La tournée du sous-secrétaire d’Etat intervient à un moment crucial pour la région.
Le sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires politiques, Thomas Shannon, est attendu à Alger pour le 20 du mois en cours, dans le cadre d’une longue tournée en Afrique du Nord et subsaharienne. L’adjoint de John Kerry est déjà dans la région, puisqu’il était hier à Rabat. Il est attendu aujourd’hui en Tunisie pour clôturer la partie nord-africaine de son périple par Alger où il séjournera 24 heures de plus qu’à Rabat et Tunis. Il faut dire que contrairement aux deux capitales du Maghreb où le responsable US prévoit des entretiens strictement politiques, sa halte algéroise sera riche en rendez-vous, puisqu’il sera l’hôte des hommes d’affaires algériens, avec qui, il abordera les opportunités d’investissements américains en Algérie. Il convient de souligner, à ce propos, une hausse significative de la présence US dans l’économie hors hydrocarbures.
Des projets dans la mécanique, l’agriculture et bientôt dans le médicament semblent suffisamment visibles et intéressants pour les Américains au point que le sous-secrétaire d’Etat ait vu un intérêt d’en évoquer les possibles développements du partenariat économique algéro-américain. Faut-il souligner que dans la tradition US, lorsqu’un haut responsable se déplace à l’étranger, il évoque l’économie, lorsque les hommes d’affaires US y voient un réel intérêt. C’est dire donc, au regard de l’agenda de Thomas Shannon, que l’étape algérienne est la plus riche et également la plus spécifiquement intéressante du point de vue américain. Il faut dire également que pour le responsable américain, Alger est aussi déterminante au sens où la coopération dans la lutte antiterroriste est considérée comme une dimension très stratégique du partenariat entre les deux pays. Cela au plan bilatéral.
Sur un niveau plus global, la tournée du sous-secrétaire d’Etat intervient à un moment crucial pour la région. Tant au niveau de l’Afrique du Nord, avec la Libye qui chancelle et au Sahel où le Mali est confronté à une recrudescence des attaques terroristes avec la ferme détermination d’enterrer l’accord d’Alger, la situation dans la région est assez inquiétante de l’avis des Américains. En dépêchant Thomas Shannon dans la région, Washington, qui n’écarte plus l’option de l’intervention militaire contre Daesh en Libye, entend sonder les intentions des pays voisins et connaître les arguments qui leur font craindre une détérioration brutale de la situation sécuritaire en Libye. Ce pays qui peut prendre le chemin de la Syrie ou de la Somalie, est une véritable tumeur que des frappes militaires transformeraient en cancer généralisé.
La thèse de l’Algérie et de la Tunisie sont claires sur le sujet. Le Maroc, dont la position est traditionnellement calquée sur celle des pays du Conseil de coopération du Golfe, dont il est membre, n’est que marginalement impliqué, même si les frères ennemis libyens ont organisé une partie de leur dialogue à Rabat.
L’autre volet de la mission du sous-secrétaire d’Etat US, le Sahel, le conduira à Bamako et Ouagadougou, deux capitales qui ont connu des opérations terroristes spectaculaires, signés par les groupes armés qui infestent la sous-région du Sahel. Les Etats-Unis, qui ont soutenu l’accord d’Alger, mais craignent une résurgence de la violence au Sahel et la connexion entre Daesh et les groupes terroristes de l’Afrique subsaharienne, donnent à travers les discussions qu’aura Thomas Shannon avec le président Idris Boubaker Keita et Christian Kaboré, un signal fort de leur engagement pour la paix dans cette région du monde.
En fait, il y a dans la tournée nord-africaine et sahélienne de l’envoyé américain, une volonté de tâter le pouls des cinq capitales, histoire de prendre l’information à la source, et sans doute aussi, informer les autorités de ces pays des intentions américaines dans la région, du moins ceux avec qui Washington veut communiquer.