Crises à répétition

Crises à répétition

Par Mahdi Boukhalfa

Il y a certainement des signaux de détresse préoccupante du secteur économique public et que symbolise cette crise devenue cyclique, sinon structurelle de l’une des plus emblématiques entreprises nationales, Air Algérie. Entré dans un turbulent cycle de crises à répétition depuis une dizaine d’années, le premier transporteur national n’arrive plus à sortir du cercle infernal des grèves qui ont passablement érodé autant sa crédibilité, ses parts auprès du marché de l’émigration par rapport à la concurrence que sa rentabilité.

Air Algérie ne fait plus recette et ne tient qu’à un fil, sinon aux subventions étatiques. Cette longue agonie d’une compagnie au personnel pléthorique, qui n’arrive plus à faire des bénéfices, malmène à longueur d’année ses passagers et ne veut même pas mourir d’une belle fin, celle d’un dépôt de bilan, qui ouvrirait la voie à une situation plus conforme aux nouvelles exigences pointues du transport aérien. Avec la fin de l’Etat providence qui finance à perte des entreprises publiques qui n’arrivent non seulement plus à assurer un service minimum, mais qui ruinent financièrement les finances du pays. Combien aura coûté la recapitalisation de dizaines de grandes entreprises publiques, parfaitement incapables de mettre sur le marché des produits performants, que les filières de l’import se chargent d’aller chercher sur les marchés mondiaux, parfois à moins de deux heures de vol d’Alger, quand ces entreprises que soutient le Trésor public, et donc le contribuable, ne servent qu’à assurer des salaires et rien de plus ?

On évitera soigneusement de parler de quête de paix sociale à coups de milliards de dollars. L’Etat providence dans le cas précis de la brinquebalante compagnie aérienne nationale ne peut indéfiniment se cacher sous le manteau de la souveraineté nationale en matière de protection du marché aérien national et ne pas voir la réalité de face. Celle d’une compagnie sclérosée, vieillie, atteinte de toutes les maladies de gestion possibles. Endettée. Il serait grand temps pour moderniser le transport aérien et rendre sa crédibilité au pavillon national, si tant est que la fibre patriotique peut être dans cette situation mise à contribution, de trouver des solutions rapides, courageuses, radicales qui puissent faire émerger une nouvelle donne du marché aérien algérien. Non seulement l’éventualité de l’Open Sky est recommandée pour qu’il y ait plus d’opérateurs à moindre prix sur la destination Algérie, en particulier les grandes régions à fort potentiel touristique, mais cela obligera l’unique opérateur national, si on excepte Tassili Airlines, à se montrer à la hauteur des exigences du nouveau marché ou céder sa place.

Certes, il serait difficile d’inhumer sur l’autel de la mauvaise gestion ou les crises cycliques au sein de la compagnie un pavillon national lui-même emblème de la souveraineté nationale. Pour autant, des solutions douloureuses à court terme et judicieuses à moyen et long terme peuvent redonner aux entreprises publiques, et non pas seulement Air Algérie, une seconde vie. Celle d’une ouverture de capital pour attirer les majors non seulement du marché du transport aérien, KLM l’a fait avec Air France, mais des grands secteurs qui pèsent le plus en termes de croissance économique. Il s’agira surtout d’aller chercher des investisseurs potentiels dans les secteurs les plus rentables, les plus attractifs et qui captent le plus d’investissements. C’est l’unique condition pour opérer une fois pour toutes une totale mutation de l’économie nationale. Dès lors, avec un marasme économique et financier nommé Air Algérie, qui transporte en malmenant ses clients pour assurer la paie de son gourmand personnel pléthorique, l’économie algérienne restera toujours otage de ses insuffisances.