Délinquance juvénile Elèves et violence : dangereuse connexion

Délinquance juvénile Elèves et violence : dangereuse connexion

Les actes de violence ne sont plus du domaine des adultes. Ils sont de plus en plus jeunes à s’y adonner, ce qui laisse supposer un nouveau phénomène que la société devra savoir gérer pour éviter qu’il ne se transforme en un fléau difficile à contrer. Le plus terrible est que même les élèves n’échappent pas à cette dangereuse connexion.

A Oran par exemple, certaines affaires mettent en cause des élèves (des lycéens et des collégiens). C’était le cas dans un lycée qu’on dit fréquenté «par des adolescents issus de la classe sociale au niveau de vie confortable». Dans cette affaire, un élève, impliqué dans une bagarre, a été appréhendé, écroué et jugé au pénal et cela a suscité une réaction de ses camarades qui ont manifesté à Oran et observé un sitin devant le siège de la Direction de l’éducation pour exiger sa libération.

Ces élèves ont même bénéficié du soutien de quelques enseignants qui ont estimé que «l’incarcération de ce jeune allait perturber sa scolarité et faire de lui un futur délinquant prêt à tous les coups tordus». Pour d’autre il s’agissait là d’un argument qui n’est pas justifiable, même si les enseignants estimaient que le mis en cause allait côtoyer nécessairement, dans la maison d’arrêt, des multirécidivistes qui feraient de lui un «bon» disciple, prêt à commettre les pires crimes. Un pédagogue sollicité pour ses travaux liés à la délinquance en milieu scolaire explique le phénomène par le changement de modèle et la quête de la personnalité en phase d’adolescence.

«L’élève qui s’identifiait jadis à son enseignant découvre aujourd’hui que son modèle n’a plus l’image valorisante qu’il véhiculait. L’enseignant vit, aujourd’hui, des problèmes sociaux qui ne lui permettent plus de jouer ce rôle. L’enfant privé de modèle recherche alors des substituts dans son entourage et s’identifie à des personnages violents rencontrés au détour des jeux que lui offrent ses consoles de jeu», fait-il remarquer. Des avocats rencontrés feront part quant à eux de tares dans la perception des notions de majorité pénale et civile.

Pour eux, la majorité pénale commence à partir de 17 ans. «L’adolescent est responsable pénalement de ses actes. Il doit en répondre devant un juge des mineurs qui peut prononcer l’emprisonnement, le verdict étant laissé à son appréciation. La majorité civile ou légale est fixée à 18 ans, mais cela n’empêche pas un magistrat de prononcer un verdict en fonction de la gravité des faits reprochés à un adolescent», expliquent- ils. L’autre fait gravissime lui aussi et qui renseigne sur le glissement de la société dans une nouvelle forme de violence s’est déroulé dans l’un des paisibles quartiers d’El Bahia. Une jeune femme a été attaquée par deux individus qui voulaient lui subtiliser son sac à main.

La malheureuse n’a dû son salut qu’au passage d’une personne qui a pu faire fuir l’un des assaillants et appréhender le second. Confié à la sûreté urbaine, le délinquant a été identifié comme étant un collégien, poursuivant ses études dans l’un des CEM de la capitale de l’Ouest et son complice, un lycéen. Comble de l’ironie, la mère du collégien est une enseignante dans un établissement du cycle secondaire à Oran. Cette dernière suppliera la victime pour qu’elle retire sa plainte. «Sa mère est venue me voir pour retirer la plainte, mais j’ai refusé. C’est à elle d’assumer les actes de son fils. Elle est enseignante, elle aurait dû éduquer convenablement son enfant au lieu de le laisser vadrouiller en ville. Ce n’est pas à moi de lui montrer le droit chemin», dira-telle.

ET LE RÔLE DE L’ÉCOLE ?

De l’avis d’un grand nombre d’observateurs, l’école algérienne n’assume plus son rôle d’éducation. Les réseaux de trafic de drogue et de petite délinquance utilisent des bras de plus en plus jeunes dans leurs trafics. Ces délinquants, parfois encore au stade de l’enfance, au contact de la rue sont une cible facile pour les caïds de la drogue et autres. D’ailleurs les brigades de protection des mineurs en danger moral, aussi bien de la Gendarmerie nationale et la police, ont tiré depuis longtemps la sonnette d’alarme contre le phénomène et leurs mises en garde ne semblent pas encore être prises en considération.

