De faux documents de commerce au Hamiz et Semar, Des registres au nom de chômeurs, d’aliénés et de morts

De faux documents de commerce au Hamiz et Semar, Des registres au nom de chômeurs, d’aliénés et de morts
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Tous les moyens sont bons pour certains grossistes et commerçants de détail, voire pour certains importateurs qui se permettent le luxe de gonfler leur chiffre d’affaires sur le dos de leurs «victimes».

Ces «commerçants» n’ont pas hésité à utiliser de faux registres du commerce portant les noms de personnes décédées, ou souffrant de troubles mentaux ainsi que des personnes au chômage, selon une source judiciaire.

La justice a récemment ouvert plusieurs affaires liées à ce genre

d’«arnaque», dont les auteurs sont des importateurs, commerçants et grossistes du Hamiz et Oued Smar. Le tribunal de Chéraga a, à lui seul, ouvert plusieurs dizaines d’affaires concernant ce type d’escroquerie. En effet, ce dernier a ouvert une instruction judiciaire contre le trafic du registre du commerce dans lequel sont impliqués des dizaines d’importateurs, grossistes et commerçants exerçant à El Hamiz et Semar ex-Gué de Constantine, selon une source judiciaire. Selon le dossier judiciaire de cette affaire, dont une partie se trouve au tribunal de Chéraga, des dizaines parmi ces commerçants se sont fait délivrer des registres du commerce au nom de personnes décédées ou souffrant de troubles mentaux et exploitant la situation socio-économique difficile d’habitants de zones désenclavées dans les wilayas de Médéa et Aïn Defla. Les personnes accusées dans cette affaire ont pendant longtemps fait dans l’importation sans être inquiétées par les Douanes algériennes. Mieux, un importateur indélicat avait l’idée d’utiliser le nom d’une personne âgée de 27 ans, qui réside à Annaba et qui souffre du chômage depuis des années.

Profitant de sa situation socio-économique, l’importateur algérois avait importé, au nom de cette jeune personne (un registre du commerce établi en son nom), plusieurs moteurs pour climatiseurs à travers plusieurs dizaines de conteneurs via le port d’Annaba, et ce, pour une somme phénoménale. Pis encore, une autre somme astronomique, selon une enquête des services de sécurité, estimée à 30 millions de dollars, a été transférée par cet importateur au profit de son compte ouvert dans une banque française. Il s’agit là d’un grave crime économique qui avait causé au Trésor public un préjudice financier très important. Toujours selon cette enquête, les pertes sont estimées à près de deux milliards de dinars. Ce n’est pas tout, c’est en son nom (le jeune chômeur d’Annaba) que les 30 millions de dollars ont été transférés à partir d’une banque française dans la wilaya de Constantine. Des énigmes sont relevées dans cette affaire, explique notre source judiciaire. Le plus étonnant c’est que les moteurs des climatiseurs ne sont pas beaucoup utilisés en Algérie, et le jeune homme au nom duquel le registre du commerce a été délivré ne possède pas une usine qui pourrait expliquer l’opération commerciale ou le transfert vers l’étranger de près de 30 millions de dollars. Voilà ce qui confirme, de plus, l’utilisation frauduleuse du nom de ce jeune chômeur par l’importateur, dont le but était d’importer, sans grand risque, des conteneurs bourrés de pièces pour les

«clims», transférer de l’argent et devenir richissime en quelques mois. D’autre part, l’enquête des services de sécurité sur cette affaire se poursuit toujours afin d’avoir plus de détails, d’autant que cette opération d’importation de moteurs a servi de «justificatif» pour le transfert de cette forte somme en devises vers l’étranger. L’enquête déterminera, par ailleurs, si le jeune homme au nom duquel le registre du commerce a été délivré ne serait qu’un prête-nom, est-il ajouté.

Ce qui est étonnant, estime la même source, c’est que les autorités douanières n’ont rien suspecté, dans cette affaire, surtout que les dizaines de containers sont entrés par le même port durant une période relativement très courte. Mieux, la personne dont le nom a été utilisé dans le registre du commerce pour importer plusieurs conteneurs n’avait que 27 ans, ce qui devait soulever plusieurs soupçons, alors que les douaniers avaient fermé l’œil sur le «passage» de plusieurs conteneurs en l’espace de quelques mois. S’agit-il d’une complicité ? Ou plutôt d’un laisser-aller ? Seule l’enquête déterminera la suite de cette affaire.

Par Sofiane Abi