Si l’ordre mondial en pleine recomposition est une source de défis, il permet d’offrir des opportunités pour le Sud Global, les BRICs et l’Algérie pour peu que des stratégies appropriées soient mises en place.
L’’ordre international est en pleine mutation, fragilisĂ© par l’Ă©rosion des forces unificatrices telles que le commerce mondial et l’intĂ©gration financière, sous l’effet de la fragmentation gĂ©opolitique et gĂ©oĂ©conomique.
Dans ce contexte, le concept de Sud Global (inclusion faite des pays composant les BRICs, autrefois perçu comme un terme unificateur pour les pays les moins riches traverse une phase difficile en matière de recherche d’autonomie stratĂ©gique et de pouvoir de nĂ©gociation Ă court et moyen terme au vu d’un nombre de dĂ©fis croissants : chocs externes frĂ©quents, fragmentation Ă©conomique, pressions gĂ©ostratĂ©giques et avancĂ©es technologiques telles que l’intelligence artificielle.
De plus, la militarisation des flux commerciaux et d’investissement, le recul de l’État de droit au niveau de certaines grandes dĂ©mocraties pays avancĂ©s et le manque de plateforme commune entre les pays membres du Sud Global entravent leur dĂ©veloppement.
En outre l’affaiblissement des institutions multilatĂ©rales rĂ©duit l’efficacitĂ© des mĂ©canismes de soutien mondiaux. ​Le potentiel du Sud Global Ă acquĂ©rir un avantage gĂ©opolitique et Ă©conomique est donc limitĂ© et l’idĂ©e d’un Sud Global unifiĂ© reste une notion trop idĂ©aliste dans le monde fragmentĂ© actuel.​
Un tel contexte obligera de nombreux pays Ă faire des choix difficiles, et seuls quelques-uns, comme le BrĂ©sil, l’Inde, l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis, auront la capacitĂ© de relever ces dĂ©fis de manière indĂ©pendante.
Pour d’autres, la fragmentation de l’ordre international va favoriser au mieux des « coalitions de circonstance » temporaires si ce n’est la marginalisation pour d’autres.
Au lieu d’attendre que les menaces se dissipent ou de s’appuyer sur de nouvelles coalitions non viables, les pays individuels doivent mettre en Ĺ“uvre des ajustements politiques opportuns, renforcer la rĂ©silience financière et amĂ©liorer l’agilitĂ© pour rĂ©pondre aux chocs extĂ©rieurs dĂ©favorables.
Cela est vital dans un monde qui abandonne la prĂ©somption de convergence mondiale et fait face Ă un creusement des divisions croissantes entre les nations avancĂ©es et les nations moins riches, ainsi qu’une plus grande divergence au sein de ce dernier groupe.
L’AlgĂ©rie, comme d’autres nations du Sud Global, se situe dans cet ordre international en mutation. Elle doit reconnaĂ®tre la nĂ©cessitĂ© d’ajustements politiques opportuns et de rĂ©silience aux chocs extĂ©rieurs, qu’ils soient Ă©conomiques ou politiques, pour gagner en puissance Ă©conomique et jouer un rĂ´le sur la scène internationale. Discutons de ces points.
Qu’est-ce que le Sud Global ?
EntitĂ© vaste et diversifiĂ©e, regroupant des nations aux niveaux de richesse, d’influence et d’aspirations considĂ©rablement diffĂ©rents. Cette hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© fondamentale se manifeste par des intĂ©rĂŞts divergents et des approches multiples en matière de politique Ă©trangère.
Si certains pays (IndonĂ©sie) privilĂ©gient une position de non-alignement (IndonĂ©sie, cherchant Ă Ă©quilibrer leurs relations avec les grandes puissances, a contrario d’autres, nation affichent un alignement inconditionnel sur certaines grandes puissances, reflĂ©tant des choix stratĂ©giques distincts.
L’Inde, de son cĂ´tĂ©, navigue entre sa solidaritĂ© historique avec les nations postcoloniales et son ambition de devenir une puissance militaire de premier plan, en collaborant souvent avec les États-Unis pour renforcer sa position mondiale et agir comme un contrepoids face Ă l’influence croissante de la Chine. ​Cette dernière s’impose de plus en plus en alternative aux Etats-Unis.
