Mauvaises nouvelles du Mali. Un charnier a été découvert à la périphérie de Tombouctou, près de l’hôtel Azlay. Selon les premières indications, au moins trois cadavres ont été formellement identifiés. Il s’agit des trois commerçants, des notabilités de la ville des 300 saints. Ils ont été arrêtés par les troupes maliennes, qui ont pris possession de la ville dans le sillage de l’entrée dans la ville des militaires français.
Les commerçants arabes arrêtés ont été interrogés par les soldats de Bamako, puis on n’en a plus entendu parler,,. jusqu’à la découverte, samedi dernier, du charnier en question.
Mohamed Lamine Ould Mohamed Mahmoud a été formellement identifié.
C’est un ancien directeur et un commerçant connu dans la ville. Le second s’appelle Mohamed Ould Tidjani, et le troisième est aussi un commerçant très connu dans la ville.
Mohamed Lamine a été pourtant très « coopératif » avec Bamako, et notoire pour avoir sauvé plusieurs soldats maliens de la mort lorsque les islamistes avaient pris possession de la ville. Ses relations aussi bien avec les islamistes qu’avec Bamako lui assuraient le respect de tous.
En fait, les exactions de l’armée de Bamako contre les populations du Nord n’ont pas commencé avec leur entrée, sous couverture aérienne française, à Gao et Tombouctou, mais bien avant.
On s’en souvient de la soixantaine de jeunes massacrés il y a quelques mois, dont une majorité de Mauritaniens, étudiants dans une école coranique, puis des huit Touareg vivant dans une région à cheval entre l’Azawad et Mopti. Récemment encore, le quotidien malien « Al Akhbar » rapportait que les forces maliennes et françaises ont procédé à la perquisition de plusieurs maisons à Gao à la recherche de présumés collaborateurs avec le Mujao.
Selon des sources locales, Gao aurait connu des exactions à caractère ethnique les deux premiers jours de l’arrivée des troupes franco-africaines. Certains habitants ont attaqué les maisons des Arabes et de Songhaïs.
A. Sévaré, l’envoyé spécial d’ « Al Akhbar », a pu voir le puits où une vingtaine de cadavres ont été jetés après l’exécution sommaire de Touareg et Arabes, selon des témoignages recueillis par la presse française. Suite à la polémique suscitée par les exactions, ce puits a été fermé avec du béton, indique-t-il. La découverte de ce charnier à Tombouctou relance la question des objectifs français au Mali et de l’esprit vindicatif des troupes du capitaine putschiste Amadou Sanogo, engagées dans cette guerre. Hollande a clairement laissé entendre qu’il quitterait le pays dans un mois, laissant des troupes maliennes, aidées par des contingents africains, dont des Tchadiens et des Nigérians, dans les grandes villes.
A ce stade, la chasse aux Arabes et aux Touareg risque d’être particulièrement dangereuse et plongera le pays dans une guerre ethnique, raciale et communautaire sans commune mesure avec la percée islamiste dans le pays.
Les Arabes et les Touareg ont, depuis le début de l’avancée française au Mali, affirmé que Bamako est en train de procéder à une véritable épuration ethnique sous la couverture des frappes de l’aviation française.
Les attentats kamikazes commencent à Gao
Deux jours après l’attentat kamikaze qui a ciblé des soldats maliens à Gao, une puissante déflagration a secoué la ville, dans la nuit de samedi à dimanche, provoquée par un nouvel attentat suicide, le second en deux jours.
Des témoins à Gao ont affirmé aussi que juste après l’attentat, un échange de tirs entre les soldats maliens et des islamistes a eu lieu, confirmant ce qui a été dit par les groupes djihadistes, que des cellules mortes ont été laissées sur place, tant à Gao, Tombouctou qu’à Tessalit, Kidal et AguelHoc, et qu’elles seraient activées dès que les ordres leur seraient donnés.
L’attentat de vendredi avait été revendiqué par la Djamaât Tawhid wal Djihad en Afrique de l’Ouest, le groupe hégémonique à Gao depuis des mois, et auteur de la prise d’otages qui a ciblé le personnel diplomatique algérien, dont le consul d’Algérie à Gao, Boualem Sias.
« Nous nous engageons à augmenter les attaques contre la France et ses alliés. Nous demandons à la population de se tenir loin des zones militaires pour éviter les explosions », a de nouveau mis en garde samedi le porte-parole de la Djamaât Tawhid wal Djihad en Afrique de l’Ouest, communément appelée le Mujao, Abou Walid Sahraoui.
Samedi dernier, deux jeunes portant des ceintures bourrées d’explosifs ont aussi été arrêtés à 20 kilomètres au nord de Gao au moment où ils allaient passer à l’acte.
Annane Imad-Eddine