Le cheikh Mohammed Sayed Tantaoui, recteur de l’Université cairote Al-Azhar et plus haute autorité morale de l’islam sunnite, est mort brutalement mercredi d’une crise cardiaque au cours d’un voyage en Arabie saoudite, à l’âge de 81 ans, rapporte l’agence officielle égyptienne MENA.
Le cheikh Tantaoui, champion d’un islam modéré, était connu pour ses prises de position libérales, notamment concernant les femmes, qui avaient fait de lui une cible fréquente des tenants de l’islam fondamentaliste. Il était également considéré comme très proche du pouvoir égyptien.
Selon des responsables saoudiens cités par l’agence MENA, il sera inhumé dans le cimetière de Baqi, à Médine, où se trouve le mausolée du Prophète.
L’année dernière, cheikh Tantaoui avait provoqué la colère des intégristes en interdisant le port du niqab, le voile intégral, dans les établissements dépendant de l’Université Al-Azhar, cherchant ainsi à contrer la radicalisation religieuse croisssante dans la population égyptienne.
Nommé en mars 1996 par le président égyptien Hosni Moubarak à la tête de la prestigieuse Université Al-Azhar, cheikh Tantaoui était une figure révérée des 1,4 milliards de musulmans de la planète. Ses fatwas (décrets religieux) avaient un poids considérable, particulièrement en Egypte.
Ses enseignements, très appréciés des modérés du monde musulmans, ont déclenché nombre de polémiques. Il s’était mis les fondamentalistes à dos en soutenant la transplantation d’organes, en dénonçant l’excision et en réclamant une plus grande présence des femmes aux postes à responsabilité.
En janvier 2000, en plein débat sur le divorce en Egypte, il avait décrété que rien dans l’Islam n’empêchait les femmes de divorcer aussi facilement que les hommes. « Les hommes ne sont pas faits d’or et les femmes d’argent », avait dit-il alors déclaré devant le parlement.
Partisan du processus de paix avec Israël, il avait aussi suscité la colère de nombreux Egyptiens, en rencontrant en 1997 le Grand Rabbin d’Israël, Yisrael Lau. Cheikh Tantaoui avait alors été accusé de vouloir normaliser les relations avec l’Etat hébreu, ce que la population égyptienne n’apprécie guère, bien que Le Caire ait signé la paix avec Israël en 1979, un des deux seuls pays arabes à l’avoir fait.
En 2008, il avait fait l’objet d’appels à la démission pour avoir serré la main du président israélien Shimon Peres à l’ONU au cours d’une conférence oecuménique.
Docteur en théologie diplômé d’Al-Azhar, où il avait enseigné avant d’être nommé grand mufti d’Egypte en 1986, cet homme du dialogue entre religions était en revanche critiqué pour son mauvais caractère et son refus de la critique, dont les journalistes faisaient souvent les frais.
AP