Loin d’être un bloc monolithique, le Sud Global est dĂ©sormais un ensemble complexe de nations aux trajectoires et aux intĂ©rĂŞts multiples, façonnant un paysage gĂ©opolitique en constante Ă©volution. Difficile de peser ainsi sur l’échiquier international.Â
Le Sud Global et les BRICs ont influencé les structures mondiales de gouvernance politique et économique au cours des trois dernières décennies.
Dans ce contexte, ils ont contribué à façonner un ordre international plus équilibré et juste en plaidant pour des systèmes plus inclusifs et équitables, notamment dans les domaines économique, social et environnemental.
MalgrĂ© des obstacles importants, ils ont su habilement exploiter les pĂ©riodes de coopĂ©ration et d’engagement institutionnel des Etats-Unis sous les prĂ©sidences Clinton, Bush et Obama alternant avec des interventions et un certain mĂ©pris du droit international, particulièrement après les attentats du 11 septembre. L’action du Sud Global et des BRICs ont ainsi permis :
Le désarmement et le développement pacifique de l’énergie nucléaire
Dans les annĂ©es 1960, la volontĂ© des États-Unis et de l’Union soviĂ©tique de limiter la prolifĂ©ration nuclĂ©aire a conduit Ă la signature du TraitĂ© de non-prolifĂ©ration (TNP) en 1968. Bien que ce traitĂ© favorise les États dotĂ©s de l’arme nuclĂ©aire, l’action du Sud Global a aussi dĂ©bouchĂ© sur le dĂ©sarmement et l’encouragement du dĂ©veloppement pacifique de l’Ă©nergie nuclĂ©aire dans les pays moins puissants.
Un certain partage de la gouvernance politique malgré de nombreux défis
A travers le renforcement du multilatĂ©ralisme et des organisations internationales, notamment au sein des Nations Unies et par le biais du Mouvement des Non-AlignĂ©s (MNA), du G77 et de l’Union Africaine (UA).
Le Sud Global a militĂ© pour une reprĂ©sentation plus Ă©quitable dans des institutions comme le Conseil de sĂ©curitĂ© de l’ONU et a poussĂ© pour des rĂ©formes afin de mieux reflĂ©ter l’ordre mondial en Ă©volution. Parallèlement, le MNA a pesĂ© de tout son poids pour promouvoir la dĂ©colonisation et l’Ă©galitĂ© raciale.
La promotion de la paix et de la sécurité mondiale
en particulier Ă travers des organisations rĂ©gionales comme l’UA et l’ASEAN, qui ont menĂ© des missions de maintien de la paix et des efforts diplomatiques.
Le renforcement de la santé mondiale
en plaidant pour un meilleur accès aux vaccins et aux traitements, en particulier pendant la pandémie de COVID-19, défiant le nationalisme vaccinal et revendiquant la levée des brevets pour garantir que les pays en développement ne soient pas laissés pour compte.
La promotion de systèmes économiques mondiaux plus équitables
en plaidant pour la réduction des barrières commerciales et la promotion du commerce équitable. Les efforts pour alléger les fardeaux de la dette et créer des mécanismes financiers axés sur les besoins de développement, comme l’accent mis par la Banque mondiale sur la réduction de la pauvreté et la Nouvelle Banque de Développement, ont contribué à ces objectifs.
Par ailleurs, les pays du Sud Global ont progressivement formé des alliances pour accroître leur influence dans les instances internationales. La crise financière de 2008 a accentué ce déplacement du pouvoir mondial, donnant plus de poids aux économies émergentes et faisant du G20 le principal forum économique, en remplacement du G7 (mis en place en 1975 a l’initiative de Giscard d’Estaing).
La progression des droits de l’homme et de la justice sociale
notamment sur des questions telles que la lutte contre la pauvretĂ©, l’Ă©galitĂ© des genres et l’accès Ă l’Ă©ducation et aux soins de santĂ©. Ă€ travers des plateformes comme le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, ils ont veillĂ© Ă ce que les droits des populations marginalisĂ©es soient pris en compte.
