étapes concrètes» de la coopération entre les deux pays, l’assistant à la Défense et aux Affaires de sécurité internationales a précisé qu’il préfère se limiter au côté stratégique, en notant que «le dialogue entre les deux pays est basé sur des sous-comités et une sous-commission dont la charge est la formation, les équipements, les exercices militaires».
Il annonce la programmation d’un exercice militaire le 22 novembre prochain et d’un autre qui commencera à partir de 2011 dans la région de la Méditerranée». Programme qui concerne aussi les autres pays de la région. Les militaires algériens pourront aussi participer à des exercices militaires qui se dérouleront aux Etats- Unis. Pour ce qui est de la coopération sécuritaire, il indique qu’«il y a des formations et des technologies dont a besoin le gouvernement algérien.
On a discuté sur des points techniques afin de déterminer les besoins de l’Algérie et les moyens de les satisfaire». La coopération militaire et sécuritaire est programmée sur trois ans, «sur le long terme», et a, dit-il «un côté technique et un autre d’expertise». Pour lui, «l’Algérie est un pays important et vital dans la région de la Méditerranée.
C’est la réalité. Notre relation est de longue date, nous souhaitons qu’elle se développe pour être plus productive». A la question «Al-Qaïda est-elle une création américaine ?», Mc Millan répond : «Il y a des millions de familles de par le monde et aussi en Algérie qui savent qu’Al-Qaïda n’est pas une fabrication américaine mais une réalité.
Si on pense que notre soutien aux Moudjahidine en Afghanistan dans les années 80 a permis sa création, je dis non, il n’a donné lieu à sa création ni indirectement ni implicitement»… Ce qui se passe au Sahara Occidental lui fera dire que «nous pensons que la situation devait être résolue depuis longtemps. Nous soutenons les efforts du représentant du SG de l’ONU et sommes prêts à soutenir toute initiative ou solution au conflit».
Par ailleurs, le siège de l’Africom sera, selon lui, maintenu en Allemagne. «Nous n’avons aucune intention de le changer. Nous avons quelques membres du Congrès américain qui demandent de déplacer ce siège aux Etats-Unis, mais personne n’a l’intention de le faire,» a-t-il affirmé.
Ghania Oukazi