CAUSES ET SOLUTIONS…

La violence à l’école, c’est bien connu, demeure depuis quelques années, une préoccupation réelle dans les milieux scolaires du monde entier. Les écoles ont besoin de travailleurs professionnels pour donner aux élèves les moyens de traduire la réalité qu’ils vivent autrement que par la violence. Il est impératif que les écoles se dotent de moyens pour ralentir la problématique de la violence chez les jeunes. L’école a un rôle clé dans ce phénomène.

Pourtant, le milieu scolaire ne peut travailler seul à ce ralentissement. La société doit-elle aussi faire sa part pour enrayer la violence, puisque dans bien des cas la violence dans les écoles a souvent son origine à l’extérieur. L’ENVIRONNEMENT SOCIAL Les enfants qui sont aujourd’hui dans les écoles sont nés dans les années connues pour de profondes déchirures sociales, causées par les années de crise économique. Leurs parents ont donc connu le chômage et l’angoisse de l’avenir et sont tombés dans l’exclusion et la marginalisation. Ceci a beaucoup de conséquences sur les élèves qui ramènent à l’école leurs problèmes ainsi que leurs différentes manières de résoudre, à savoir les vols, le chantage… etc.

La violence provient également du milieu dans lequel vit l’adolescent, c’est à dire ses conditions de vie. L’adolescent peut habiter des banlieues, des régions défavorisées, des cités mal reliées, mal équipées, mal conçues. Cet urbanisme a donné lieu à de nouvelles formes de ségrégation (surtout dans des zones à forte immigration) qui pèsent énormément sur la vie du système éducatif. L’environnement familial reste un facteur important dans la stabilité de l’adolescent, particulièrement la présence du père et de la mère ainsi que leur situation maritale. La violence est plus fréquente chez l’adolescent monoparental. Aussi, le milieu familial a une grande responsabilité par rapport à l’apprentissage de la violence. Il y a différentes formes de violence véhiculées dans la famille, soit violence physique, verbale et psychologique.

L’EFFET PSYCHOLOGIQUE

L’adolescence qui apparaît comme une phase cruciale du développement de la personne dans la mesure où elle va fournir l’organisation de la future personnalité adulte se caractérise par des transformations physiques et psychiques et qui ont des répercussions sur le comportement de l’adolescent. Celui-ci oscille perpétuellement entre des sentiments ambivalents, entre une révolte et une passivité, sentiment d’infériorité et de dégoût de soi, sentiment de surpuissance, timidité et insolence. Mais ce qui marque le plus l’adolescent c’est l’agressivité (opposition aux parents, aux enseignants) qui semble ainsi liée non seulement à des besoins ou pulsions innées et à des frustrations, mais également à des besoins secondaires plus spécifiques à cet âge: montrer et exercer ses capacités, susciter le respect des autres, gagner son indépendance vis-à-vis des adultes.

COMMENT FAIRE FACE AU PHÉNOMÈNE?

La création d’un service social qui recouvre l’ensemble des jeunes scolarisés, en premier lieu dans les établissements du second degré (collèges, lycées) et qui est chargé d’apporter écoute, conseils et soutiens aux élèves pour favoriser leur réussite individuelle et sociale. La mise en place d’un SAMU scolaire de proximité composé d’une équipe pluridisciplinaire (psychiatre, psychologue, sociologue, médecin généraliste, assistante sociale, éducatrice…) conjugue leurs efforts en intervenant dans le milieu familial et scolaire.

Ce SAMU a pour mission d’assurer auprès des élèves une assistance éducative et de soutien. Mettre en place des structures appropriées pour la prise en charge, telles des cellules d’écoute au niveau de l’hygiène scolaire qui visent à aider les élèves à reconnaître différentes formes de violence en eux-mêmes et chez les autres à compatir avec l’élève à prévaloir et à comprendre les conséquences d’un acte violent à explorer et à mettre en pratique des solutions de rechange à la violence.

Encourager les activités parascolaires comme le sport, les arts, la musique, le théâtre, la production de bulletins scolaires sont l’occasion pour les adolescents de participer à des activités de groupe constructive par le biais desquelles ils gagnent une certaine reconnaissance. S’efforcer d’améliorer le cadre scolaire y compris en changeant les méthodes pédagogiques, le règlement scolaire et former correctement les enseignants sur le plan éducatif et psychologique. Etablir des programmes de formation au rôle des parents qui visent à améliorer les relations familiales et les techniques d’éducation des enfants et ainsi à réduire la violence chez les adolescents.

Mehnane A.