Un meilleur soutien financier pour combattre le changement climatique
en soulignant l’impact disproportionnĂ© de la dĂ©gradation de l’environnement sur les pays les plus pauvres et exigeant que les nations les plus riches assument la responsabilitĂ© de leurs Ă©missions historiques. Leurs efforts ont contribuĂ© Ă l’Accord de Paris, notamment en obtenant un soutien financier pour les pays en dĂ©veloppement afin de lutter contre le changement climatique.
Parallèlement, le Sud Global prenait note de l’ascension de la Chine comme puissance Ă©conomique et gĂ©opolitique majeure et des nouvelles perspectives que cela ouvrait aux pays du Sud, Ă travers des prĂŞts et des investissements en Ă©change de ressources naturelles. Cette influence croissante a toutefois suscitĂ© des inquiĂ©tudes quant Ă un possible nĂ©ocolonialisme et Ă une Ă©volution d’une logique de partenariat vers une attitude hĂ©gĂ©monique, notamment en Asie du Sud-Est.
Le Sud Global et les BRICs font face à une multitude de défis du fait de la mutation de l’ordre international
Leurs faiblesses internes
malgré une hausse de leur influence mondiale, ils sont confrontés à d’importantes faiblesses économiques, politiques et sociales. Sur le plan économique, nombre d’entre eux sont aux prises avec l’endettement, la faiblesse de leurs institutions et la dépendance vis-à -vis des matières premières.
Sur le plan politique, ils sont aux prises avec des problèmes de gouvernance et la corruption, des conflits internes et des tensions au sein des BRICS en raison de rivalités politiques et de relations divergentes avec l’Occident.
Sur le plan social, ils sont confrontés à des niveaux de vie inférieurs, à des inégalités et à des différences culturelles qui entravent le progrès unifié et créent des obstacles aux droits de l’homme et au développement durable. Enfin, l’un des principaux défis majeurs est l’absence d’un programme unifié ou commun entre ces nations, ce qui complique encore davantage leur capacité à remédier efficacement à leurs faiblesses internes.
La montée de l’extrême droite
alimentĂ©e par le conservatisme radical, l’ultranationalisme, l’autoritarisme et des idĂ©ologies telles que le nĂ©ofascisme, le racisme et la xĂ©nophobie, la montĂ©e de l’extrĂŞme droite, est un phĂ©nomène prĂ©occupant. Historiquement, cette mouvance a souvent eu recours Ă la violence et Ă l’oppression.
De nombreux facteurs, tels que l’insĂ©curitĂ© Ă©conomique, la dĂ©sintĂ©gration sociale, l’inĂ©galitĂ© Ă©conomique, la corruption et l’extrĂ©misme religieux, contribuent Ă sa montĂ©e.
L’extrĂŞme droite intensifie la polarisation politique, menace les normes dĂ©mocratiques et promeut des discours xĂ©nophobes. Son impact sur le Sud Global se manifeste notamment par des sentiments anti-immigrĂ©s et anti-mondialisation, ce qui perturbe les relations internationales, notamment celles liĂ©es aux migrations, Ă l’aide au dĂ©veloppement et aux accords commerciaux.
En outre, la montĂ©e de l’autoritarisme et du nationalisme dans certains pays du Nord Global pourrait encourager des rĂ©gimes similaires dans le Sud Global, menaçant ainsi la dĂ©mocratie et les droits humains dans ces rĂ©gions. Cela pourrait Ă©galement compliquer la rĂ©solution des dĂ©fis mondiaux urgents, tels que la lutte contre le changement climatique et la pauvretĂ©.
Les tensions géopolitiques
actuelles affectent de nombreuses régions et sont alimentées par l’instabilité économique, les conflits territoriaux et les divisions idéologiques. La guerre en Ukraine continue de mettre à mal la stabilité mondiale et a ouvert la voie à de multiples sanctions et de changements d’alliances.
