Après ses déclarations fracassantes sur la prise d’otages d’In Amenas, David Cameron débarque à Alger. Une première pour la Couronne britannique. C’est en effet la première visite d’un chef du gouvernement britannique en Algérie depuis un demi-siècle.
Bouteflika et Cameron
Le Premier ministre britannique David Cameron a entamé mercredi une visite à Alger en scellant un partenariat de sécurité entre les deux pays, deux semaines après l’attaque d’In Amenas par les signataires du sang ayant fait 37 morts étrangers, dont des Britanniques. Ladite prise d’otages a-t-elle été déterminante dans la visite du chef du gouvernement britannique ? Si tout porte à le croire, il est difficile cependant de décoder dans le jargon diplomatique et les déclarations pleines d’assurance les raisons cachées de cette visite précipitée.
M. Cameron a été accueilli par son homologue Abdelmalek Sellal à son arrivée à l’aéroport d’Alger, à 16h15. Il s’est ensuite entretenu avec le président Abdelaziz Bouteflika, selon l’agence de presse APS. Aussi étrange que cela puisse paraître, le président Bouteflika n’a pas décroché une seule déclaration à la faveur de la présence de Cameron à Alger. Comme lors de François Hollande, Abdelaziz Bouteflika a brillé par son silence, se contentant de se montrer devant les caméras à côté du chef du gouvernement britannique. L’agence officielle a reproduit par le menu les déclarations de David Cameron, mais aucun mot du président Bouteflika.
Pendant cette visite à l’image de celle de Hollande, l’information vient de sources britanniques. L’Algérie ne semble servir que de cadre. Les deux dirigeants ont décidé de mettre en place un nouveau partenariat stratégique pour mieux lutter contre les nouvelles menaces terroristes, a-t-on précisé de source gouvernementale britannique. « Lorsque le terrorisme se développe dans différentes parties du monde, il atteint nos peuples et nos intérêts non seulement dans ces parties du monde, mais également chez nous dans notre pays », a déclaré M. Cameron lors d’une conférence de presse.
« La menace terroriste d’Al-Qaïda à laquelle nous sommes confrontés dans certaines régions du Pakistan, du Yémen ou de Somalie, est nettement plus grande que le terrorisme d’Al-Qaïda qui se développe au Mali », a poursuivi le Premier ministre britannique. « Mais dans la mesure où elle grandit nous ne devrions pas l’ignorer, ne devrions travailler en partenariat pour essayer de la combattre ».
Dans le cadre de ce partenariat, Londres et Alger devraient échanger des informations sur la sécurité des frontières, la sécurité aérienne, et la lutte contre les menaces visant la stabilité de l’Afrique du Nord, selon cette source gouvernementale ayant requis l’anonymat. Ce qui constitue une nouveauté quand on sait que l’espace nord-africain n’est pas une priorité statégique pour la couronne britannique. Derrière cet intérêt aux menaces terroristes dans la région, c’est sans doute la sécurité des sociétés britanniques qui inquiète David Cameron plus qu’autre chose.
Les premières rencontres d’experts britanniques et algériens pourraient se tenir dans les prochains mois, a-t-on précisé de même source. « Nous avons retenu les leçons du passé, ces problèmes ne peuvent être traités seulement par des moyens militaires ou de sécurité », a poursuivi M. Cameron. « Il nous faut combiner une réponse sécuritaire forte mais également travailler avec nos partenaires internationaux, utiliser notre diplomatie, notre budget d’aide, utiliser tous les moyens à notre disposition – y compris tenter de trouver un règlement politique à certaines revendications sous-jacentes dont profitent les terroristes », a-t-il ajouté.
« Je suis ici suite à la terrible attaque terroriste d’In Amenas dans laquelle six citoyens britanniques et un résident de la Grande-Bretagne ont perdu la vie. Cela nous rappelle que ce qui se passe dans d’autres pays nous affecte directement chez nous », avait-il expliqué à une télévision britannique.
M. Cameron a également indiqué que l’Afrique du Nord ne devait pas devenir un autre Irak ou Afghanistan. « Nous ne regardons pas cette région en pensant que la réponse est purement militaire. Ce n’est pas le cas », a-t-il dit. Cette déclaration n’est pas sans évoquer l’engagement militaire français au Nord-Mali. Elle sonne comme un avertissement à peine voilé à François Hollande qui a lancé ses soldats en solo contre les narco-islamistes qui occupaient l’Azawad depuis le printemps dernier.
Sa visite intervient moins de deux semaines après la prise d’otages sur le site gazier d’In Amenas, et l’assaut de l’armée algérienne qui se sont soldés par la mort de 37 étrangers, d’un Algérien et de 29 ravisseurs. La visite de M. Cameron en Algérie doit s’achever jeudi.
Hamid A./AFP