La société tente de résoudre par la violence ce que les intellectuels n’ont pas osé régler par les débats d’idées.
La rue de la rive sud de la Méditerranée s’embrase
Pour comprendre ce qui se passe dans les pays arabes et musulmans, je pense que nous devons revenir à la pensée politique, son évolution et ses bugs. Les peuples descendent dans la rue pour tenter de résoudre des problématiques qu’ils n’ont pas encore réglées dans leur tête. L’absence de débats libres, débats philosophiques, débats de pensées, fait que chacun de nous se croit avoir raison et part concrétiser ses projets, ses visions sur un terrain parsemé non pas d’embuches mais d’autres tentatives de concrétisation d’autres projets.
Parmi ces thèmes de pensée politique que nous n’avons pas encore réglés se trouve la question centrale du modèle d’Etat et du modèle de société que l’on voudrait construire dans nos sociétés devancées par plusieurs siècles par les autres dans le monde.
Ayant été, à un moment de leur histoire, des bâtisseurs d’empires et de dynasties, ces peuples regardent jalousement les sociétés occidentales. Beaucoup ont du mal à se détacher de leur passé de crainte qu’ils ne se fondent dans l’universel occidentalisé. Subjugation accompagnée d’une crainte qui nous empêche de nous reconstruire sur des fondements nouveaux, des fondements modernes et contemporains.
Au lieu de repenser notre héritage culturel, notre pensée politique à la lumière des connaissances humaines actuelles, nous nous lançons dans des projets copiés que nous voudrions coller à nos sociétés porteuses de culture inadéquate avec les exigences de la modernité.
Les uns défendent la construction d’un Etat et d’une société sur des modèles authentiquement occidentaux. D’autres ripostent par l’objection d’un « modèle authentiquement musulman ». D’autres encore essaient de réconcilier les deux modèles mais sans débats, sans réflexions ni négociation avec les populations qui sont mises de côté.
Les débats se transforment en affrontements parfois sanglants sur des terrains non amendés pour accueillir des plants à acclimater. Le rôle des intellectuels est justement de résoudre ces problématiques avant de les porter au public pour les adopter et en faire siennes.
Abdellaziz Djeffal