Dans le même temps, la rivalité entre les États-Unis, la Chine et la Russie s’intensifie, en particulier dans des domaines tels que le commerce, l’influence militaire et la technologie.
Les conflits régionaux, associés aux effets persistants de la pandémie de COVID-19, du changement climatique et des pénuries d’énergie, déstabilisent davantage les relations internationales et approfondissent les divisions au sein des pays et entre eux.
Le ralentissement de l’activité économique mondiale et des échanges commerciaux internationaux
La croissance mondiale devrait rester stable Ă 3,3 % cette annĂ©e et l’annĂ©e prochaine, avant de ralentir Ă un peu plus de 3 % au cours des cinq prochaines annĂ©es, un niveau bien en dessous de la moyenne historique.
Pour les pays du Sud global, la croissance devrait rebondir à environ 3,6 % en 2025, soutenue par la reprise de secteurs clés et une réduction des conflits régionaux.
Les perspectives Ă moyen terme pour le Sud Global restent globalement dĂ©favorables, avec une croissance Ă©conomique en deçà des niveaux d’avant la pandĂ©mie, la reprise de l’inflation dans certains pays (ouvrant la voie Ă une divergence des taux d’intĂ©rĂŞt avec leur partenaires et la hausse de leurs coĂ»ts d’emprunt), une hausse de la dette publique (du fait de divers chocs Ă©conomiques survenus au cours des dernières annĂ©es) et le risque de dĂ©clencher un cycle de faible croissance et de forte dette.
C’est dans un tel environnement aggravĂ© par la rĂ©volution technologique de l’IAG que le Sud Global doit prendre en charge de nouvelles dĂ©penses pour affronter de multiples dĂ©fis structurels (crĂ©ation d’emplois, filets de sĂ©curitĂ© sociale, dĂ©mographie en hausse, changement climatique, sĂ©curitĂ© nationale et diversification Ă©conomique) alors que le commerce n’est plus le moteur de croissance qu’il Ă©tait autrefois vu que sa progression suit un rythme Ă peu près Ă©quivalent Ă celui du PIB.
A charge pour le Sud Global de réajuster ses priorités politiques face à un monde qui se transforme rapidement et qui imposent aux économies d’être agiles, adaptables et résilientes, vecteurs du succès futur.
La fragmentation géoéconomique
croissante est source de risques importants pour les pays du Sud Global et les BRICS. Les mĂ©canismes traditionnels de coopĂ©ration et d’intĂ©gration Ă©conomique sont Ă©rodĂ©s par un protectionnisme croissant, des restrictions commerciales et des tensions gĂ©opolitiques.
Pour le Sud Global, qui a toujours cherché à affirmer une plus grande influence et un accès équitable aux ressources mondiales, cette fragmentation menace de compromettre les progrès.
Alors qu’ils s’efforcent d’étendre leur influence et de redéfinir l’ordre mondial, les BRICs ces pays doivent faire face à la complexité des intérêts concurrents des grandes puissances, à un accès limité aux marchés et à une instabilité mondiale croissante.
Les risques de marginalisation ou de fragmentation au sein même des BRICS pourraient entraver leur capacité à tirer pleinement parti de leur potentiel collectif et des opportunités de croissance économique.
La réorientation de la politique économique des États-Unis sous Trump
L’augmentation des droits de douane, le retrait des accords environnementaux mondiaux et les déportations massives des immigrés en situation irrégulière auront des implications négatives pour le Sud Global et des BRICs sous forme d’inflation, de hausse des taux d’intérêt et des coûts d’emprunt et d’une aggravation des déséquilibres macroéconomiques.
