C’est le cafouillage total sur le sort du président égyptien, Mohamed Morsi, à moins de 24 heures de l’expiration de l’ultimatum lancé par l’armée lui laissant 48 heures pour satisfaire les «demandes du peuple». Un ultimatum qu’il a rejeté implicitement, alors que les appels pour la continuité des manifestations de masse se multiplient et des démissions en cascade sont enregistrées.
Le ministre égyptien des Affaires étrangères Mohamed Kamel Amr a présenté dans la nuit de lundi à mardi sa démission, une démission qui s’ajoute à celles des cinq ministres qui ont présenté ensemble leur démission au Chef du gouvernement, Hichem Quandil, selon l’agence de presse égyptienne Mena. En outre, un porte-parole de la présidence égyptienne, Ehab Fahmi, et le porte-parole du gouvernement Alaa al-Hadidi, ont remis leur démission hier au Premier ministre.
D’autres informations font état de démission de 12 membres du gouvernement en plus du porte- parole de la présidence égyptienne alors que le départ du Premier ministre, Hichem Quandil n’est pas encore confirmé sans oublier cinq membres du Conseil de la Choura, ou chambre haute du Parlement égyptien, qui avaient annoncé leur démission, citant l’échec de Morsi à soumettre des solutions à la crise politique du pays.
C’est une vraie hémorragie dans le gouvernement de Hicham Quandil. Ces démissions en cascade interviennent après quelques heures du rejet implicite de la présidence égyptienne de l’ultimatum lancé par l’armée lui laissant 48 heures pour satisfaire les «demandes du peuple».
Morsi rejette l’ultimatum de l’armée
Dans un communiqué de la présidence égyptienne, datant d’hier, celle-ci affirme que «la déclaration des forces armées n’a pas été soumise au président» avant sa diffusion et contient «des signes pouvant causer la confusion», se disant déterminée «à poursuivre dans la voie qu’elle a choisi pour mener une réconciliation nationale globale». La présidence de Morsi dénonce «toute déclaration qui approfondirait la division» dans le pays déjà profondément divisé et qui «pourrait menacer la paix sociale».
La même source estime que M. Morsi «poursuit ses consultations avec toutes les forces nationales afin de sécuriser la voie du changement démocratique et la protection de la volonté populaire».
Dans ce cadre, il a été ajouté que «l’Etat démocratique égyptien civil est une des plus importantes réalisations de la révolution du 25 janvier 2011» qui a renversé l’ancien président Hosni Moubarak, souligne le texte, affirmant que «l’Egypte ne permettra absolument aucun retour en arrière quelles que soient les circonstances».
Dans un message lu lundi dernier à la télévision, les forces armées ont menacé d’imposer «une feuille de route pour l’avenir du pays et des mesures pour superviser sa mise en œuvre» si le président faillit à sa tâche. Toutefois, le rejet de l’ultimatum de l’armée égyptienne par Morsi intervient au moment où le mouvement «Tamarod» ne lâche pas et appelle à des manifestations de masse devant les deux Palais d’«Elitihadiya», alors que du côté du gouvernement, les démissions se multiplient.
Sur le terrain, les partisans du président islamiste se rassemblaient en masse hier en début d’après-midi à travers le pays, tandis que l’opposition se mobilisait également pour continuer d’exiger son départ. Lundi soir, à la place Tahrir, au Caire, des manifestants se sont rassemblés dans le calme pour saluer la décision de l’armée d’intervenir dans la crise.
Pour nous, «l’armée s’est rangée aux côtés du peuple», a estimé le mouvement Tamarod, à l’origine de manifestations monstres dimanche. Au moins 16 personnes ont été tuées dans tout le pays en marge des manifestations. Des affrontements similaires avaient déjà fait huit morts la semaine dernière. Dans ce contexte, le président américain Barack Obama a invité «toutes les parties à faire preuve de retenue», appelant M. Morsi pour lui faire part de son inquiétude, affirme la Maison-Blanche.
Il a demandé au gouvernement égyptien d’accélérer la mise en place des réformes démocratiques et de travailler avec l’opposition pour trouver une solution pacifique à la crise, soulignant que l’aide américaine au Caire dépendait de tels critères. A Paris, on juge la situation en Egypte «inquiétante». «Chacun ne peut souhaiter que le retour au calme, le maximum de sang-froid de la part de chacun des acteurs», a déclaré un conseiller du président François Hollande, qui se rend jeudi et vendredi en visite d’Etat en Tunisie.
Pour Moscou, la situation tendue qui règne en Egypte doit être réglée dans le cadre du droit et sans recours à la violence, lit-on mardi dans un communiqué de la diplomatie russe. L’Iran a appelé l’armée égyptienne à respecter «le vote des électeurs» après l’ultimatum des militaires donné au président Mohamed Morsi pour satisfaire les «demandes du peuple», à la suite de manifestations réclamant son départ, a rapporté mardi l’agence officielle Irna.
Par Nacera Chennafi