Défendue notamment par le FFS et le PT : Assemblée constituante, une option entre alternative et controverse

Défendue notamment par le FFS et le PT : Assemblée constituante, une option entre alternative et controverse

PAR INES DALI

Comme alternative à la conférence nationale inclusive devant contribuer au règlement de la situation politique qui prévaut dans le pays, le FFS et le PT préconisent la mise sur pied d’une assemblée nationale constituante.

C’est cette dernière, estiment-ils, qui ouvrira la voie à l’instauration d’un Etat de droit démocratique et social et assoira les bases de la 2e République. Des spécialistes en droit constitutionnel ne sont, en revanche, pas du même avis. Que ce soit pour le Front des forces socialistes (FFS) ou pour le Parti des travailleurs (PT), aller vers une assemblée nationale constituante reste une revendication historique et constante pour laquelle ils ont toujours plaidé. Si, par le passé, cette proposition avait été parfois mise au placard et refaisait surface à certaines occasions, telles que la tenue d’élections, il est clair que la conjoncture politique actuelle leur offre une opportunité en or pour la remettre sur le tapis.

Si l’idée générale de cette assemblée constituante est assimilée, les détails de la mise en place et du choix de ses membres ainsi que les mécanismes nécessaires pour sa mise en œuvre restent encore flous pour le commun des Algériens. D’ailleurs, le FFS est en plein préparatifs pour pouvoir proposer au peuple algérien les modalités qui permettraient la concrétisation de ce projet. C’est ce qu’a fait savoir Brahim Meziani, membre de l’instance présidentielle du parti, contacté par Reporters. «Nous sommes en train de peaufiner notre mouture et sommes en pleines discussions sur ce sujet au sein du parti. Mais pas seulement.

Nous avons également pris attache avec d’autres, dont des personnalités qui partagent notre vision et qui sont susceptibles de l’enrichir», a-t-il déclaré. Ainsi, le parti de feu Aït Ahmed a préféré élargir ses consultations pour pouvoir sortir avec un projet plus ou moins consensuel. Brahim Meziani a également fait savoir que «les résolutions prises pour la Constituante seront bientôt rendues publiques». Au niveau du PT, où on estime que seule l’alternative d’une assemblée constituante permettra à des millions d’Algériens de s’insérer dans le processus de construction d’un nouveau système, il est recommandé de faire appel, pour l’aboutissement de ce projet, à toutes les forces vives de la nation.

Ces dernières, explique Ramdane Taâzibt, cadre dirigeant du parti, «pourront prendre part à ce projet à travers la création de comités populaires regroupant toutes les catégories de la société. Ces comités éliront leurs représentants lors d’assemblées générales, lesquelles soumettront, à leur tour, les revendications soulevées et délègueront des représentants pour convoquer une assemblée nationale constituante souveraine». Au cours de la période transitoire, le PT recommande «la formation d’un gouvernement technocrate avec des compétences nationales neutres et sans ancrage partisan pour gérer les affaires courantes».

Il convient de noter que l’option de l’assemblée constituante ne saurait être la panacée pour certains spécialistes en droit constitutionnel, dont Fatiha Benabou, qui a déjà fait connaître sa position à ce sujet et déclaré que cela pouvait constituer «une aventure» et ne s’appliquait que dans les cas de «création d’un Etat» ou de «révolution». Pour sa part, Ameur Rekhila, spécialiste en droit constitutionnel et ancien membre du Conseil constitutionnel, estime, dans une déclaration à Reporters, que «nous sommes encore loin d’une assemblée constituante, car si nous devons parler de cette constituante aujourd’hui, il faut qu’elle émane de la Constitution». Selon lui, «la Constitution doit être gelée et c’est la conférence nationale qui doit déboucher sur un consensus national pour une assemblée constituante».

Il poursuit en expliquant que «c’est cette assemblée constituante qui va ensuite élaborer la nouvelle Constitution et c’est là que nous pourrons dire que nous sommes entrés dans la 2e République». M. Rekhila explique que la démarche dont il parle «n’est pas exceptionnelle» mais que c’est plutôt «la règle d’usage». L’autre homme de droit qui ne fait pas référence à une constituante dans le schéma de sortie de crise qu’il propose est Ahmed Mahiou, directeur de recherche émérite au CNRS, chercheur à l’Ineram et juge ad-hoc à la Cour internationale de justice. Il reste dans le cadre du respect de la loi fondamentale et préconise «la fin de mandat du Président actuel le plus tôt possible, au maximum à la date normale prévue par la Constitution» et son «remplacement par le président du Conseil de la nation pour une période de trois mois».

Ce qui sous-entend que l’actuel président de la Chambre haute du parlement, Abdelkader Bensalah, devra préparer la prochaine élection présidentielle. Pour la gestion des affaires courantes de l’Etat, Ahmed Mahiou suggère le maintien du gouvernement en place qui, souligne-t-il, ne doit cependant avoir «aucune prérogative pour la transition». Cette dernière devra être menée par ce qu’il appelle «un collège provisoire (comité, conseil ou autre), d’environ 50 à 100 membres représentatifs des différents secteurs de la société algérienne, sans exclusive, avec une représentation minimum de femmes et de jeunes». Il recommande, également, «le maintien des deux Assemblées parlementaires (et non-dissolution par respect de la Constitution) pour la gestion des affaires courantes».