Les défis du Sud Global sont autant d’opportunités qu’il doit saisir et poursuivre selon les grands axes suivants
Le Sud global doit redynamiser la coopĂ©ration mondiale, saisir les nouvelles opportunitĂ©s Ă©conomiques, se concentrer sur l’essor d’une Ă©conomie de services et plaider pour un système de gouvernance financière internationale plus inclusif afin de relever les dĂ©fis urgents et de renforcer son action dans le contexte mondial actuel. En mettant l’accent sur ces stratĂ©gies, le Sud global peut s’appuyer sur son poids Ă©conomique et politique croissant pour influencer plus efficacement les affaires mondiales, parvenir Ă un dĂ©veloppement durable et garantir que ses intĂ©rĂŞts soient correctement reprĂ©sentĂ©s dans l’ordre mondial. Les axes de travail sont :
La redynamisation de la coopération mondiale
Il est impĂ©ratif de se dĂ©tourner des politiques nationalistes et de l’isolement Ă©conomique pour faire face aux dĂ©fis mondiaux urgents, tels que le changement climatique, les inĂ©galitĂ©s Ă©conomiques et les crises sanitaires​.
Ainsi, les pays du Sud devraient collaborer pour reconstruire et renforcer les systèmes mondiaux de commerce et d’investissement car la mondialisation favorise la prospĂ©ritĂ©, l’Ă©largissement de l’accès aux marchĂ©s et la diffusion des avancĂ©es technologiques.
Ce qui implique des cadres politiques rĂ©flĂ©chis et une coopĂ©ration internationale pour faire Ă©merger une nouvelle forme de mondialisation plus inclusive, durable et Ă©quitable (en Ă©vitant les erreurs des vagues prĂ©cĂ©dentes d’intĂ©gration mondiale) et garantir une croissance et une prospĂ©ritĂ© partagĂ©es.
La saisie des nouvelles opportunités économiques
En 2024, le Sud global reprĂ©sentait 42 % du PIB mondial, 44 % des exportations de marchandises et 65 % des flux d’investissements directs Ă©trangers. Face au ralentissement Ă©conomique mondial, il est important de renforcer la rĂ©silience Ă©conomique et la diversification, d’abord en allant au-delĂ des modèles d’exportation des produits manufacturĂ©s et ensuite en appuyant une action multilatĂ©rale plus forte pour renforcer la coopĂ©ration fiscale, garantir une transition Ă©nergĂ©tique Ă©quitable et bâtir un système financier mondial centrĂ© sur le dĂ©veloppement.
L’appui en faveur d’une économie de services
Le Sud global se dirige de plus en plus vers une Ă©conomie des services, un secteur offrant des opportunitĂ©s de croissance Ă©conomique et de crĂ©ation d’emplois, notamment face au dĂ©clin de l’industrie manufacturière.
Le secteur des services peut non seulement complĂ©ter l’industrie manufacturière, mais aussi ouvrir des perspectives d’exportation directe. Ce qui implique d’augmenter leur part des exportations de services (relativement faible actuellement par rapport aux exportations mondiales) Ă travers le soutien aux petites entreprises, l’investissement dans des technologies adaptĂ©es aux travailleurs peu qualifiĂ©s et l’engagement dans une transition verte favorisant les secteurs Ă forte intensitĂ© de main-d’Ĺ“uvre.
Le déploiement d’efforts pour faire émerger un système de gouvernance financière internationale plus inclusif
afin de renforcer la reprĂ©sentation des pays en dĂ©veloppement dans la gouvernance mondiale. La coopĂ©ration Sud-Sud est essentielle Ă une croissance durable et permet de renforcer les capacitĂ©s institutionnelles et techniques et d’amĂ©liorer le partage de connaissances et d’expĂ©riences. La transformation numĂ©rique offre de nouvelles opportunitĂ©s dans ce sens.
L’Algérie face à un ordre mondial en mutation : une feuille de route pour un ajustement opportun des politiques, une résilience financière et une capacité renforcée de réaction aux chocs extérieurs défavorables
Dans le paysage mondial de plus en plus imprévisible d’aujourd’hui, l’Algérie fait face à des alliances changeantes, des incertitudes économiques et des tensions géopolitiques.
La montĂ©e des puissances Ă©mergentes, associĂ©e Ă la volatilitĂ© des puissances occidentales traditionnelles, prĂ©sentent Ă la fois des opportunitĂ©s et des dĂ©fis pour l’AlgĂ©rie. Pour traverser cette pĂ©riode de turbulences et sortir du modèle de croissance Ă court terme par l’endettement, l’AlgĂ©rie a besoin d’une base plus solide pour un dĂ©veloppement durable.
