Le mea-culpa de Besson suffira-t-il à redorer le blason terni d’une République fourvoyée ? «La France n’est ni un peuple, ni une langue, ni un territoire, ni une religion, c’est un conglomérat de peuples qui veulent vivre ensemble », vient d’avouer Eric Besson dans une cité de la banlieue parisienne.
Un aveu qui ne semble pas seulement dicter par sa présence dans un lieu où se concentre une population d’origine étrangère. Il marque à tout le moins un moment de doute face à la tournure d’un débat qui divisait les Français eux-mêmes.
C’est la volonté de vivre ensemble qui primerait sur les étroites considérations sur la race et la religion ? On peut être musulman, juif ou protestant et trouver une place dans une République qui, depuis la loi sur la séparation de l’Etat et de l’église de 1905, est capable d’accepter les différences. Pour le sémillant ministre français de l’Emigration, « il n’y a pas de Français de souche, il n’y a qu’une France de métissage ». Nul besoin de recourir donc aux tests génétiques de la honte pour affirmer sa « francité ».
Il revient ainsi à une définition plus généreuse et ouverte de l’identité française. Le débat qu’il avait ouvert le 2 novembre s’en est allé par les sentiers de l’intolérance et dégagé les relents fétides du racisme le plus primaire. Il ne suffisait pas d’être Français de souche mais il fallait surtout dénier aux autres, surtout les musulmans, le droit de le devenir. L’histoire de la France suffisait pourtant à prouver que ses gloires venaient souvent de l’extérieur.
De Marie Curie à Zidane, de Troyat à Sarkozy en passant par Platini, ceux qui ont défendu le plus et le mieux le bleu blanc et rouge n’étaient pas des descendants directs des Gaulois. La patrie n’est pas une notion biologique mais spirituelle. Les plus lucides ne se sont pas trompés. Le débat visant à déterminer le bon et vrai Français est un reniement du vrai socle de l’identité française. Voilà un pays porteur de valeurs d’ouverture et qui a fini par charger ses ressortissants de tous les maux d’origine étrangère. Ils ont pourtant assuré sa prospérité et relevé ses ruines au sortir des guerres.
Lors de la sortie du film « Indigènes », la France au plus haut niveau avait fini par reconnaître sa dette à l’égard des hommes qui avaient même contribué à sa libération du joug nazi. Autres temps, autres mœurs, au nom de sordides calculs politiciens, la France s’est reniée et permis à Le Pen et consorts de souiller son histoire et son présent. Visiblement, elle s’est rendue compte qu’elle s’est fourvoyée dans une impasse et qu’elle donne une piètre image d’elle-même. Le sursaut de lucidité de Besson suffira-t-il à redonner un visage plus avenant à une République ternie ?
H. Rachid.