Il ne se passe pas une semaine sans que des parents de harraga ne manifestent devant le consulat général de Tunisie à Annaba. Ils réclament sans cesse des autorités tunisiennes des nouvelles
de leurs proches emprisonnés en Tunisie.
Emportés par le mal-vivre et le désir de se frayer un chemin vers un avenir meilleur, des dizaines de jeunes qui avaient choisi, au péril de leur vie, de traverser la Méditerranée dans la clandestinité vers les côtes italiennes sont, selon l’avis des membres de leurs familles, emprisonnés dans les geôles tunisiennes.
Aujourd’hui, les familles de ces harraga disparus n’ayant eu aucun écho, encore moins une intention des autorités publiques de prendre en charge les opérations de recherches afin de les rassurer, du meilleur ou du pire, sur le sort de leur progéniture, se sont organisés au sein d’une association à même de leur permettre une opération commune pour la recherche de leurs enfants.
Cette initiative est survenue, selon des pères ou des mères de harraga, suite à l’inefficacité des démarches de recherches isolées opérées par chaque famille. C’est pourquoi, estimant que l’union fait la force, ils se sont mobilisés au sein de cette association pour mieux coordonner leurs recherches. Une tâche des moins faciles.
Car, accéder à des informations dans un territoire étranger n’est pas évident, encore moins en Tunisie, pays frère, où des dizaines de harraga croupissent dans les prisons de cet Etat qui, sans doute pour des raisons sécuritaires parce que frappé de plein fouet par la horde terroriste, n’a pas jugé nécessaire d’avertir les services sécuritaires algériens sur des « cas de harraga surpris dans des barques en dérive dans les eaux territoriales tunisiennes, comme le stipule le droit international « .
Selon les informations recueillies auprès de plusieurs familles de ces harraga, des dizaines de jeunes Algériens, n’ayant pas réussi leur « traversée », se trouvent dans la prison de Tabarka, en Tunisie.
Pour exemple, « la harga » tentée en janvier dernier par des jeunes Algériens dont l’âge varie entre 18 et 32 ans, et qui avait tourné à l’échec, a été suivie par plusieurs sit-in devant le Consulat général de Tunisie à Annaba pour exiger la libération de ces harraga et leur retour en Algérie.
A la question de savoir si elles détiennent des preuves que leurs proches se trouvent bel et bien emprisonnés en Tunisie, les familles de ces harraga sont formelles : « Nous avons des familles qui se trouvent en Tunisie, qu’elles soient de nationalités algérienne ou tunisienne, qui nous ont informés que nos proches sont emprisonnés en territoire tunisien « .
Pour rappel, ces derniers harraga, ayant pris le large le 31 janvier 2016 vers minuit depuis la plage de Seraïdi, à bord d’une embarcation de fortune à destination de la Sardaigne, en Italie, avaient fait une halte sur une côte tunisienne pour alléger leur embarcation du moteur qui les a lâchés en cours de traversée.
De peur de se faire repérer par les gardes-côtes tunisiens, les clandestins suivront la lumière d’un phare qui apparaît par intermittence depuis les côtes tunisiennes.
Sans boussole, ils dérivent ainsi pendant trois jours, épuisés, pour être interceptés par les gardes-côtes tunisiens. Ils seront placés en prison en attendant qu’ils soient jugés.
C’est suite à un coup de fil d’un proche installé à Tabarka que la tourmente qui ronge la famille prend fin. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre pour faire l’événement dans toute la wilaya d’Annaba ; car il convient de rappeler que le phénomène de l’émigration clandestine touche plus de 50% des familles annabies.
Reçues une énième fois par les diplomates du Consulat général de Tunisie, la dernière remonte à au moins une semaine, les parents des harraga ne sont pas satisfaits des réponses de la représentation consulaire.
« Ils nous disent à chaque fois que des enquêtes sont en cours, qu’il nous faut patienter et vous connaissez la situation que traverse la Tunisie « , nous ont déclaré d’une voix unanime les familles des harraga.
Aujourd’hui, le feu est dans la demeure et les familles des disparus et des détenus interpellent les instances gouvernementales à s’impliquer davantage pour les aider à aller outre ce blackout sur le sort de leurs enfants.