Le pays doit adopter une approche proactive et stratégique qui garantisse la sauvegarde de ses intérêts nationaux, tout en améliorant sa position sur la scène mondiale.
Cette feuille de route décrit les deux grands piliers du succès de l’Algérie, à savoir la restauration incontournable de la stabilité macroéconomique et des reformes pour diversifier l’output global et les exportations, garants d’un renforcement de la résilience financière et de la capacité de réaction aux chocs extérieurs.
Axe 1 : La restauration incontournable de la stabilité macroéconomique
Les politiques macroéconomiques doivent créer les conditions d’une activité saine, soutenir la compétitivité extérieure et éviter les fluctuations des taux de change réels et la surévaluation réelle. Dans ce contexte, il est important de :
- (i) se doter d’une règle budgĂ©taire destinĂ©e Ă prendre en charge les risques des politiques budgĂ©taires procycliques et orienter l’Ă©pargne budgĂ©taire dans le sens d’une gestion soutenable de la demande ;
- (ii) une politique active de ciblage effectif (de la part de la banque centrale) du taux de change effectif rĂ©el en ligne avec son niveau d’Ă©quilibre ;
- (iii) l’isolation de la liquidité intérieure de celle générée par les hydrocarbures
- (iv) la liaison des augmentations des salaires publics aux améliorations de la productivité. Cela contribuerait à contenir les évolutions défavorables des coûts salariaux unitaires qui entravent la compétitivité.
Axe 2Â : Les mesures structurelles pour la diversification de la production et des exportations au niveau des produits et des destinations.
Un processus complexe et long qui ne peut rĂ©sulter que d’une transformation structurelle de l’économie tirĂ©e par de hauts niveaux de productivitĂ© provenant d’une rĂ©allocation intra et inter sectorielle des ressources, de la rationalisation du rĂ´le de l’État et du renforcement de la gouvernance et la crĂ©ation d’emplois et l’autonomisation des jeunes et des femmes.
En appui de ces objectifs stratégiques et sur la base de nombreuses études internationales, il serait souhaitable d’engager un véritable programme de réformes visant à  :
Renforcer la qualité du capital humain
par le biais d’une amélioration de la qualité des enseignements primaire, secondaire et supérieur pour rehausser la qualité du marché du travail, favoriser la création et in fine soutenir la croissance et les exportations;
Renforcer la gestion institutionnelle des investissements publics :
La transition vers un cadre budgĂ©taire Ă moyen terme sera essentielle pour remĂ©dier aux vulnĂ©rabilitĂ©s budgĂ©taires et aligner les projets d’investissement sur les prioritĂ©s stratĂ©giques du gouvernement ;
Favoriser l’ouverture commerciale
qui permet de s’exposer à la concurrence et d’acquérir un savoir-faire et attirer les IDE ;
Améliorer la qualité des institutions
mesurée par la qualité de la gouvernance (respect des contrats, arbitrage etc.) et le niveau de corruption pour inspirer confiance dans le label Algérie;
Disposer d’infrastructures de qualité
notamment en matière de transports, téléphonie et pénétration internet incontournable pour s’insérer dans le circuit du commerce international électronique ;
œuvrer à l’ouverture du compte de capital à terme
pour mobiliser l’épargne étrangère, notamment sous la forme d’IDE même si ils tendent à se diriger vers des secteurs où les pays ont un avantage comparatif, notamment le secteur minier ;
Développer le secteur financier
pour amĂ©liorer Ă la fois l’accès financier et l’allocation du crĂ©dit entre les secteurs (et entre les entreprises au sein des secteurs);
Mettre en place une politique industrielle
qui s’appuie sur des instruments directs et indirects d’intervention pour renforcer la compétitivité des entreprises à l’exportation et placer l’économie du pays sur le marché mondial.
Par Dr Abdelrahmi BESSAHAÂ
Expert international en macroéconomie et finance