Qui n’a pas, désagréablement, été surpris un jour par un prix excessivement élevé annoncé d’une voix sèche par le chauffeur de taxi, en fin de course ? Qui n’a pas dû payer la note salée, en grinçant des dents, et sans dire mot en voyant le montant réclamé bel et bien affiché au compteur, au centième de dinar près ?
Qui, encore, en cours de route, n’a pas dû taire, par timidité ou de peur d’essuyer un cinglant revers de l’homme au volant, son agacement contre un compteur qui tourne trop vite, au gré des tours et des détours ?
Qui, enfin, ayant pris un taxi conjointement avec des clients à bord, n’a rien compris dans l’opération arithmétique faite par le conducteur pour calculer le coût du parcours, alors que ce denier n’a ni jeté un coup d’œil sur le compteur au moment de son embarquement ni appuyé sur un bouton pour mémoriser le tarif initial ?
Ils sont nombreux, très nom breux, ceux qui ont vécu pareille déconvenue. Mais rares, ont été ceux qui ont -à juste titre d’ailleurs- dénoncé, de manière formelle, ces pratiques frauduleuses auprès des instances compétentes (la Police, la direction des Transports…).

Quoi qu’il en soit de la suite qui a été donnée à ces plaintes, le phénomène de la fraude liée au compteur de taxi (ou taximètre) a atteint, dans notre ville transformée en chantier à ciel ouvert par le tramway et autres travaux de VRD, une proportion -une donne qui semble a priori arranger les affaires des transporteurs opportunistes à l’extrême- qui devait interpeller les services concernés.
Ainsi, l’on apprend de sources concordantes, que ces appareils horokilométriques sont dans le collimateur de la direction des Transports de la wilaya d’Oran. Par le biais de l’Office national de Métrologie légale (ONML), une vaste campagne sera menée incessamment pour contrôler la conformité ainsi que le bon fonctionnement des compteurs de taxis desservant la ville.
Derrière cette opération coup de poing, confie-t-on, des plaintes en masse émanant de clients qui se sont fait carrément escroqués par certains taxis sans scrupule, à moins qu’il ne s’agisse d’une défectuosité de l’appareil non intentionnelle mais dont la responsabilité incombe, néanmoins, au chauffeur de taxi dans la mesure où il est de son devoir de veiller en permanence au bon fonctionnement de son compteur en le soumettant à un contrôle périodique.
Et ce, même si, faut-il le noter, les responsables de la direction des Transports de wilaya d’Oran (DTWO), comme ceux de l’ONML, persistent à apposer sur cette démarche le sceau de «l’opération routinière de contrôle et de prévention». L’opération risque, cependant, de prendre du temps car il s’agit de milliers de taxis à faire passer au contrôle. L’année dernière, dix-huit (18) taxis avaient été épinglés à Oran par les inspecteurs de l’ONML pour avoir volé -à leur manière- le client.
Au lieu de régler leur compteur sur la tarification du jour, à 15 DA la prise en charge, certains taxis le manipulant sciemment, n’hésitent pas à utiliser la tarification de nuit, à 22,50 DA, tandis que d’autres mettent carrément en veilleuse leurs taximètres pour percevoir la prise en charge à… l’ancienne. C’est-à-dire au pif !
Pour rappel, l’an dernier, sur 217 taximètres contrôlés, 18 taxis avaient été rappelés à l’ordre et mis en demeure de réparer leurs compteurs.
A la direction de l’ONML d’Oran, le ton est paradoxalement plutôt à la sérénité et lorsque la défectuosité est constatée par les inspecteurs sur un compteur, son détenteur est automatiquement assujetti à le présenter chez le réparateur agréé. Reste que pour plus d’efficacité, l’ONML gagnerait à étoffer son personnel technique, au demeurant très réduit et qui ne peut en aucun cas contrôler tous les taxis lorsqu’on sait que la wilaya d’Oran recense plus de 1.100 taxis à compteur.
Selon un technicien inspecteur, «il existe diverses façons de frauder pour un taxi; certaines sont tellement subtiles qu’il est pratiquement impossible de déterminer si elles sont intentionnelles». Notre interlocuteur cite l’exemple du procédé d’arnaque classique, dit dans le jargon «la promenade». Il s’agit peut-être, selon lui, de la plus typique des fraudes.
Elle consiste à emmener le passager par un chemin plus long, à faire des détours inutiles, ou à prendre des rues embouteillées. D’aucuns estiment que l’état actuel du réseau routier intra-muros d’Oran, dont plusieurs axes et tronçons sont soit fermés à la circulation soit embouteillés en permanence, est une conjoncture qui est mise à profit par les pratiquants de ce type de tricherie. Ainsi, le client est embarqué dans un long et non moins tortueux périple, au prétexte que «c’est l’état des routes qui l’impose».
Il y a aussi la manœuvre de mise en marche du taximètre avant que le passager ne monte, l’utilisation de divers artefacts externes qui altèrent la réception du signal de distance au taximètre, l’altération de la programmation ou du tarif dans le taximètre, révèle encore notre spécialiste. Ce dernier précise, d’autre part, que si une altération volontaire du taximètre est commise, cela oblige à briser le scellé ou la violette sauf sur certains appareils non équipés de ces dispositifs de protection.
Loudani Mehdi