L’ancien chef de gouvernement Mouloud Hamrouche enchaîne, dans le sillage de l’élection présidentielle, les sorties médiatiques. Il estime, dans deux entretiens à El Watan et El Khabar, que le système est dans l’impasse. Il plaide un dépassement de la crise avec l’implication de l’institution militaire.
Mouloud Hamrouche ne recourt pas aux formules alambiquées pour assumer une proximité avec l’institution militaire, un corps auquel il a appartenu jadis. Une institution dont il pense le rôle indispensable dans le dépassement de la crise. Il l’affirme clairement, au demeurant, dans ses interviews à El Watan et El Khabar. «On ne peut pas concevoir un processus de dépassement de la crise sans la participation et l’accompagnement de l’institution militaire. Le pays a besoin de l’implication de l’institution dans la phase de préparation et d’exécution pour légitimer le processus», affirme- t-il dans El Khabar.
Dans El Watan, il soutient que le pouvoir en place n’a pas de légitimité à faire valoir, sauf celle qu’il tient de l’armée. Il s’élève, aussi, contre ceux qui revendiquent l’éloignement de l’armée du champ politique : «De quelle légitimité se réclameraient ces hommes si l’armée n’avait plus à légitimer leur pouvoir ?» Mouloud Hamrouche reconnaît, d’ailleurs, dans les deux entretiens, que c’est à l’institution militaire qu’il s’était adressé en premier chef lors de ses deux précédentes sorties : «Je m’adresse à ceux qui gouvernent et à ceux qui légitiment. Je m’adresse au pouvoir parce que la majorité de la population a été forcée à déserter le champ politique.»
Parlant de l’actualité la plus immédiate, celle intimement liée à l’élection présidentielle, Mouloud Hamrouche infirme que l’armée ait adoubé le candidat Bouteflika. Il reconnaît néanmoins que l’institution militaire «a été forcée de maintenir le statu quo». Ceci est venu en enchaînement de ce qu’il affirme comme tentative de groupes exerçant le pouvoir formel d’échapper à la surveillance de l’armée. «Des centres et des groupes autour du pouvoir formel veulent exercer le pouvoir sans la surveillance de l’armée et sans partage, par le maintien des lois d’exception, malgré la levée de l’état d’urgence, le contrôle des directions des partis gravitant autour des mêmes sphères.»
Le concernant personnellement, et s’agissant de son ambition, l’ancien chef de gouvernement a travaillé à corriger l’assertion qui a couru et qui le donne prêt à être le candidat de l’armée. Il explique que cela vient de la déformation d’une de ses anciennes déclarations dans laquelle il avait soutenu qu’il ne se présenterait pas contre un candidat de l’armée. C’était en 1995. Il infirme également qu’il a été approché par le cercle présidentiel et par le DRS pour qu’il accepte le poste de vice-présidence de la République. «Les cercles proches du pouvoir sont derrière cette rumeur», accuse-t-il. Mouloud Hamrouche a refusé de nommer Bouteflika.
Selon lui, le problème ne se pose pas en termes de personnes mais a trait au système. «Le problème ne se pose pas en terme d’être pour ou contre une quatrième mandature. Il y a des problèmes graves qui se posent et d’autres qui vont se poser immédiatement après la présidentielle, avec ou sans quatrième mandat.» Mouloud Hamrouche affirme qu’il y a de sérieuses menaces, lesquelles viendraient du risque de l’effondrement du système.
S. A. I.
RASSEMBLEMENT DE BARAKAT DEVANT L’ENTV: «Télévision nationale, pas bouteflikienne»
Les militants du mouvement Barakat ont été hier, au rendezvous, pour un rassemblement devant le siège de l’ENTV, à Alger pour dire «Télévision nationale, pas bouteflikienne». Des banderoles et des pancartes ont été portées haut hier, à partir de 11h, au boulevard des Martyrs et sur lesquelles on pouvait lire : «Barakat El Khourti, Barakat la propagande du système, Barakat l’instrumentalisation de la télévision publique». Plus d’une quarantaine de militants rassemblés sur un trottoir et encerclés par un cordon policier scandaient à la fois «rendez au peuple algérien sa télévision… l’ENTV nous appartient tous».
Certains ont, par contre, préféré rester silencieux, la bouche scotchée par un ruban adhésif sur lequel était inscrit «Barakat». Pour rappel, après plusieurs manifestations à la place Audin, devant la Faculté centrale, pour dire «non au quatrième mandat de Abdelaziz Bouteflika et au système politique actuel qui a permis un tel scénario aux conséquences tragiques pour l’avenir du pays», ces jeunes Algériens ont décidé, cette fois-ci, de protester contre ce qu’ils estiment «un outil de propagande au service du pouvoir». Ils considèrent, enfin, qu’il est temps de restituer au peuple sa télévision financée par l’argent du contribuable.
M. M.