El Mouhoub Mouhoud, universitaire spécialisé en économie et ex-président de l’université Paris-Dauphine, puis de PSL, publie « Le Prénom. Esquisse pour une auto-histoire de l’immigration algérienne« . Ce livre est une exploration passionnante et nuancée de la mémoire franco-algérienne et de l’exil, racontée à travers son histoire personnelle et celle de ses ancêtres.
L’ouvrage se distingue par son ouvrage hybride, mêlant récit, anthropologie, histoire et sociologie. L’idée de ce livre est née de notes éparses collectées pendant des années, l’auteur ayant retardé sa rédaction en raison de sa carrière universitaire intense.
Dans ce livre, El Mouhoub Mouhoud analyse l’importance du prénom comme un double héritage. L’auteur y révèle que son propre prénom est le résultat d’un « métissage forcé« : il décolle à la fois de la tradition kabyle (donner au fils aîné le nom du grand-père paternel) et de l’exigence de l’administration coloniale qui impose l’usage d’un nom de famille.
Si la ressemblance de son nom complet (El Mouhoub Mouhoud) a longtemps été une source de gêne pour l’auteur, c’est pourtant ce prénom, marqueur de filiation, qui lui sert de fil conducteur pour retracer l’histoire de l’émigration algérienne.
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El Mouhoub Mouhoud explore la mémoire franco-algérienne à travers son prénom
Dans « Le Prénom. Esquisse pour une auto-histoire de l’immigration algérienne« , l’auteur dresse un portrait complet de son parcours personnel et familial, couvrant une période allant des années 1940 dans le village de ses grands-parents, à son arrivée en région parisienne dans les années 1970, jusqu’à son élection en qualité de directeur de l’université de Paris-Dauphine en 2020.
Grâce à l’alliance de son récit personnel et de sa perspective de chercheur, son récit est à la fois sensible et analytique. Il plonge le lecteur dans la complexité de l’organisation clanique kabyle, sous l’effet de la colonisation, tout en éclairant les politiques urbaines françaises successives.
Le récit d’El Mouhoub Mouhoud débute avec une anecdote symbolique : le premier jour d’école, son père lui achète un costume et une chemise blanche, témoignant de la priorité donnée à l’éducation. C’est le début « d’une construction identitaire complexe« , marquée par de nombreuses contradictions.
El Mouhoub Mouhoud évoque avec subtilité sa jeunesse, naviguant entre les bals du 14 juillet et l’héritage culturel kabyle que son père cherchait à préserver. Cependant, ce parcours a été jalonné par l’hostilité raciste de certains enseignants français : « Quand le directeur est arrivé, il a dit à mes camarades : il vient d’Algérie, ça doit être un cancre« .
Exigence paternelle de « devenir quelqu’un »
Ayant achevé un parcours académique brillant et développé une conscience politique à gauche, Mouhoud a honoré une attente paternelle en devenant professeur d’université. Aujourd’hui, l’universitaire se revendique comme un homme « aux mille identités« .
À une époque marquée par l’intolérance, cette « auto-histoire« est un puissant rappel : « il est possible d’embrasser l’universalisme français tout en conservant une affection pour sa culture d’origine« . En conclusion, El Mouhoub Mouhoud exhorte à ne pas se focaliser sur les figures médiatisées de l’immigration (délinquants et footballeurs). Il faut plutôt porter attention à ces jeunesses, hommes et femmes, qui s’intègrent et réussissent discrètement leur vie.
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