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Alger d’antan, qui offrait un cadre où il faisait si bon vivre, se voit souillée, chaque jour que Dieu fait, par ses propres «locataires».
Alger la Blanche ternit de jour en jour et perd de son éclat. Les rues de la capitale au charme architectural si particulier, sont harnachées aujourd’hui par des amas infinis d’ordures et de rebuts en tout genre. Alger d’antan, qui offrait un cadre où il faisait si bon vivre, se voit souillée chaque jour que Dieu fait par ses propres «locataires». Des immondices recouvrant les moindres coins et recoins des allées de la ville, les cours d’immeubles sont jonchées par des déchets ménagers et autres détritus, posés pêle-mêle. Pis encore, des effluves déplaisantes frappant de plein fouet les narines…C’est à cet affligeant spectacle que les Algérois assistent quotidiennement, dans l’indifférence pour certains et dans l’impuissance pour d’autres.
Grosses chaleurs et mauvaises odeurs
Si ce phénomène des plus navrants constitue un problème qui subsiste depuis quelque temps dans la capitale ainsi que dans d’autres wilayas, on ne mesure cependant pas la gravité de la situation en cette période où les températures affichent des hausses record. Les restes de denrées alimentaires pourrissent sous le soleil ardent de ces jours d’été. Résultat: la combinaison de la chaleur avec ces déchets souvent avariés, entraîne des odeurs fétides et insupportables, plus que ne peut supporter un être humain. Certaines voies sont devenues impraticables du fait de ces émanations. Il suffit de faire une virée du côté des rues Didouche-Mourad, quartier de Belcourt, 1er Mai, ou encore Bab El Oued pour constater l’ampleur des dégâts.
L’air y est étouffant et le passage d’un point A un point B, devient un vrai casse-tête. Impossible de marcher sans rencontrer des bouteilles en plastique, cartons et emballages, sachets, viande avariée, fruits et légumes périmés, pain. Ces déchets hétéroclites donnent aux trottoirs de la ville des airs de véritables décharges publiques. Les rats y trouvent refuge et les insectes de toutes sortes pullulent en toute liberté. Ces lieux sont devenus de vrais repères pour les moustiques, notamment au grand malheur des habitants des quartiers adjacents. Les chiens errants y ont élu domicile, idem pour les chats qui vagabondent au milieu de ces déchets en quête de nourriture.
Ce sont les mêmes tableaux on ne peut plus préoccupants qui se dressent au niveau des aires de jeu, des cités et des squares situés dans les différentes localités de la capitale. Les passants, visiblement pas si atterrés que ça par ces scènes, ne semblent nullement s’en inquiéter. Ils sont d’ailleurs nombreux à se contenter tout bonnement d’éviter ces montagnes d’ordures et de les contourner.
Les bennes à ordures débordent. Ce qui ne laisse pas autre choix au citoyen que de jeter ses détritus à même le sol. Ainsi, les sachets sont posés les uns sur les autres, parfois même avec le contenu qui déborde. En sus de la ville qui a beaucoup perdu de son esthétique, il se trouve que ce triste état de fait, constitue un très grave danger pour la santé publique. Et pour cause, de très graves maladies peuvent y survenir. L’insalubrité à grande échelle, sur le long terme, nuit gravement à la santé humaine. D’autant que ces tas d’ordures s’amoncellent généralement à proximité des lieux de vie où des enfants jouent, à quelques mètres de là.
aucune réactivité des APC
Face à ce bilan des moins reluisants de l’hygiène publique dans notre pays, il faut quand même admettre que dans cette affaire, les citoyens sont les seuls à être trop souvent blâmés. Certes, l’incivisme de certains de nos concitoyens a bien sûr une grande part dans la propagation de la saleté dans la capitale, mais on ne peut dire qu’ils en sont les seuls responsables. En effet, c’est en premier lieu, aux services d’hygiène relevant des APC de prendre en charge ce problème. Mais depuis un certain temps, les municipalités sont démissionnaires et en inertie totale. Les APC sont les premières à être pointées du doigt dans la mesure où ce sont ces administrations qui sont tenues d’offrir un cadre plus ou moins sain et harmonieux aux habitants de la ville. Et ce, en commençant par assurer un ramassage régulier des ordures et dans tous les quartiers de la ville, particulièrement populaires. Et pourtant, ces mêmes services sont constamment sollicités par des citoyens qui soumettent plusieurs demandes à leurs administrations municipales dans l’espoir qu’elles revoient leur politique de gestion de collecte des ordures ménagères. Mais ces demandes sont restées dans leur majorité lettre morte et n’ont ainsi jamais connu de suite. Cela nous renseigne par ailleurs, sur ce fameux laisser aller de la part de nos responsables, lesquels sont conscients des proportions que prend ce fléau, mais ne daignent pas lever le petit doigt. Quelle image renvoie donc la capitale, Alger, pour ses enfants d’ici et d’ailleurs, mais encore pour le reste de la population du pays? Comment le gouvernement compte promouvoir le tourisme en Algérie, si ce dernier ne peut garantir au minimum, la propreté de ses villes? En pleine saison estivale, les émigrés algériens des quatre coins du globe commencent à affluer en force au pays. Ces derniers sont accueillis par des rues sales et des odeurs nauséabondes. Souvent des réflexions peu flatteuses émanent quant au niveau d’hygiène des Algériens. Si les enfants d’Algérie parlent ainsi de leur pays, que peut-on dire alors des étrangers?
Et nous ne pouvons les blâmer pour ça. Alger qui est dotée d’un patrimoine culturel et architectural envié par bien des peuples, se transforme aujourd’hui en une ville-poubelle. Certains de ses quartiers prennent des airs de favelas.
Cette situation inquiète et préoccupe. D’autant plus que, rappelons-le, l’Algérie a été classée troisième capitale la plus sale au monde, sur une étude réalisée par le groupe britannique Urbain Clean Environnement. Elle est arrivée ainsi derrière Banjul en Gambie et Kigali au Rwanda, souligne la même source. Pour ce groupe, «l’incivisme des Algérois», qui jettent leurs sachets poubelles de façon anarchique et n’importe où, est avancé comme étant la cause à l’origine de ce classement.
Il faut dire que celui-ci est des plus gênants, car il met l’Algérie au même rang que ces pays pauvres et défavorisés, où l’hygiène importe peu et passe au second plan, du fait qu’ils doivent surmonter de graves situations de crises.
Ce laisser-aller durera-t-il encore longtemps? Si la situation perdure, il faudrait penser à appeler le ministère de l’Intérieur à se pencher sérieusement sur cette problématique, et ce, en faisant par exemple, bénéficier les agents de nettoyage de vraies formations sur les opérations de ramassage d’ordures. Par ailleurs, les APC devraient prendre les choses en main et effectuer les opérations de ramassage dans les normes.
Dès lors que le manque de civisme des citoyens d’une part et le laisser-aller des autorités de l’autre subsistent, la situation risque de se dégrader davantage.