Dépénalisation du délit de presse,Les journalistes paieront 75 millions de centimes

Dépénalisation du délit de presse,Les journalistes paieront 75 millions de centimes

Le projet du gouvernement veut commuer la peine d’emprisonnement des journalistes en une amende de 750.000 dinars (75 millions de centimes).

Le projet de dépénalisation du délit de presse a été débattu, jeudi dernier, à l´APN lors d´une séance consacrée aux projets d´amendement du Code pénal et de la loi relative à la lutte contre la corruption.

A la surprise générale, le projet proposé par le gouvernement peut s´avérer comme un grand leurre. En effet, ce projet veut commuer la peine d´emprisonnement des journalistes en une amende de 750.000 dinars (75 millions de centimes). Bien sûr que les députés qui ont intervenu dans le cadre des débats, ont certes, demandé l´allègement de l´amende. Cette dernière s´apparente à une «privatisation» de l´acte d´écrire.

Si donc les propositions du gouvernement sont retenues, critiquer deviendra une affaire d´argent. Il va falloir donc investir et économiser 75 millions de centimes avant d´oser une critique qui pourrait, ensuite, être interprétée par des «incultes» comme étant une injure, un outrage ou une diffamation.

Cela est d´autant plus grave que les anciens articles concernant le délit de presse, ajoutés en 2001 au Code pénal, avaient été instaurés dans le but et l´intention de museler et de nuire à la presse. La dépénalisation actuelle est faite pour justement, réparer et libérer cette même presse. Mais apparemment, entre les apparences et la réalité, il y a un vide à combler. A moins que les députés n´obligent le gouvernement à alléger la peine pour instaurer une amende symbolique.

L´article 144 bis est, en effet, ainsi reformulé: «Est puni d´une amende de 150.000 DA à 750.000 DA toute personne qui offense le président de la République par une expression outrageante, injurieuse ou diffamatoire, que ce soit par voie d´écrit, de dessin, de déclaration, ou de tout autre support de la parole ou de l´image, ou que ce soit par tout autre support électronique, informatique ou informationnel. Les poursuites pénales sont engagées d´office par le ministère public. En cas de récidive, l´amende est portée au double.»

L´article 146 de ce projet d´amendement stipule, lui, que «l´outrage, l´injure ou la diffamation commis par l´un des moyens énoncés à l´article 144 bis envers le Parlement ou l´une de ses deux chambres, les juridictions ou envers l´Armée nationale populaire, ou envers tout corps constitué ou toute autre institution publique, sont punis à des peines prévues à l´article ci-dessus (144 bis)».

Le texte abroge carrément l´article 144 bis 1 qui sanctionne à la fois l´auteur de l´article «diffamatoire», la publication et ses responsables. Le journaliste est donc seul responsable de ses écrits. Tant mieux pour l´éthique.

Cela étant, le ministre de la Justice, Tayeb Belaïz, a affirmé lors de la même séance que la dépénalisation des délits de presse consacre le progrès enregistré en matière des droits de l´homme et de renforcement des libertés. M.Belaïz a indiqué que la dépénalisation des délits de presse procède du fait que la presse est un droit d´expression garanti par la Constitution et consacré par le traité international sur la protection des droits civiques et politiques.