De jeunes entrepreneurs, cadres de mobilis, d’Algérie poste et d’Algérie Télécom: « Feraoun nous a tués! »

De jeunes entrepreneurs, cadres de mobilis, d’Algérie poste et d’Algérie Télécom: « Feraoun nous a tués! »

La vie de ces entreprises est suspendue au bon plaisir d’une femme qui, semble-t-il, ne déteste pas éprouver le pouvoir que sa charge lui donne sur d’autres responsables. Qui résisterait à Feraoun?

Quand la nouvelle est tombée au soir du 14 mai 2015, les réseaux sociaux se sont enflammés. Jeune, universitaire et belle, Iman Houda Feraoun, 36 ans vient d’être nommée ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication. Bombardée à la tête de ce ministère mastodonte, elle incarnait, malgré elle, le rêve d’une jeunesse en quête de reconnaissance et écrasée par la génération d’en haut. Mais toute chose étant relative, un bon universitaire ne fait pas nécessairement un bon ministre.

La politique couplée aux sciences exactes est un alliage qui ne réussit pas à cette physicienne spécialisée dans les métaux. Il est arrivé à Iman Houda Feraoun comme à ce chasseur qui ne sait plus quoi faire de la peau de l’ours qu’il venait d’abattre. Après deux années d’exercice à la tête de ce grand ministère,…son monde a déchanté. Qu’en est-il du management de ce secteur? Où en sont Algérie télecom, Mobilis et Algérie poste en termes de gestion, de rentabilité et d’efficacité?

Retenons à titre d’exemple ces chiffres fournis par un ancien cadre du secteur renvoyé comme un malfrat parce qu’il a osé se défaire des oeillères et descendre des rails sur lesquels la ministre a voulu placer son monde. Ce cadre qui active désormais dans un grand groupe américain, affirme, chiffres à l’appui, que l’ancien P-DG de Mobilis, Mohamed Habib «a réussi la prouesse de redresser son entreprise au bout d’ une année de gestion en la hissant à la première place du podium du marché de la téléphonie mobile pour la première fois depuis sa création».

Le même cadre parlant sous le sceau de l’anonymat souligne que Mobilis a ainsi connu une évolution de «19% de son chiffre d’affaires qui est passé de 103 milliards de DA en 2015 à 123 milliards de DA en 2016 soit l’équivalent de 1,2 milliard de dollars». A la même période, les concurrents du marché de la téléphonie mobile suivent loin derrière Mobilis.

Ainsi, Djezzy a enregistré un chiffre d’affaires de 113, 7 milliards de DA alors qu’Ooredoo a enregistré un chiffre d’affaires de 112 milliards de DA. Le nombre d’abonnés de Mobilis a connu une évolution de 21% de parts à l’année 2015 passant à 17,3 millions d’abonnés en 2016. Pour cette performance, Mohamed Habib a été remercié de fort belle manière en se retrouvant dehors sans préavis. Iman Houda Feraoun a justifié son limogeage par les résultats insuffisants.

La maison mère Algérie télécom a enregistré après le limogeage de son P-DG, Azouaou Mehmel, un autre cadre de valeur, et son remplacement par Kabbal, le limogeage de 30 cadres supérieurs et cadres dirigeants et leur remplacement par des gens proches de la ministre dont l’une d’elle placée à la tête de la direction de la communication d’Algérie télécom. Soit, mais cette personne dispose-t-elle d’un capital expérience? Quels sont ses états de service pour officier à la tête d’une structure aussi stratégique? Mystère…

Renvois, mise au placard de plusieurs hauts cadres, rétrogradation d’autres, nomination des amis et des proches à des postes clés, tel a été le bilan de deux années de gestion chaotique. Que dire alors du moral des troupes?

Un malaise profond s’est installé à la faveur de cette instabilité chronique et d’une précarité sciemment entretenue. Pendant ce long point d’orgue la vie de ces entreprises paraît suspendue comme au bon plaisir d’une femme qui, semble-t-il, ne déteste pas éprouver le pouvoir que sa charge lui donne sur d’autres hommes et femmes. Qui résisterait à Feraoun? Des P-DG de Moblis, d’Algérie télécom des dizaines de cadres chevronnés du secteur tous au carreau! Mais qu’il est donc vain ce pouvoir-là! Et l’autre, le vrai, la domination des choses, la capacité d’en modifier le cours. Qu’il est rare de l’exercer…

On s’est longtemps demandé ce qui rendrait les ministres si fiers parfois même si hautains. C’est entendu et compris maintenant. Iman Houda Feraoun vient d’en apporter la preuve. La fonction provoque la dilatation du MOI. «Je» se gonfle, s’étale, se dandine. Et si l’on gratte un peu le vernis, on découvrira que sous cette façade glamour affleure une arrogance intellectuelle aux dégâts qu’on connaît. Le plus apparent? Algérie télécom et Mobilis sont devenus des gisements de cadres qui font le bonheur des multinationales. Quelle belle revanche sur l’ancien slogan de Mobilis: «Que tout le monde…parle.»